Travailler et consommer le dimanche : pourquoi ? Pour qui ? (30/09/2013)

Un nouveau casse-tête pour  François Hollande et Jean-Marc  Ayrault : quatorze magasins de bricolage Castorama et Leroy Merlin  viennent de braver  l’interdiction d’ouvrir le dimanche prononcée  par la justice. Pour  « faire évoluer les choses »,  le Premier ministre réuni aujourd’hui  les  « (huit) ministres concernés » par  le dossier du travail dominical.  Dans les faits, des   groupes de la grande distribution (Décathlon, Galeries Lafayette, Boulanger,  Fnac…)  ont depuis longtemps obtenu là où c’est possible et/où dans les périodes données,   l’accord des salariés désirant travailler le jour du seigneur. Un sujet sur lequel la gauche  et ses représentants gouvernementaux sont incapables de parler d’une seule voix. 

 Les possibilités de travail  du dimanche et de travail de nuit ont  été étendues, sous certaines conditions et dans  certaines zones,    pour la première fois  par la  précédente majorité UMP.   Aussi, Sylvia Pinel (ministre délégué auprès du ministre du redressement productif, chargée de l’artisanat, du commerce et du tourisme)  et Bernard Cazeneuve (ministre délégué au Budget)   ont déclaré que  s’ils étaient opposés à une généralisation, ils  ne sont   pas hostiles à des discussions, comprendre à de nouveaux aménagements et dérogations. Bref à une généralisation qui ne dit pas son nom…

 « Il y a des salariés qui ont envie de travailler dimanche, des gens qui ont envie de faire leurs courses le dimanche » ;  « le précédent gouvernement a laissé s’empiler des règles, des lois, à l’arrivée, on n’y comprend plus grand-chose » ;  «  à l’évidence le statu quo n’est pas tenable » a affirmé hier sur France 5  le  ministre des Affaires sociales Marisol Touraine.

 La veille, Benoît Hamon et Christiane Taubira ont opposé une fin de non-recevoir catégorique  à un assouplissement de la législation sur le travail du dimanche. Une  position voisine de celle du ministre du Travail Michel Sapin, défavorable à toute évolution législative sur le travail dominical et le travail de nuit.

 Rappelons-le, la libéralisation du travail du dimanche -hors  les traditionnels commerces de bouche ouvert en général le dimanche matin-  était une promesse de campagne du candidat Sarkozy en 2007. Une promesse qui déboucha notamment sur la loi portant le nom du député UMP qui en était le rapporteur,  Richard Mallié,  qui ne clarifia pas la situation mais étendit  les ouvertures dominicales  dans les  zones à intérêt touristique et dans les zones urbaines, les périmètres urbains d’usage de consommation exceptionnelle (PUCE).

 A dire vrai, ce sujet est rarement appréhendé sous toutes ses facettes. A priori,  la position de principe du FN consiste à laisser la liberté de choix aux Français.  Une liberté qui ne doit pas être cependant celle du renard dans le poulailler, en ce qu’il s’agit de concilier cette liberté de travail avec les droits des salariés.

 Marine Le Pen  le relevait en janvier 2007,  «les Français  doivent avoir la liberté de travailler mais la contrepartie c’est qu’ils soient bien payés. Moi je veux bien entendre les arguments consistant à évoquer la vie de famille. Mais si la vie de famille c’est se regarder en chien de faïence pour partager un poulet divisé en douze je ne suis pas du tout sûre que ce soit ce que les Français attendent. Laissons dans ce domaine comme dans d’autres, la liberté aux Français ». Mais cette « liberté » notent  aussi Bruno Gollnisch et la présidente du FN,   ne doit pas être  instrumentalisée  par un  lobby  de la  grande distribution  qui sait se faire entendre dans les allées du pouvoir  et qui jouit de complicités au sein de nombreux exécutifs municipaux…

 Beaucoup de spécialistes soulignent que  l’ouverture sept jours sur sept des magasins  ne saurait avoir un impact sur la relance de la consommation, sachant que le salaire des consommateurs reste le même et que la somme d’argent qui est dépensée sur six jours  le  sera désormais simplement sur sept…

 Il est tout aussi  certain qu’une généralisation de l’ouverture le dimanche des grandes enseignes aurait surtout  pour effet de  poursuivre la destruction des dizaines de milliers  emplois dans le petit commerce. Sous le gouvernement du calamiteux Jean-Pierre Raffarin,   Patrick Devedjian, alors ministre  délégué  aux libertés locales (2002-2004)  puis ministre  délégué à l’économie (2004-2005),  avait lancé  une offensive en faveur du travail dominical. Il estimait que l’extension des dérogations  créerait « entre 10 000 et 15 000 emplois ».

  L’Union des professions artisanales, la fédération du commerce CFTC, avaient battu en brèche les arguments avancés,  relevant  que cette généralisation serait surtout catastrophique  pour les  petits commerçants et artisans qui n’ont pas  les moyens d’ouvrir sept jours sur sept, et de fragiliser des employés qui deviendront le dimanche des « volontaires forcés ».

 Commerçants et artisans victimes  des ouvertures illégales, des promotions mirobolantes des hypermarchés. Mais aussi   du « désintérêt d’une grande partie de la classe politique »,  de « l’insécurité juridique dans les banlieues où l’on ne pratique pas la tolérance zéro pour les délits économiques comme les ouvertures illégales le dimanche »…

 Aussi,  derrière les arguments   consistant paraît-il  à offrir « le choix » de leur mode de consommation aux Français, cette  prime offerte aux grandes chaînes  s’apparente  à une attaque en règle  contre les travailleurs indépendants, les  commerçants et artisans. Une offensive   d’autant plus illégitime  que les commerces de proximité, au-delà du rôle économique qui est le leur,  contribuent  notamment à maintenir de la vie, des échanges, une animation dans les villages comme dans les quartiers des grandes villes.

 Il y a quatre ans, le conseiller  régional FN de l’Isère, Maurice Faurobert avait apporté son soutien aux employés du magasin  Casino à Vézeronce contre le travail dominical.  « Mon dimanche c’est aussi ma famille, mon repos, ma liberté de vivre pour autre chose que pour l’utopie mercantile du toujours plus ! ».

Marine Le Pen dénonçait ce matin sur France bleue  les comportements de prédateurs de la grande distribution,   cette  « idéologie ultra libérale » à  laquelle s’est ralliée également le PS  qui entend faire de nous « en tout temps en toute circonstance et en tout lieu »,  « des producteurs  et des consommateurs ».

Soulignons que si le droit européen qui s’impose en France  prévoit un jour de repos hebdomadaire,  le dimanche n’est pas spécifiquement désigné comme étant ce jour  chômé. Cela n’a pas échappé  à Pierre Blanc, auteur il ya dix ans  d’un rapport favorable à l’ouverture des magasins le dimanche,  avec  le  soutien de la Chambre de commerce de Paris et de M Devedjian. Il expliquait que  « la légitimité du repos dominical se base sur la tradition chrétienne. Or pour les musulmans, c’est le vendredi et pour les juifs, le samedi. Pourquoi ne pas laisser le choix au commerçant ? »…

On l’aura compris relevait Bruno Gollnisch,    au-delà de toute considération matérielle, c’est le symbole même du dimanche, sa résonance au sein de notre civilisation,  qui est menacé.   Encore un verrou à faire sauter pour les  personnes qui voient dans les traditions, les us et coutumes français, un frein insupportable à l’avènement  d’une société où les individus seraient réduits au simple rôle de consommateur déraciné et interchangeable.

http://www.gollnisch.com/2013/09/30/travailler-consommer-dimanche/

14:57 Écrit par pat | Lien permanent | Commentaires (0) |  Imprimer |  Facebook | | | | |