Christophe Dickès, bien connu des lecteurs de Monde&Vie pour ses nombreuses publications, dernièrement sur l'histoire récente du Vatican, vient de lancer une radio sur le net, pour propager les connaissances historiques Une initiative pleine de promesses…
On appelle cela une webradio, une radio sur Internet. Est-ce une vraie radio ? direz-vous. Ce n'est pas une radio en direct, certes, mais comme les vraies radios, la webradio propose des émissions sur des thèmes donnés. Ces émissions sont immédiatement disponibles en podcast, à raison d'une par semaine. Et le pod-cast est absolument gratuit, ce qui ne gâte rien. La publicité du site nous annonce « la première webradio intégralement consacrée à l'histoire ». L'idée est de tisser un partenariat avec deux éditeurs de livres historiques bien connus, Perrin et Tallandier, qui font ainsi connaître leurs auteurs sur des sujets clés, aussi bien en histoire ancienne, en histoire médiévale, en histoire moderne ou en contemporaine. Les meilleurs historiens s'expriment sur des sujets essentiels pour notre présent. Alors que l'École n'assure plus un véritable enseignement de l'histoire, alors qu'en même temps il y a une demande forte pour connaître le passé et découvrir par ce biais ou redécouvrir notre identité, ces émissions dialoguées peuvent rencontrer une vaste demande, pour peu que leur existence soit connue du public. On n’a pas besoin de les écouter à horaires fixes, elles restent à notre disposition tant que nous le souhaitons. Magnifique illustration de la liberté d'apprendre !
Je voudrais souligner aussi combien les connexions entre l'histoire et le christianisme sont souvent abordées et mises en valeur. L'émission que Christophe Dickès fait avec Monique Cottret, intitulée Qu'est-ce que le jansénisme ? apporte des réponses très claires sur ce mouvement religieux à la fois profondément traditionnel et protéiforme, qui va jusqu'à favoriser la Révolution française pour se débarrasser des Bourbons.
L'émission avec Sébastien Morlet sur la Grèce et le christianisme permet de comprendre comment les nouveaux croyants de cette petite secte, après avoir pris comme nom « les universels » (les catholiques) vont considérer que la culture grecque est pour eux comme un deuxième Ancien Testament. Saint Clément d'Alexandrie pense qu'il y a une alliance dans le Logos entre philosophie grecque et révélation chrétienne. On peut penser avec Benoît XVI que cette alliance dure jusqu'à nos jours et déplorer ce que le pape allemand appelait « la déshellénisation » du christianisme. C'est l'une des conséquences du modernisme historique que d'avoir réalisé cette déshellénisation dont nous souffrons tous.
Le Führer, saint Louis et les juifs
Je suis personnellement particulièrement sensible à l'histoire religieuse, mais, au hasard des publications récentes, l'histoire militaire n'est pas oubliée Thierry Lentz vient parler des Mémoires de Napoléon et il revient pour évoquer la vie extraordinaire de Joseph Bonaparte. Jean-Paul Bled, lui, évoque Les hommes de Hitler en montrant comment le Führer, qui à partir de 1937 ne tient plus de Conseil des ministres, n'accepte d'avoir de relation qu en tête à tête avec tel ou tel de ses « serviteurs », auquel il revient de mettre en application les intuitions du Guide en restant toujours « dans l'esprit du Führer ». C'est ce « totalitarisme anarchique », qui explique que nous n'ayons pas retrouvé un ordre écrit du Führer pour la destruction des juifs d'Europe. Les collaborateurs ont saisi « au vol » l'esprit du Führer.
Ce sont de véritables trésors que contiendra cette bibliothèque audio qu'il faut consulter dès que vous avez le temps d'écouter. Il y a deux formats : le quart d'heure pour la présentation d'un livre et les trois quarts d'heure pour la réception d'un historien. Le système d'index est très bien fait. Pour peu que vous ayez un peu de curiosité, vous serez facilement rassasié en cliquant sur le domaine qui vous intéresse plus particulièrement. Je donnerai quant à moi une mention spéciale à l'historienne Juliette Sibon, avec son livre Être juif aux XIIe-XIVe siècles, qui, dans un entretien très ouvert, revoit l'attitude de saint Louis, obligeant comme on sait les juifs au port de la rouelle. Elle dénonce très fermement la manière dont on confond la rouelle avec l'étoile jaune de sinistre mémoire et souligne que, d'après le concile de Latran IV, « les juifs n’étaient pas obligés de la porter si cela leur portait préjudice ». Rien de pire que les anachronismes en histoire…
Christophe Dickès nous propose, sur ce site, de véritables trésors. Comment y accéder ? Il suffit d'inscrire "Storiavoce" sur n'importe quel moteur de recherche. Vous êtes à un clic ! Bonne cueillette à tous !
Abbé G. de Tanoüarn monde&vie 15 décembre 2016 n°933