Rien de tel, en Amérique du Nord, ou Christopher Rufo est une personnalité intellectuelle et médiatique majeure du camp conservateur. Il a 700.000 followers sur X, 93.000 sur Substack, une forte présente sur Fox News et le Wall Street Journal, a été reçu par d’autres stars d’opposants au progressisme comme Tucker Carlson ou Jordan Peterson.
Qui est-il, au final ? On peut commencer en lisant la présentation au début de sa très longue fiche Wikipédia en anglais : « Christopher Ferguson Rufo est un militant conservateur américain […] Il est un opposant à la théorie critique de la race, qui selon lui, "a imprégné tous les aspects du gouvernement fédéral" […] Rufo a participé aux efforts républicains visant à restreindre l'enseignement ou les séminaires sur la théorie critique de la race. » Rufo, né en 1984 dans un milieu familial de gauche, est devenu après ses études (Georgetown, Harvard), réalisateur de documentaires, dont America Lost, en 2019, qui raconte l’histoire de trois villes américaines oubliées (les États-Unis « périphériques », pour parler comme Christophe Guilluy). À partir de 2020, il a connu une sorte de chemin de Damas et est devenu un opposant virulent aux mouvements woke et LGBT, particulièrement à la « critical race theory ».
Ses positions sont notamment décrites dans son livre (non traduit) de 2023, La Révolution culturelle américaine. Comment la gauche radicale a tout conquis. Le Monde résume ainsi la pensée de Rufo : « Depuis 2020, Christopher Rufo est engagé dans une lutte farouche contre la gauche et a fait de l’université, qu’il juge responsable de l’effondrement moral des États-Unis, le cœur de son combat. Dans son best-seller […] il affirme que la gauche exerce une emprise complète sur l’enseignement supérieur […] Les universités s’emploieraient, selon lui, à diffuser des théories d’inspiration marxiste et à réduire l’histoire des États-Unis au suprémacisme blanc. L’hégémonie progressiste serait totale au sein de la société, une "unité" existant désormais entre "l’université, les médias, l’État, l’entreprise". »
Sur le plan pratique, de nombreux médias considèrent que Christopher Rufo a eu un rôle très important dans la démission de la présidente de Harvard Claudine Jay, tombée suite à de multiples accusations de plagiat et l’impossibilité des principaux donateurs et anciens élèves de Harvard à la soutenir. Claudine Jay était d’ailleurs la seconde dirigeante d’université à quitter son poste en un mois, après Lizz Magill, à la tête de l’université de Pennsylvanie jusqu'au 9 décembre 2023.
Il a également travaillé avec le gouverneur de Floride Ron DeSantis puis une vingtaine d’États américains pour la mise en place de législations anti-discrimination positive (« color blind »/aveugle à la couleur), notamment à l’université.
Christopher Rufo, qui considère dans son livre sur la révolution culturelle américaine que si la gauche radicale a pris le contrôle de plusieurs institutions américaines essentielles (médias, université, justice), cette situation n’est pas en soi une fatalité et il invite tous les conservateurs américains à un travail de reconquête lent mais obstiné.
Une personnalité américaine à suivre, donc. Christopher Rufo est-il l’intellectuel organique du mouvement conservateur américain ? L’avenir seul le dira.