Gaëtan de Capèle
L’Allemagne qui sera peut-être bientôt dirigée par une chancelière Verte, a une singulière conception de la défense de l’environnement. Voici dix ans, au lendemain de la catastrophe de Fukushima, elle avait enthousiasmé le monde de l’écologie en renonçant du jour au lendemain à l’énergie nucléaire. À la pointe du combat dans toutes les instances internationales, elle annoncera sans doute la semaine prochaine une accélération de son calendrier pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre. Nouveau tonnerre d’applaudissements garanti. Mais le parangon de vertu n’en a hélas que l’apparence : privée de nucléaire, l’Allemagne, qui consomme toujours autant d’électricité, fait tourner ses centrales à charbon ou à gaz à plein régime pour produire l’énergie que ses éoliennes et ses panneaux solaires sont incapables de lui fournir. Le résultat est sans surprise : loin de verdir la planète, elle noircit l’atmosphère. L’élève modèle de la transition énergétique européenne est en réalité un cancre.
Une fois n’est pas coutume, la France, qui ne prétend donner de leçons à personne, se mon- tre exemplaire. Grâce notamment à son puis- sant parc nucléaire, elle bénéficie d’une énergie très peu polluante - tous les scientifiques s’accordent là-dessus - et présente, dans tous les classements internationaux, l’une des empreintes carbone les plus vertueuses du monde. Ces faits objectifs établis, le bras de fer en cours à Bruxelles ne manque pas de saveur. L’Allemagne qui importe sans états-d’âme notre élecricité lorsqu’elle se trouve démunie, manœuvre pour exclure le nucléaire des financements verts européens… tout en plaidant au passage la cause du gaz, infiniment plus polluant. Comprenne qui pourra.
Dans cette affaire, la posture allemande doit beaucoup à des considérations de politique interne, peu à des préoccupations écologiques. Celle de la France a un grand mérite : conjuguer la lutte contre le réchauffement climatique avec la préservation d’une filière industrielle stratégique. Raison de plus pour ne rien céder.
Source : Le Figaro 8/05/2021