Kenneth M. Coleman cite Salvador de Madariaga qui décrivit la nature de la doctrine Monroe dans les termes suivants : « Je sais seulement deux choses à propos de la doctrine Monroe : l’une est qu’aucun Américain que j’ai rencontré ne sait ce que c’est ; l’autre est qu’aucun Américain que j’ai rencontré ne consentirait à ce que l’on tergiverse à son propos… J’en conclus que la doctrine Monroe n’est pas une doctrine mais un dogme… pas un seul dogme, mais, à bien y regarder, deux, à savoir : le dogme de l’infaillibilité du Président américain et le dogme de l’immaculée conception de la politique étrangère américaine » (11).
Les intérêts des États-Unis sont les intérêts de l’humanité toute entière
La croyance selon laquelle les Américains sont un peuple choisi par Dieu pour amorcer une expansion sans fin était inhérente tant à la doctrine de la Destinée Manifeste qu’à la doctrine Monroe. « L'expression qui exprimait ce sens de certitude morale de l’expansion géographique — la “Destinée Manifeste” — trahissait la certitude calviniste assurée que Dieu révélera au monde ceux qui assureront Sa grâce en les rendant prospères ». Si les États-Unis représentent la Terre Promise du Peuple Élu, alors « il est presque impossible de concevoir une situation dans laquelle les intérêts du genre humain ne sont pas hautement similaires à ceux des États-Unis. En faisant montre d’une telle présomption, l’opposition à la Destinée Manifeste (des États-Unis) n’était pas une simple opposition politique — elle ne représentait pas même une quelconque différence d’opinion —, elle se posait plutôt comme une hérésie contre le peuple élu par Dieu lui-même… Si les autorités des États-Unis — les autorités choisies par le peuple favorisé par Dieu lui-même — étaient en faveur d’une politique donnée, alors critiquer la justice ou la moralité de cette politique s’avérait moralement impossible » (12).
À cet égard on peut rappeler la conclusion de Werner Sombart pour qui « le calvinisme est la victoire du judaïsme sur la chrétienté » et « l’Amérique est la quintessence du judaïsme ». L’immoralité politique de la doctrine de la « Destinée Manifeste », l’expansionnisme géopolitique derrière la doctrine Monroe conquérante de territoires et l’impérialisme économique, tel qu’il se manifeste sous la forme de la politique des « portes ouvertes » (Open Doors Policy), deux options qui ont été par la suite combinées sous la dénomination de “wilsonisme” (Doctrine Wilson), sont en fait des traductions historiquement malignes de la vieille immoralité talmudique, repérable dans l’histoire.
C. Schmitt a fait ressortir que la transformation de la doctrine Monroe, à partir d’un Grand espace (Großraum) concret en un principe universel, autrement dit la « théologisation » d’un impérialisme américain spécifique et particulier en un Monde universel et à forte puissance capitalistique, servant prétendument les intérêts du genre humain, est aussi le commencement de la “théologisation” des objectifs de la politique étrangère américaine (13). Ce processus de “théologisation” débuta au cours de la présidence de Théodore Roosevelt, mais le Président Woodrow Wilson fut le premier à élever la doctrine Monroe au rang d’un principe mondial (Weltprinzip), à véritablement “mondialiser” une doctrine qui, auparavant, était censée se limiter au seul hémisphère occidental, panaméricain. Dans la moralité calviniste, talmudique et axée sur la Prédestination de Woodrow Wilson, l’idée-projet de règne mondial (Weltherrschaft) de l’Amérique devient la substance même de son plaidoyer pour une doctrine Monroe à appliquer au monde entier.
L’immoralité foncière de Wilson le “moraliste”
Un cas d'école est le slogan américain de la “Destinée Manifeste” servant à accroître l’aire d’application de la Doctrine Monroe par le biais du principe de l’autodétermination des peuples. C'est ce dernier dont usa le Président Wilson lors de la Conférence de paix de Paris (Versailles), pour étendre de fait — et subtilement — les sphères d’influence anglo-saxonne et pour créer un Cordon Sanitaire en Europe, composé d’États-tampons, autour de l’Allemagne et de la Russie Soviétique. Évidemment, le Président Wilson, dans son empressement à faire valoir en Europe le droit à l’autodétermination, n’a jamais dénoncé la doctrine Monroe qui incarnait, à son époque, dans l’hémisphère américain, la négation absolue de ce droit qu’il proclamait au bénéfice des petits peuples des anciens môles impériaux d’Europe centrale et orientale. En fait, ce qu’il entendait par droit à l’autodétermination était déjà clairement apparu en 1914, lorsque les États-Unis, corrompant le gouvernement élu du Mexique, bombardèrent la cité portuaire mexicaine de Vera Cruz, tuant ainsi des centaines de civils. Après le bombardement, qui conduisit finalement à la chute du gouvernement mexicain et à l’installation d’un pantin à la solde des États-Unis, le Président Wilson, soulignant avec emphase l'identité entre politique américaine et justice universelle, assura au monde que « les États-Unis se rendirent au Mexique [renverser le gouvernement] pour rendre service à l’humanité » (14) (sic !). Le Président Wilson croyait sincèrement au rôle assigné aux États-Unis par la Providence pour diriger le monde.
Aujourd’hui, si l’on regarde la situation de la Yougoslavie, on peut constater qu’une fois encore le principe pseudo-universel du droit à l’autodétermination a été utilisé comme un moyen idéologique pour renverser un statu quo existant, via un règlement frontalier en Europe, alors que les frontières européennes avaient été définitivement reconnues et acceptées comme telles par les Accords d’Helsinki. De même, ce fameux droit à l’autodétermination, inventé jadis par Wilson, a servi à légitimer les atrocités musulmanes lors de la guerre en Bosnie d’abord, puis celles, innommables, des bandes armées des Albanais du Kosovo, en fait un équivalent européen des “Contras” du Nicaragua, armés, entraînés et financés par les États-Unis. L’Europe est désormais traitée de la même manière que les anciennes républiques latino-américaines. [ndt : Pire, dans le cas de la Bosnie et du Kosovo, les dirigeants des principales puissances européennes ont applaudi et participé à ces horreurs, en posant, via les relais médiatiques, les assassins bosniaques et albanais comme des héros de la liberté ou des défenseurs des droits de l'homme]
Quand l’Allemagne hitlérienne reprenait à son compte les concepts forgés par Wilson
Ironie historique : l’Allemagne nazie emprunta, en son temps, de nombreux concepts idéologiques venus d’Amérique. Ainsi elle fonda en un premier temps ses requêtes pour réviser le statu quo du Traité de Versailles sur le principe d’égalité que le Traité de Versailles avait violé. Comprenant que le droit international en place n’était rien d’autre que l’universalisation de l’hégémonie anglo-saxonne ainsi que la “théologisation” d'un intérêt national particulier, les juristes allemands se sont donc mis à parler d’un nouveau droit international qui servirait l’intérêt national allemand, comme le droit en place servait les intérêts nationaux américains. Ils usèrent également du concept d’un « Nouvel Ordre mondial juste » destiné à justifier l’expansionnisme germanique et à préparer le renversement du statu quo international, qui s’était établi après la guerre de 14-18.
Délégitimer les intérêts nationaux des autres pays
Les principes de bases de la théologie politique américaine peuvent se résumer comme suit :
◊ a) L’intérêt national des États-Unis est universalisé jusqu'à devenir l’intérêt universel du genre humain ou de la communauté internationale. Par conséquent, l’expansionnisme impérialiste américain est alors considéré comme un avancement de la race humaine, une promotion de la démocratie, une lutte contre le totalitarisme, etc. Les intérêts américains, le droit international, et la moralité internationale deviennent équivalents. Ce qui sert les intérêts américains est posé, avec morgue, comme faisant progresser la morale et le droit — dans tous les cas de figure (15).
À suivre