Il y a sept ans, déjà, nous fêtions le tricentenaire de la mort de Vauban en 1707. Le gouvernement français décréta l’année 2007 « année Vauban » et décida de faire inscrire son œuvre au patrimoine mondial de l’UNESCO. Malheureusement, l’absence de mémoire nationale et surtout de culture historique n’a pas permis à nos compatriotes de prendre la mesure de l’œuvre de Sébastien Le Prestre, marquis de Vauban.
Depuis cette période, un certain nombre de publications voient le jour. Parmi elles, les Editions OUEST-FRANCE ont édité un ouvrage illustré de 120 pages rédigé par Bernard Crochet, intitulé Vauban et l’invention du pré carré français.
Cet ouvrage est idéal pour se familiariser avec la vie et l’œuvre de Vauban et ce même pour les adolescents. Très richement illustré, il propose une grande quantité de documents qui permettent de se rendre compte du génie de celui qui finira sa vie maréchal (en 1703), le premier ingénieur militaire à recevoir cette distinction.
Plonger dans la vie et surtout l’œuvre de Vauban, c’est plonger au cœur du règne de Louis XIV et du "Grand Siècle". Ce règne qui fut capital pour l’histoire de France. Vauban fait parti de ses grands personnages de l’époque avec Colbert, contrôleur général des finances et secrétaire d’Etat à la Marine, Louvois, ministre de la Guerre ou encore « le Grand Condé » qui mena la Fronde des princes contre Louis XIV puis fut lieutenant-général de l’Armée Royale après la grâce royale que lui accorda le Roi-Soleil.
Pourquoi Vauban est-il considéré comme un personnage majeur à son époque, comme à la nôtre ?
Bien considéré par le roi alors qu’il ne se prive pas de le contredire et qu'il participa à la Fronde, un de ses livres sera d’ailleurs interdit, Vauban est aussi l’inventeur du pré carré à une époque où les conceptions territoriales héritées des féodalités laissent peut à peu place à des conceptions territoriales nationales. Vauban va, d’une certaine façon « baliser » notre hexagone à l'aide d'un réseau de fortifications bastionnées. Nombreuses sont les régions qui comptent des forteresses et des citadelles conçues ou modernisées par Vauban. Dans le Nord-Pas-de-Calais et en Belgique, nous pouvons citer Lille, Ypres, Bergues, Valenciennes, Le Quesnoy, Maubeuge, Saint-Omer, Arras, Douai, Cambrai et bien d‘autres encore… Ces fortifications qui s'organisaient selon une double ligne devaient permettre à la France de constituer et de protéger une frontière face aux rivaux : les Espagnols, les Habsbourg ou les Hollandais. Vauban a eu le génie de conseiller à Louis XIV de profiter de ses victoires pour échanger des territoires et constituer un pré-carré fortifié et protégé plutôt que de conquérir des territoires difficiles à maîtriser et qui fragiliseraient l’ensemble du royaume. Pour lui, mieux vaut un territoire modeste bien maîtrisé qu’un grand territoire mal maîtrisé dont les Espagnols sont un parfait exemple. Dans une lettre à Louvois du 23 janvier 1673, il défend "l’idée de bien fermer le royaume en respectant les frontières naturelles par un nombre limité de places fortes, bien fortifiées et bien pourvues, reliées entre elles". Vauban est un ingénieur doué d’un très grand raisonnement géographique, rare à son époque. En effet il façonne ses forteresses et choisi leur emplacement en tenant compte de la géographie physique : cours d’eau, relief, marais, distances, … C’est à cette période que commence à véritablement naître l’idée de « frontières naturelles ». Il va aussi considérablement rationaliser le système de défense du royaume de France en démantelant des forteresses mal placées et trop gourmandes en hommes pour fortifier des places bien plus stratégiques et qui garantissent l’efficacité du système de défense. Cette politique va également porter ses fruits le long des 3000 km de côtes du royaume de France où Vauban va implanter et moderniser des forteresses pour protéger notre littoral et empêcher les grandes flottes de l’époque (espagnole, anglaise ou hollandaise) d’accoster trop facilement.
Mais Vauban est aussi un stratège et participe aux nombreuses campagnes militaires victorieuses de la période comme par exemple la guerre de Dévolution (1672-1673), la guerre de Hollande (1672-1679) ou encore la guerre de la Ligue d’Augsburg où il jouera une grande partie contre son grand rival Hollandais, l’ingénieur militaire Menno Van Coehorn. Vauban s’empare de Namur en 1692 mais Van Coehorn aura sa revanche trois ans plus tard en reprenant la ville. Les grandes réussites militaires de Vauban feront naître un célèbre dicton : « Ville assiégée par Vauban, ville prise. Ville défendue par Vauban, ville imprenable ». Vauban définit des stratégies pour progresser vers les murailles par des systèmes de sape et de minages calculés. Dès 1672, il remet à Louvois son Mémoire pour servir d’instruction dans la conduite des sièges, il a alors 39 ans. Il base une grande partie de ses raisonnements sur son expérience. Vauban n’est pas un stratège de cabinet mais un homme de terrain qui mène des sièges et surveille personnellement l’édification de ses bastions. Il fait en sorte d’adapter la stratégie à l’usage de plus en plus important de l’artillerie et aura le soin de préserver au maximum la vie des soldats. Ainsi le royaume de France remportera de nombreuses victoires avec un minimum de pertes… on est encore loin des boucheries napoléoniennes. Vauban sera d’ailleurs surement l’un de ceux qui modèrera l’ardeur prométhéenne de son roi, au grand étonnement de nombreux rois et empereurs qui voyaient en Louis XIV un souverain arrogant et prétentieux et qui seront souvent surpris par sa modération lors de la négociation des traités.
Si le sujet vous intéresse, que vous voulez découvrir Vauban, approfondir cette recension, visualiser les nombreuses illustrations de l’ouvrage ou en savoir plus sur l’avant et l’après Vauban, notamment sur la pérennité de son œuvre au XVIIIe siècle et durant les guerres napoléoniennes, je vous conseille cet ouvrage.
Jean
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