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L’indépendance du chef de l’Etat à l’égard des partis politiques

Extrait de l'analyse d'Hilaire de Crémiers dans le dernier Politique Magazine :

Une131"À l’origine, la Ve République était fondée sur l’indépendance du chef de l’Etat à l’égard des partis politiques. Seule la réaffirmation de cette indépendance pourra permettre sans risque l’expression populaire par les voies démocratiques. 

Sans rien connaître à la médecine, chacun sait que l’homme de l’art qui se trouve devant un grand blessé a le choix entre deux options : les cautères, pommades et onguents qui calmeront un peu sa douleur et lui permettront de mourir plus doucement ; ou l’opération lourde, incertaine, risquée, mais qui peut lui sauver la vie.

Il en va de même dans l’ordre politique. En ce qui concerne la France, on pourrait certes énumérer les nombreuses réformes « faisables », susceptibles d’améliorer le système à la marge – et de lui procurer l’apparence d’une rémission : l’amélioration de la composition du Conseil constitutionnel, la suppression du cumul des mandats, l’introduction de la proportionnelle ou l’abolition de l’article 89-3 qui permet au Congrès de réviser la constitution à tout bout de champ. Autant de réformes techniquement réalisables, sans doute bienvenues – mais strictement capillaires. Dérisoires, au regard de la crise du politique et des menaces qui pèsent sur l’existence même de la France.

Depuis les débuts de son histoire, celle-ci est à la fois un État et une société, qui ne se confondent pas mais marchent côte à côte, l’état ayant contribué à façonner la société, à la faire vivre et durer, cette dernière, de son côté, ayant toujours participé, selon des modalités variables, au fonctionnement de l’État – au point que son consentement constitue l’un des critères de sa légitimité. Or, tout cela part à vau-l’eau. [...]

C’est devant la gravité de ces blessures que l’on peut songer à une opération chirurgicale. Celle-ci, à vrai dire, ne consisterait pas à farfouiller au hasard dans les entrailles du patient, mais à reprendre en l’accentuant la solution proposée lors de la création de la Ve république – qui se résumait en deux points : démocratisation et monarchisation. Les républiques et le roi, en somme.

La monarchisation initiée en 1958 consistait à placer au sommet de l’État « un chef qui en soit un », intervenant lors des moments majeurs de la vie de la cité, et apte à décider quand l’essentiel est en jeu. Ce monarque, dont le rôle est celui d’un arbitre et d’un garant, a pu jouer son rôle tant qu’il a bénéficié d’un mandat suffisamment long, qui lui permettait de mener une politique à long terme et de se maintenir au-dessus des partis ; depuis les années 2000, le raccourcissement du mandat, l’évolution partitocratique du régime et la volonté de restaurer le Parlement ont fini par remettre en cause cette innovation salutaire. Et c’est ainsi qu’on est passé du roi fainéant, Chirac II, à l’hyperprésident Sarkozy puis à l’improbable « président normal », Hollande, tous également pressés par le temps, embourbés dans le jeu des partis et incapables de se concevoir comme le chef de tous les Français. Le personnage s’est ainsi rétréci en même temps que son mandat, au point de ne plus représenter grand-chose. D’où l’intérêt de songer à une remonarchisation, et pourquoi pas, à cette restauration monarchique à laquelle De Gaulle avouait avoir souvent pensé. [...]"

Michel Janva

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