En un mois, les agressions sexuelles de Cologne ont plus fait “bouger les lignes” que n’importe quel discours de bon sens sur l’incapacité de l’Europe à réellement supporter un afflux massif d’immigrants. Un symbole a chassé l’autre, et le corps précis d’Aylan Kurdi a été balayé par mille ombres allemandes, qui ont fait de Cologne le visage brumeux et nocturne du danger migratoire. Cologne a tout d’abord permis de dresser, à charge et à décharge, le véritable portrait de l’immigration. Ensuite, Cologne a permis de mettre à jour les contradictions des humanistes, écartelés entre deux causes. Enfin, les nations européennes, et l’Union elle-même, ont révélé leur incapacité à traiter de façon cohérente et unanime le problème. Trois leçons majeures.
1) Révélations
Les agressions sexuelles de Cologne ont eu un effet de dévoilement extraordinaire à plusieurs niveaux, en faisant voler en éclats le mythe d’un “immigré bon sauvage”, fuyant un mal dont il n’était que l’innocente victime, apportant à l’Occident le trésor de son cœur et de sa science, en pointant du doigt l’étrange traitement médiatique et politique du phénomène. Quel est le portrait du vrai migrant ? Les immigrés présents en Allemagne sont majoritairement des hommes, musulmans, seuls ou isolés, qui ont laissé leur famille derrière eux (ils n’ont pas droit au regroupement familial tant que nombre de formalités ne sont pas remplies), venus surtout pour des raisons économiques (le site Atlantico déclare que « selon l’agence Frontex, 60 % des migrants arrivés en Europe en décembre 2015 sont des migrants économiques et non des réfugiés politiques ») – et donc venus de pays qui n’ont rien à voir avec des zones de guerre. Pour dédouaner les Syriens des agressions, l’Allemagne a ainsi révélé que nombre d’immigrés interrogés ou arrêtés étaient en fait algériens ou marocains, ce qui au passage écorne le mythe d’une intégration réussie. Car que se passe-t-il à Düsseldorf, juste à côté de Cologne ? Le quartier dit du “Maghreb” recèle des bandes criminelles, qui sévissent aussi à Dortmund et Essen, et dont les membres viennent du Maroc et de l’Algérie. Un quartier où la présence des Maghrébins date des années soixante-dix… Un quartier criminogène : « à Düsseldorf, 40 % des jeunes Marocains et Algériens deviennent criminels au cours des douze premiers mois de leur séjour en Allemagne, contre 0,5 % pour les Syriens » (Libération, citant l’étude “Casablanca” de la police de Düsseldorf, menée en 2014).
Bref, un immigrant n’est pas d’emblée un citoyen comme un autre par le seul fait qu’il réside en un endroit : il apporte avec lui toute (la richesse de) sa culture, qui n’est pas celle de son lieu de résidence – sauf à habiter dans des ghettos (et encore). On s’en doutait, mais pourquoi diable cet argument est-il aujourd’hui brandi pour absoudre les immigrés ? Il y a désormais, officiellement, une sociologie différente de l’immigré allemand. Il n’est plus cette statuette vertueuse et désirable, il a repris un poids de réalité conséquent. Le voilà mal intégré, désireux de faire venir sa famille, qui l’a envoyé en mission pour ce faire dans une perspective d’immigration économique sociale. Le voilà ghettoïsé, volontairement ou non. Le voilà clandestin et malfaiteur, volontairement ou non. Le voilà inadapté. Les journaux le découvrent, le révèlent, le considèrent avec étonnement, et même un peu d’indignation. Les politiques sont surpris, et déclarent, dans les villes, les régions et les pays, qu’il lui faut bien se comporter ou qu’il devra repartir (car l’immigré se retrouve nanti d’un pays d’origine, bien identifié, facilement repérable). Le voilà individualisé, en somme : là où Aylan avait réussi à indifférencier tous les immigrants, les viols de Cologne ont réussi à leur rendre leur individualité, à fragmenter les représentations. Désormais, il y a les intégrés et les autres, les coupables et les innocents, les hommes et les femmes, les légaux et les clandestins, les désirables et ceux dont on ne veut plus. Le temps de l’illusion économique et morale est fini. [....]
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