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Bientôt la fin de l'argent pas cher ?

6a00d8341c715453ef0240a4c09fdd200d-320wi.jpgLa passation de pouvoir, de Mario Draghi à Christine Lagarde, ce 28 octobre à Francfort s'est déroulée dans la plus parfaite courtoisie. Plus de 400 personnes saluaient le départ de celui qui avait tenu la barre alors même que l’Eurozone aurait dû exploser, sous la pression de la crise des dettes souveraines. Et en particulier ce sont deux dirigeants politiques, Mme Merkel et son homologue parisien, qui soulignaient son rôle de sauveteur d'une monnaie élaborée dans un contexte non moins politique, celui des négociations de Maastricht de 1991, et conservée en référence pour des raisons, elles aussi politiques : la volonté des États de maintenir le cap sur le projet d'Union européenne selon les procédures définies à l'époque de Kohl, Mitterrand et Delors.

Lorsque la nouvelle dirigeante entrera en fonction, à la tête de la banque centrale européenne, le 1er novembre un nouveau temps s'ouvrira, incluant un regard peut-être plus économique et, éventuellement moins laudateur, sur le bilan, à ce jour, de la Banque centrale européenne.

Mme Lagarde a jusqu'ici laissé entendre qu'elle continuerait la politique d'argent pas cher, d'argent quasi subventionné par la banque centrale, de son prédécesseur. Elle n'a pas cependant indiqué combien de temps durerait cette continuité…

On va peut-être ouvrir les yeux, en effet, sur l'augmentation, à hauteur de quelque 2 600 milliards d'euros de ce qui pourrait porter le nom de fausse monnaie, par rachat des dettes souveraines, et par de prêts systématiques à des taux désormais négatifs à des technocraties bancaires incapables de distribuer des crédits à des activités productives, rémunérant raisonnablement les prêteurs.

Peut-être fallait-il faire, durant les 10 dernières années ce qu'a fait Draghi pendant le temps de son mandat, de 2011 à 2019, afin de sauver la monnaie unique. On désirait, en effet, à tout prix appliquer à l'élaboration des institutions européennes la recette de Helmut Kohl. Elle avait fort bien réussi à l'unification allemande lors de l'effondrement du bloc soviétique. L'échange, à une parité absolument factice, du mark de l'est contre le mark de l'ouest avait permis d'absorber les Länder, gouvernés jusque-là par les communistes, dans la république fédérale : le même procédé, basé sur un demi-siècle de réussite monétaire ouest-allemande allait permettre, croyait-on, de créer à marche forcée une Europe fédérale.

N'oublions pas cependant que, pendant quelque 15 ans, la situation de l'emploi dans les Länder de l'est a été désastreuse, et qu'il a fallu les mesures courageuses du gouvernement Schröder et notamment les lois Hartz de 2003-2005, pour en sortir.

À l'échelon européen, nous vivons, depuis bientôt 30 ans, les conséquences de ce choix de nos gouvernants successifs et le Brexit n'en constitue, à certains égards, qu'une péripétie.

À noter d'abord, fondamentalement, que l'idée de procéder en commençant par la monnaie a relégué au second rang de mesquines considérations régaliennes telles que : la défense commune, l'identité culturelle, la sauvegarde des frontières extérieures, etc.

À noter également que, lorsqu'en 2015, la chancelière Merkel a cru bon de prononcer son fameux "wir schaffen das", aux conséquences calamiteuses, peut-être pensait-elle que, pour la question migratoire, son excellent deutsche mark devenu euro suffirait à résoudre tous les problèmes. Elle se trompait. Comme elle s'est trompée dans ses choix énergétiques catastrophiques.

Merkel a fait son temps comme Draghi a fait son temps.

Sur le plan économique, les conséquences des taux d'intérêt artificiellement bas commencent à apparaître dans toute l'Europe.

La veille de la gentille petite cérémonie de Francfort, on votait en Thuringe et en Ombrie. Dans le vieux Land, toujours dirigé par les ex-communistes de die Linke, est arrivé en tête, avec 24 % des voix, Alternativ für Deutschland. Ce parti n'est pas né à "l'extrême droite" contrairement à ce qu'on entend répéter sur tous les médias désinformateurs : il est apparu, en fait, en rupture avec la politique monétaire de Draghi, puis, subsidiairement avec les lubies migratoires de Merkel. Dans la patrie de saint François d'Assise, on a assisté au triomphe de cette Lega que l'on disait morte, à la suite de l'erreur d'aiguillage récente de son principal dirigeant.

L'histoire sonne à la porte. Elle tambourine. Elle ne s'endormira pas.

JG Malliarakis

https://www.insolent.fr/

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