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Pour une fois que l’Institut Montaigne partage notre opinion sur l’abandon des territoires au profit des métropoles…

Ne boudons pas notre plaisir !

Deux approches différentes mais qui, toutes deux, portent sur les inégalités de développement des territoires, une question majeure dont la crise des « Gilets jaunes » a montré toute l’acuité. D’une part, le rapport de l’Institut Montaigne, cercle de pensée d’inspiration libérale, rendu public jeudi 11 mars, qui pourfend la concentration des richesses dans les métropoles. De l’autre, l’ouvrage de Laurent Davezies, expert des mécanismes du développement territorial, L’Etat a toujours soutenu ses territoires (112 pages, 11,80 euros), publié début mars au Seuil dans la collection « La République des idées ». A priori, leur analyse part d’un constat commun : celui d’une concentration économique et démographique en région parisienne et dans les métropoles. Mais pourtant les conclusions divergent.

L’Institut Montaigne évoque dans son rapport « un pays déséquilibré »« Notre conviction est que la France, sur le plan collectif, ne gagne pas à cet effet de concentration », explique-t-il. Il propose des pistes pour amorcer le développement économique dans ce qu’il appelle les territoires « épars ». Notre propre point de vue étant que ce phénomène de métropolisation fait de la France le pays « le plus polarisé » des trente-sept pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) : « Alors que les aires métropolitaines représentent, en moyenne et sur une longue période, 51 % de la croissance du produit intérieur brut par habitant, les quinze plus grandes métropoles françaises représentent 81 % de la croissance hexagonale », souligne le rapport.

« Dès lors, les conséquences immédiates de la profonde récession de 2020 pourraient être plus graves pour les territoires épars que pour les métropoles », ajoute-t-il, envisageant « une reprise en K », qui favorise les secteurs les plus numérisés, souvent concentrés dans les métropoles, tandis que les autres continueraient de subir un recul. Aussi prône-t-il une différenciation des politiques publiques en faveur de ces « territoires épars ». « L’effacement de la politique volontariste d’aménagement des territoires pendant près de trente ans a conduit à une forme de renoncement face aux déséquilibres territoriaux », estime l’institut.

Même si, en soutien habituel du gouvernement d’Emmanuel Macron, il prétend à une « évolution », depuis 2017, du positionnement de l’Etat, qui entend désormais agir en « facilitateur » des initiatives locales, matérialisée par la création de l’Agence nationale de la cohésion des territoires, il juge celle-ci insuffisante et déplore « une importante faiblesse stratégique en faveur de la résorption des inégalités territoriales ». Ainsi, bien qu’aient été mis en œuvre ces dernières années des dispositifs spécifiques en faveur des territoires – Maisons France Service, Action Cœur de ville, Territoires d’industrie, France très haut débit, Agenda rural –, auxquels s’ajoute la territorialisation du plan de relance, il déplore l’absence de vision stratégique et d’évaluation de leur impact.

L’étude de l’Institut Montaigne souffre cependant d’une approche exagérément basée sur une opposition systématique entre des métropoles fortes et dynamiques et des « territoires épars » voués au déclin. La réalité est beaucoup plus différenciée, ainsi que nous l’avons souligné dans l’un de nos articles récents consacré aux territoires ruraux (https://conseildansesperanceduroi.wordpress.com/2021/03/13/de-la-crise-economique-a-la-crise-sanitaire-lexode-rural-na-plus-la-cote/). Les poches de pauvreté existent aussi, et même plus, dans les métropoles. Le dynamisme se rencontre aussi, et même souvent, dans les villes moyennes et leur environnement.

Voilà par ailleurs un petit livre qui balaie quelques idées reçues. Les « fractures territoriales », l’« explosion des inégalités », la sécession des métropoles et l’abandon des territoires périphériques ont donné lieu à une abondante littérature et servi de toile de fond au mouvement des « Gilets jaunes ». Dans L’Etat a toujours soutenu ses territoires, Laurent Davezies s’acharne à déconstruire une approche qu’il juge stéréotypée.

Certes, comme dans la plupart des pays industriels, on observe depuis plusieurs décennies un mécanisme de concentration de la production de la richesse dans les territoires métropolitains. Celle-ci se traduit par un accroissement continu des disparités interrégionales en termes de produit intérieur brut (PIB) par habitant. Mais, dans le même temps, les disparités de développement territorial, elles, ont reculé. « Les inégalités interrégionales de revenu disponible brut (RDB) par habitant n’ont cessé de se réduire depuis les années 1980 (et même depuis les années 1960) », note M. Davezies.

Même si « L’Etat est et reste le principal aménageur des territoires les plus vulnérables », le phénomène de concentration des activités dans les métropoles est incontestable. « La croissance va désormais à la richesse », note le professeur Davezies. L’Ile-de-France, avec un poids inchangé par rapport à la population nationale, a vu sa part du PIB national passer de 27 % en 1980 à 31 % en 2015. Globalement, les aires urbaines des vingt et une métropoles ont vu leurs emplois salariés privés progresser de 8 % entre 2007 et 2018, contre 3 % en moyenne nationale. Mais cette progression est très inégale : sept d’entre elles enregistrent même un recul, quand Toulouse ou Nantes effectuent un bond, respectivement, de 22 % et 20 %.

Il est aussi un phénomène à prendre en considération. Avant le coup d’arrêt brutal lié à la crise due au Covid-19, la France avait commencé à reconquérir des emplois industriels. D’après les données de l’Insee, entre 2010 et 2016, 145 000 emplois industriels ont été détruits. Jusqu’à ce que l’institut enregistre pour la première fois depuis bien longtemps une création nette de 17 000 emplois entre le troisième trimestre 2016 et le quatrième trimestre 2019. C’est bien peu, certes, mais ça va dans le bon sens.

Un rebond fragile mais néanmoins significatif. Car, pendant ces trois années, ce sont pas moins de 52 départements métropolitains qui ont vu le nombre de leurs emplois industriels augmenter, pour une création nette totale de 57 000 emplois. Il n’y a donc pas de fatalité. A la veille de la crise sanitaire s’amorçait un début de renouveau de l’industrie française. Hélas, la nouvelle industrie émergente est essentiellement urbaine et péri-métropolitaine.

En conclusion, Laurent Davezies met en avant le paradoxe entre la concentration géographique de la valeur ajoutée et la réduction continue des inégalités interterritoriales de revenus par habitant. L’Etat, contrairement à ce que l’on croit souvent de son abandon des territoires fragilisés, est au contraire leur principal protecteur. Mais le problème, dans notre pays, réside dans un manque de moyens financiers endémique résultant lui-même du gaspillage des deniers publics dans des entreprises aussi ruineuses que mortifères. Les politiques de soutien à l’immigration, d’accueil généreux des migrants abusivement qualifiés de « réfugiés » ou de subvention des territoires perdus par la République en sont l’une des causes principales. Mettre fin à la gabegie de la prétendue « politique de la ville » et nettoyer les écuries d’Augias que sont devenues les banlieues des métropoles permettrait sans aucun doute de réduire significativement ces inégalités territoriales.

Seule la volonté politique manque pour y parvenir car, pour ce qui est des méthodes, nous avons les réponses…

https://conseildansesperanceduroi.wordpress.com/2021/03/17/pour-une-fois-que-linstitut-montaigne-partage-notre-opinion-sur-labandon-des-territoires-au-profit-des-metropoles/

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