L’année 2012 s’achève sur au moins une certitude : le pouvoir socialiste n’est pas à la hauteur des défis que les Français ont à relever. Car il n’est pas trop tôt, après sept mois de présence aux affaires, pour juger de l’incompétence d’un président de la république et d’un premier ministre qui gouvernent à vue, comme en plein brouillard.
Certes, l’horizon est loin d’être dégagé, mais suffit-il, pour le percer, de pratiquer la pétition de principe ? Déclarer à plusieurs reprises, comme François Hollande ces dernières semaines, que la crise de l’euro est derrière nous serait du plus haut comique si l’avenir de la France n’était en jeu. Quel que soit le crédit qu’on accorde aux sondages, l’impopularité croissante de l’exécutif auprès des Français est un signe qui ne trompe pas — comme il n’a pas trompé sur l’état d’esprit de nos compatriotes à l’encontre de la précédente majorité et de son chef, qui ne doivent d’avoir échappé à une véritable raclée, au printemps dernier, qu’en raison de l’incapacité de l’opposition d’alors à créer une vraie dynamique.
Car les trois récentes victoires électorales de l’UMP doivent d’autant moins faire illusion que le taux de participation y a été faible, comme c’est souvent le cas des législatives partielles, preuve que la droite du pays légal n’a su déplacer qu’un électorat captif. La majorité a évidemment été sanctionnée pour son incapacité à faire bouger les choses, mais la droite, qui a laissé éclater au grand jour le spectacle indécent de ses luttes d’égos, indifférentes au Bien public, n’avait rien de neuf à proposer. Certes, les motions plus ou moins « décomplexées » ont remporté, aux élections internes de l’UMP, la majorité des suffrages des militants, mais ce syndicat d’intérêts, dont l’éclatement eût été une chance pour déverrouiller le paysage politique français, n’entend pas plus que la gauche faire son aggiornamento. Les fondamentaux, comme on dit aujourd’hui, du PS et de l’UMP demeurent les mêmes et se résument à noyer la France dans la mondialisation qui voue à plus ou moins brève échéance notre peuple à la disparition — les « progrès de la construction » européenne étant l’aspect institutionnel de cette disparition programmée. La gauche du parti socialiste peut réclamer du pouvoir qu’il se réconcilie avec le peuple ; la droite peut le critiquer de ne pas assurer les conditions du relèvement de la France : il s’agit-là de paroles verbales puisque ni les uns ni les autres ne veulent agir sur la cause principale de nos difficultés, l’enfermement dans le carcan européen qui, sur tous les plans, monétaire, financier, économique et juridique, entrave à la racine toute tentative de sortir de l’impasse. Sans compter le poids idéologique d’une Europe qui se conçoit comme la matrice de la démocratie universelle et impose de ce fait, dans l’intérêt bien compris d’un capitalisme apatride qui se nourrit de la libre circulation des biens et ...des personnes, mis sur le même plan, une ouverture de nos frontières qui sape la cohésion de nos sociétés en provoquant ce que Renaud Camus appelle le « grand remplacement ». Avant d’être un fait économique, l’immigration est une arme sociale et culturelle entre les mains de la subversion mondialiste.
Comme si ce facteur venu de l’extérieur n’était pas suffisant pour mettre en péril la cohésion nationale, le pouvoir a décidé de s’attaquer, de l’intérieur, à la famille, dernière cellule à résister par nature au nomadisme généralisé. Déjà fragilisée par l’individualisme ambiant que favorisent des lois de moins en moins protectrices, la famille est désormais pensée au pluriel — il y en aurait de différentes sortes auxquelles il conviendrait de donner les mêmes droits. Certes, la droite, sentant souffler dans le pays le vent du refus, a décidé de s’opposer en ordre dispersé et avec plus ou moins d’enthousiasme — elle laissera, contrairement au PS, la liberté de vote aux députés — au projet du gouvernement en matière de dénaturation du mariage et de la filiation, mais si elle est sincère, que n’a-t-elle, lorsqu’elle était au pouvoir, rappelé dans la constitution la loi naturelle en matière de mariage, rendant ainsi plus difficile la concrétisation des menaces qui se profilaient à l’horizon depuis de nombreuses années déjà ?
Il est vrai que le pouvoir cherche à s’assurer sur le plan sociétal les victoires qu’il est incapable de remporter sur les plans économique et social. Mais outre que ce calcul peut se révéler pour lui à double tranchant — il n’avait pas prévu une telle résistance du pays réel —, s’arrêter, comme paraissent le faire certains, à cette seule approche conjoncturelle, c’est commettre l’erreur gravissime de passer à côté du caractère intrinsèquement mauvais de ce projet pour la société et pour la nation, car il est la traduction achevée de l’idéologie constructiviste de la gauche, en germe évidemment depuis les Lumières, mais qui aujourd’hui ne rencontre plus aucune autre digue que ce qu’il reste de réflexes sains dans le pays réel. Ces réflexes, la gauche les avait sous-estimés, comme elle avait sous-estimé la réaction de l’Eglise qui, il est vrai, depuis une génération, avait donné l’impression de faire profil bas devant toute les « avancées » d’une modernité à laquelle elle semblait s’être rendue.
C’est donc faire une analyse superficielle de voir dans ce projet une simple diversion du gouvernement. Même si le chômage était éradiqué et les perspectives de croissance au beau fixe, la gauche imposerait cette loi car elle correspond à sa conception foncière d’un homme délivré de la nature, libre de « se construire » comme il l’entend, protéiforme sur le plan existentiel puisque dépourvu de tout essence. Le secret d’une telle conception nihiliste de l’homme — qui peut tout essayer puisqu’il n’est rien à proprement parlé — est évidemment l’instinct de mort, comme le révèlent les autres mesures déjà adoptées — le remboursement intégral de l’avortement — ou projetées — la libéralisation totale de la recherche sur l’embryon ou le suicide assisté. La cohérence de cette politique est totale et Vincent Peillon et Najat Bel Kacem jouent la partition qui leur revient dans leur volonté de changer radicalement les mentalités, en imposant notamment la théorie du genre dès le plus jeune âge. S’attaquer aux enfants a toujours été le premier souci des idéologies totalitaires : loin de vouloir le retour de la morale laïque de grand-papa, dont la consistance devait tout aux principes chrétiens qu’elle avait intégrés, la gauche, qui pense avoir obtenu l’effondrement de la morale chrétienne avec celui de la loi naturelle, croit le temps venu de franchir une nouvelle étape.
Tous ceux qui refusent de s’engager avec détermination dans la lutte contre la dénaturation du mariage et de la filiation non seulement font une analyse superficielle de ce qui se joue avec ce projet, mais, plus encore, révèlent, sur le plan politique, une pusillanimité incompatible avec la radicalité des enjeux, qui augure mal de l’avenir. Laisser la société se décomposer sans, au moins, aller manifester pleinement son opposition est une faute que les Français seront en droit de reprocher à tous ceux qui la commettent. Quelle confiance leur accorder désormais ? Que lâcheront-ils demain sur l’immigration, la souveraineté ou la sécurité ? L’avenir du pays se joue, certes, en points de croissance et en taux d’emploi, mais aussi, plus fondamentalement encore, sur le plan de l’humain. Comme aimait à le rappeler Maurras, à l’origine de toute société, fondant la politique naturelle, il y a un fait d’amour. Lequel, du petit homme, irrigue jusqu’à la nation.
Joyeux Noël à tous !
François Marcilhac - L’AF 2853