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Hollande ou la musique sans les instruments

 

140102Pourquoi éprouvons-nous le sentiment que notre nullissime président s'illusionne sur les moyens dont il dispose en Afrique ? Pourquoi pressentons-nous quelque catastrophe à venir dans ses contacts mirifiques dans la péninsule arabique ? Faut-il incriminer le pessimisme de nos natures ? Faudra-t-il bientôt nous jeter en prison pour islamophobie ?

Nous ne devons pas perdre de vue en effet que toute l'esbroufe, qu'il agite à l'extérieur, reste essentiellement destinée à camoufler ses échecs intérieurs. Mais, puisqu'à son petit niveau le p. de la r. se trouve engagé dans un processus de chef de guerre et de grand diplomate, ne résistons pas à la tentation de lui administrer quelques leçons d'histoire à l'usage de son petit ersatz d'impérialisme.

On devrait donc se souvenir d'abord que le triomphalisme ne suffit jamais à établir sa durabilité. Au contraire : à propos des colonies, le pouvoir républicain n'a jamais autant parlé d'Empire, en France, qu'en 1938.

Les lecteurs de Thucydide ne peuvent oublier non plus que le plus fameux discours de Périclès sur la gloire d'Athènes se situe à la fin de la première année de sa funeste guerre contre Sparte, qui allait provoquer la chute de son hégémonie sur les cités grecques.

Ne diabolisons inutilement ici ni le mot, ni le concept d'empire : la chose revient régulièrement, sous des formes ou sous des masques différents, au gré des aléas historiques.

J'avoue même ici mon admiration, peut-être même une inguérissable nostalgie, pour le plus durable de tous : l'empire romain d'Orient. Il avait été frappé à mort par la trahison de la IVe croisade en 1204, après 900 ans de rayonnement. Paradoxalement ce furent les pillages opérés lors de cette opération honteuse qui répandirent sa semence civilisatrice dans toute l'Europe. Mais son agonie ne se termina que deux siècles et demi plus tard, en 1453. Le dernier empereur mourut ainsi, héroïquement, presque seul, défendant ses remparts les armes à la main, abandonné d'une insouciante chrétienté. Trois siècles plus tard cet empire que nous appelons byzantin sera calomnié, par les légendes de ce que nous appelons les "Lumières". (1)⇓

À côté de ce drame, ceux que nous avons vécus, celui de l'ancien empire français, créé par la Troisième république, et liquidé par la Cinquième, même s'ils ont laissé dans les cœurs et dans les vies d'une partie de nos générations des traces inaltérables, peuvent donc paraître plus passagers au regard de la Grande Histoire.

Contentons-nous de suggérer, aux princes qui nous gouvernent aujourd'hui, un regard sur le seul "impérialisme" qui semble les préoccuper. Ils en gardent la rancœur depuis l'époque de leurs jeunesses où ils flirtaient avec le gauchisme et/ou avec le stalinisme : ils haïssent par conséquent l'influence des États-Unis.

L’essor de celle-ci n'est devenu perceptible en Europe qu'au gré de ses interventions sollicitées dans les deux guerres civiles européennes. Pour nous, cela débute par notre faute d'Européens, par cette tragédie de 1914, dont nous nous apprêtons à commémorer le centenaire.

Mais, avant de devenir visible sur le Vieux Continent, la puissance nord-américaine avait commencé à se développer dans le Nouveau Monde. Jusqu'au début du XIXe siècle, la force et la richesse semblaient plutôt le partage de l'Amérique espagnole : et il faut attendre 1848 pour que le Texas, le Nouveau-Mexique et la Californie changent de souveraineté.

Un siècle après le traité de Guadalupe, était signé à Rio-Janeiro le 2 septembre 1947 un Traité interaméricain d'assistance réciproque. Quelques rares pays ont fait défection Cuba, certes, et plus récemment la Bolivie, le Nicaragua, l’Équateur et du Venezuela. Globalement, plus de 60 ans plus tard, le système perdure.

Au départ, l'idée faisait bondir les staliniens. En France, un article signé Pierre Courtade allait immédiatement la stigmatiser : "Truman à Rio, écrira-t-il dès le lendemain dans l'organe central du parti communiste français, définit la "doctrine" de l'impérialisme américain. (2)⇓

L'article entier mériterait d'être cité. Il ironise sur Kennan définissant celui-ci comme "l'inventeur d'un système pour venir à bout du "communisme", qu'il a exposé dans une revue américaine au mois de juillet dernier et qui peut être considéré comme la doctrine officielle du Département d'État en ce qui concerne le plan Truman."

Cette doctrine et ce plan se sont révélés victorieux au terme de la guerre froide, gagnée par l'occident sous Reagan.

Comment son prédécesseur s'exprimait alors ? La mémoire n'a en général enregistré que le discours initial prononcé à Waco en mars 1947.

Mais celui qu'il tint dans la métropole brésilienne en septembre précisait mieux encore ce qu'on appela sa "doctrine":

"Nous sommes décidés à rester forts, déclarait-il. Notre puissance militaire sera maintenue pour témoigner du sérieux avec lequel nous envisageons nos obligations. (...) Le vieux monde est épuisé, sa civilisation en péril. Nous ne pouvons pas compter sur ceux qui sont plus faibles que nous pour bâtir une paix qui nous profite. Il leur faut l'appui des forts."

Il existe donc une très grande différence entre Truman et Hollande. Elle peut se résumer et se mesurer notamment à la comparaison des budgets militaires respectifs. Jusqu'à Obama les dirigeants américains ont toujours su maintenir le leur, contre vents et marées. Depuis 1962, tous les dirigeants de la Cinquième république, au contraire, ont constamment, d'année en année, fait baisser leur effort de défense.

Ceci nous amène donc, pour parler plus crûment encore, à citer Bismarck : "la diplomatie sans les armes, c'est la musique sans les instruments."

JG Malliarakis http://www.insolent.fr/2014/01/hollande-ou-la-musique-sans-les-instruments.html

Apostilles

1) aux absurdités voltairiennes et aux complilations antichrétiennes de Gibbon, on doit évidemment préférer la réhabilitation de "l'Empire byzantin" par Charles Diehl.
2) cf L'Humanité du 3 septembre 1947.

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