Il n'est qu'à parcourir la toile pour savoir que si le parti socialiste va très mal, l'Ump n'est pas non plus à la fête. C'est là le signe d'un grand changement, ce à un point tel que l'on pourrait utiliser le terme de « révolution ». En effet, naguère, il suffisait que la gauche aille mal pour que la droite monte en flèche et réciproquement. Jamais président de la république – François Hollande – n'était tombé aussi bas. Et puisqu'une catastrophe bien souvent n'arrive pas seule (« les emmerdes, ça vole en escadrille »), il n'y a pas eu d'effet Valls. Même si le nouveau premier ministre a pour lui, jeunesse, physique agréable et position politique recentré, il ne séduit pas, attaqué qu'il est – c'est le grand drame des centristes – aussi bien par sa gauche que par sa droite. Cette dernière est d'ailleurs bien embarrassée depuis la dernière élection présidentielle. En effet, la politique économique menée par François Hollande (le candidat préféré des financiers pour la primaire socialiste) a dès l'origine été droitière. Et le changement de cap consécutif à la nomination de Valls ne fait qu'accroître la tendance.
Voilà la raison pour laquelle la droite est en matière d'économie atone. La gauche mène une politique économique qui serait celle conduite par la droite si d'aventure celle-ci était au pouvoir. Ne reste donc plus à l'Ump que les sujets de société, tel par exemple le mariage pour tous, pour mobiliser. L'Udi n'est elle aussi pas en forme puisque Borloo vient de mettre un terme à sa carrière politique. Quant au Modem, François Bayrou est un personnage qui évoque la rengaine : je suis bien conscient qu'il n'y a pas de limites au nombre de candidatures à l'élection présidentielle, mais il faut bien reconnaître qu'avec François Bayrou, cela commence à faire beaucoup …
L'Ump ne s'est jamais remise du duel fratricide entre Copé et Fillon pour la présidence du parti. Et leurs militants respectifs de se haïr, pas toujours cordialement. Nkm, autre figure phare, se remet assez péniblement de son échec lors des élections municipales à Paris, elle dont l'ascension semblait irrésistible. Quant à Nicolas Sarkozy, même s'il faut prendre très au sérieux sa candidature lors de l'élection présidentielle de 2017, il a nécessairement un goût de déjà vu, amer au demeurant. Cela à un point tel que même les militants de l'Ump souhaitent qu'il passe par le processus des primaires comme chacun : le grand amour n'est plus …
Si la politique économique fait consensus de l'aile droite de l'Ump à l'aile gauche du parti socialiste, force est de constater qu'il en est de même diplomatiquement, dans le cadre d'une actualité pourtant brûlante. Que la Sfio, et à un degré moindre, le parti socialiste, soient atlantistes, nous le savons. Concernant l'Ump, mouvement dont on avait commencé à évoquer la création dès le milieu des années quatre-vingt, elle nous montre bien qu'elle est l'absorption du Rpr par l'Udf, et notamment l'ancien parti républicain. On sait qu'il existe en France dans une partie de la droite – la bonapartiste en l'occurrence - , une tradition de mise en exergue de l'Etat qui aujourd'hui fait défaut. La droite, tout comme la gauche, a oublié l'idée même de Patrie et d'une politique étrangère autonome. Or, dans la lutte qui oppose la Russie, puissance européenne, au monde américain, l'Ump, aussi bien que le la gauche a fait son choix : celui d'arrimer la France mais aussi l'Europe à l'hegemon américain. Par voie de conséquence, on peut affirmer que tant d'un point de vue économique que géostratégique, l'Ump ne constitue pas une alternative. Tout aussi grave, sur les sujets de société comme le mariage pour tous, les cadres de l'Ump avaient fait savoir quelques années avant l'affrontement, leur approbation. On assiste donc à un désamour croissant des Français pour l'Ump, ce qui se traduit par des chiffres en matière d'intention de vote, particulièrement bas. Alors que la déconfiture de la gauche est flagrante, on aurait du voir l'Ump flirtant avec la barre des 30%. Or, tous les sondages le confirment, c'est au voisinage des 20% que se situe désormais l'Ump.
En ce sens, voici confirmé dans les faits l'analyse effectuée voilà bien longtemps par Alain de Benoist, décrétant qu'à l'ancien repère droite/gauche, il fallait substituer le référentiel centre/périphérie. Par centre, on entend justement le segment de prime abord important mais qui ne cesse de rétrécir, qui inclut toutes les forces présentes entre la droite de l'Ump et la gauche du Parti socialiste. Sachant que la gauche profonde n'a pas compris l'involution qui caractérise la psychologie des Français – elle reste figée dans des discours idéologiques déconnectés du Réel – ses résultats, malgré une conjoncture qui lui est favorable, reste très bas. En des temps de chômage (9 millions de chômeurs et assimilés, toute catégorie confondue), aussi bien le Npa que Lo ne percent pas. Quant au Front de gauche, c'est un parti ouvriériste sans … ouvriers. Egalement déconsidérés sont les écologistes de qui les Français espéraient la défense de la nature ( le courant environnementaliste), parce que, eux aussi, se baignent dans les eaux politiciennes.
Dans de telles conditions, c'est à un sauve-qui-peut auquel nous assistons . Il est à l'Ump par exemple, des dirigeants souhaitant un changement de cap, observant de plus en plus, l'ascension du Front National. Même remarque quant au parti socialiste où certains hésitent entre un recentrage les menant vers le Modem mais ou d'autres, bien plus nombreux, voudraient une politique réellement socialiste. Cela, les Français le perçoivent de plus en plus et il apparaît de plus en plus clairement que la véritable alternative consiste en un choix à effectuer entre le Front National et le reste de la classe politique.
Si la gauche aujourd'hui va très mal, la droite, elle non plus, n'est pas à la fête.
Alain Rebours