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Castelnau, l'homme qui ne devint jamais maréchal

Un hommage du Général Jean Salvan, qui revient en outre sur les fautes des responsables politiques lors de la Grande Guerre, dans un article publié sur Magistro :

"[...] Ce fut un officier complet, qui, bien avant la plupart de ses contemporains, avait perçu la nécessité d’une coopération entre les différentes armes et le potentiel de l’aviation.  De 1914 à 1918, il voulut toujours ménager les fatigues et vies de ses subordonnés, ce qui provoqua des tensions avec Joffre et Foch. Il refusait le principe de l’attaque à outrance. Et il n’hésita pas à dire après les offensives de 1915 : "Nous avons péché par infatuation." Mieux que d’autres généraux il connaissait le prix du sang : trois de  ses fils tombèrent au champ d’honneur lors de la Grande guerre… Lorsqu’on lui annonça la mort de l’un d’entre eux au cours d’une réunion préparatoire, Castelnau répondit stoïquement : "Continuons, messieurs."
Son catholicisme intransigeant le fit surnommer "le capucin botté". Clemenceau ne l’aimait pas et avec une de ses formules à l’emporte-pièce, il le traita de "Général de jésuitière, indigne des responsabilités qu’il assumait." Les prises de position de Castelnau lors de l’affaire Dreyfus, lors du Ministère André et de l’affaire des fiches entraînèrent son éloignement de la direction du 1° Bureau de l’état-major de l’armée. Le Général Sarrail, directeur de l’infanterie, le fit au moins une fois rayer du tableau d’avancement.
Il fut pourtant nommé Général de Brigade le 25 mars 1906, et il commanda la 24° brigade à Sedan, la 7° à Soissons, avant d’être promu Général de Division le 21 décembre 1909. Il commanda alors la 13° Division à Chaumont.
Le Général Joffre, tout franc-maçon qu’il fût, le prit sous son aile et le fit nommer sous-chef de l’état-major général en 1911. Simultanément, Castelnau fut promu Commandeur de la Légion d’Honneur.
 
Au début des hostilités, Castelnau commandait la 2° Armée, dont l’offensive fut arrêtée à hauteur de Morhange-Sarrebourg. Il réorganisa la défense de Nancy, et il obtint une victoire défensive importante dans la trouée de Charmes du 24 au 26 août 1914 : il empêchait les armées françaises d’être tournée à l’Est, et il préparait ainsi la victoire de la Marne. Il remporta ensuite la victoire du Grand Couronné du 31 août au 11 septembre 1914, méritant le titre de "Sauveur de Nancy". Le 18 septembre, Castelnau était élevé à la dignité de Grand Officier de la Légion d’Honneur.
Joffre le retira alors du front de Lorraine et il lui confia la mission de prolonger le flanc gauche des armées françaises vers le nord de l’Oise, pour tenter de déborder l’aile droite allemande. Cette partie du conflit est connue comme "la course à la mer" Castelnau entama l’affaire, la mena jusqu’à Amiens, avant de passer la main à Foch.
 
En juin 1915, Castelnau fut placé à la tête du Groupe d’Armées Centre, chargé de l’offensive de Champagne du 25 septembre 1915 : en quelques jours, il fit 25 000 prisonniers, prit 125 canons et contrôla une zone de plusieurs kilomètres, jusque-là tenue par les Allemands. A la suite de ce succès, il fut élevé à la dignité de Grand-Croix de la Légion d’Honneur et il devint l’adjoint du Généralissime Joffre, puis son chef d’état-major. Chargé d’étudier et d’affermir la situation en Macédoine et en Grèce, il parvint à rétablir la sérénité des esprits et à convaincre le roi Constantin de rester l’allié des Français.
En février 1916, il organisa la défense de Verdun lors de l’offensive allemande : il prit la décision de défendre Verdun à tout prix, il arrêta la débandade et il fit nommer Pétain à la tête des unités défendant Verdun.
Lors de la chute de Joffre et de son remplacement par Nivelle, il fut placé en non-activité. En 1917, il fut chargé d’une mission d’information en Russie : il y fit preuve d’une grande lucidité. Mal commandée, mal instruite, mal ravitaillée, l’armée russe était incapable de résister longtemps aux Allemands. Après la disgrâce de Nivelle, pour le remplacer, Lyautey et Foch avaient recommandé qu’on nommât Castelnau généralissime. Ses convictions catholiques lui firent préférer Pétain, mais on le rappela à la tête du Groupe d’armée de l’Est. Il était chargé de l’offensive prévue en Alsace et en Lorraine en novembre 1918, annulée lors de la signature de l’armistice.
Soucieux d’épargner les vies et fatigues de ses subordonnés, il avait un très grand prestige dans nos armées et chez nos alliés.
Alors que de l’avis de nos Alliés et des Allemands il avait été le meilleur des généraux français, ses convictions catholiques affirmées en firent le seul de nos commandants de Groupes d’armées à n’être pas nommé maréchal… [...]

Et de citer quelques réflexions à propos de Castelnau :
 
Le Général Gallieni :

Lorsqu’en 1913, le Président Poincaré consulta Gallieni pour trouver un successeur au Général Pau au poste de chef d’état major, la réponse fût : "Castelnau".
Et pour un deuxième choix, que diriez-vous ? : "Castelnau"
Et pour un troisième ? : "Castelnau" (in L’Œuvre, journal parisien)

Le Général Gamelin (alors au cabinet de Joffre)

"… Castelnau était aussi de formation ‘Etat-major’ et avait longuement servi à l’état-major de l’Armée. D’intelligence brillante, l’esprit vif, non sans adresse, il était un chef séduisant avec parfois des allures de militaire ‘Second Empire’. Ceci dit non dans un esprit critique, mais pour tenter de le définir. J’écris pour tenter, car il était en fait moins saisissable que la plupart de ses émules. Chef séduisant, il était très populaire dans l’ensemble de l‘Armée. Mais  il ne cachait pas ses sentiments religieux et conservateurs et ceux qui ne pensaient pas de même l’accusaient de ne pas être toujours impartial. Je n’ai jamais eu de preuve que ce reproche fût justifié, mais il est certain que ses sentiments influaient sur ses jugements, sinon sur les hommes, car on le vit prendre des chefs d’état-major qui n’étaient pas de la même opinion que lui, du moins sur les choses… "

Le Général Von Kluck :

"L’adversaire français vers lequel sont allées instinctivement nos sympathies, à cause de son grand talent militaire et de sa chevalerie, c’est le Général de Castelnau. Et j’aimerais qu’il le sût."

Le Major Harbord, du Corps expéditionnaire américain, dans ses Mémoires.

"C’était le Général de Castelnau, que beaucoup considéraient comme le meilleur général français, mais royaliste et catholique, donc suspect. Les Américains aimaient beaucoup Castelnau, en partie grâce à son aversion pour les longs discours. Ce bon vieux Castelnau limita ses remarques à lever son verre et à souhaiter que nous puissions bientôt abreuver ensemble nos chevaux dans le Rhin."

Louise Tudy

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