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Un jour, un texte! Les Français dans la guerre, Cocardes victorieuses par René CHAMBE (16)

« La civilisation française, héritière de la civilisation hellénique, a travaillé pendant des siècles pour former des hommes libres, c’est-à-dire pleinement responsables de leurs actes: la France refuse d’entrer dans le Paradis des Robots. » Georges Bernanos, La France contre les robots.

Notre premier ministre a déclaré que la France est en guerre. Mais l’ennemi est chez nous, au sein même de la population française. Il ne s’agit plus d’envoyer des professionnels, formés et aguerris combattre loin de nos terres, mais de se battre contre un ennemi sournois et impitoyable, qui use pour ses attaques de toutes nos libertés et des droits des citoyens français. Avant de faire une telle déclaration, encore eût-il fallu cultiver au sein du peuple français les valeurs qui font la force morale des nations. Cette nouvelle rubrique sur la guerre a pour objet de proposer des textes pour aider tout un chacun à réfléchir sur des sujets précis et si possible, d’actualité, elle est un peu modifiée pour montrer : les Français dans la guerre,Cocardes victorieuses par René CHAMBE (16)

« 7 h 40. - Robert vient de jeter un dernier regard à la montre de bord. Puis à l’altimètre : 2.200.

Là-bas, petites boules noires, les têtes du pilote et de l’observateur, ennemis à présent, se distinguent. On les voit. Ils sont deux !

Yeux durs, front de marbre, toute volonté tendue, ramassée, inflexible, Navarre fonce.

Robert doit sourire encore, il sourit toujours. Comme Navarre, il ignore la crainte. On va se battre ! On l’a tant cherché ! Au travers de ses gants, ses doigts étreignent sa carabine, sa pauvre petite carabine, jouet dérisoire pour un pareil duel.

Les dernières secondes...

- Pan ! Pan ! Pan !

A deux cents mètres, l’ennemi ouvre le feu.

Fusil-mitrailleur.

A bout de nerfs, incapable de se dominer plus longtemps, l’observateur vient de tirer.

Les détonations sèches se distinguent étonnamment sur le vacarme des moteurs. Robert et Navarre les perçoivent. Rien de nouveau.

Virage à droite, virage à gauche.  Navarre crochète.

- Pan!  Pan!  Pan 1

L’Allemand insiste. De brèves lueurs jaillissent de sa carlingue. Mais les balles se perdent. Pas une n’arrive au but. Pas même une chiquenaude sur les toiles.

La distance diminue. A voir grandir les cocardes françaises, il semble que l’ennemi s’affole. Les coups se succèdent à toute vitesse.

- Pan ! Pan! Pan! Pan! Pan!

Son tir ne parvient pas à se régler.

Robert, méprisant, ne baisse pas les yeux. Il ne tirera, lui, qu’à vingt-cinq mètres. Il se l’est juré. Il ne gaspillera pas ses cartouches. Il veut être sûr, sûr!  La doctrine est formelle, à la 12 : pour obtenir un résultat décisif, il est indispensable d’aller au corps à corps - presque à l’abordage.

Rien ne saurait arrêter ni Navarre ni Robert, ils iront jusqu’au bout ! Les croix de fer de l’Aviatik sont maintenant immenses, toutes noires, sur fond blanc. On est si près, que tous les détails apparaissent. Il est impossible qu’au cours de ce combat, l’un des deux, Aviatik ou Morane, ne soit envoyé par le fond. On ne s’approche pas impunément d’aussi près. Et l’on ne se manque pas à bout portant.

Incomparable manoeuvrier, Navarre exécute différents exercices de voltige pour dérouter le feu de l’adversaire. Il est plus haut que lui. Et brusquement, d’un seul coup, comme un épervier, il se laisse tomber.  Puis il se redresse.

Vingt-cinq mètres !

 

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Lois Spalwer

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