Décevante pour les plus aimables, pitoyable pour les plus sévères (lucides), la prestation télévisée de François Hollande jeudi soir restera d’ores et déjà, dans la forme comme dans le fond, l’une des pires de son quinquennat. Dans son communiqué publié hier soir, constatant le « conservatisme » mortifère du chef de l’Etat socialiste, Marine Le Pen a réitéré son appel «à ouvrir les vrais débats sur les sujets fondamentaux de la France aujourd’hui, et sur les conditions de sa souveraineté», tant il est vrai que l’effondrement de notre indépendance nationale dans tous les domaines est un drame pour la France et les Français. La présidente du FN a notamment relevé que «si François Hollande prétend avoir le goût du référendum, comme il l’a montré sur Notre Dame Des Landes, alors qu’il ne s’arrête pas en si bon chemin et qu’il en organise nationalement sur les grands sujets, à commencer par Schengen et le TAFTA. Il est temps de mettre au placard la démagogie permanente du discours UMPS, qui consiste à faire croire qu’on pourra améliorer la situation des Français sans engager les changements radicaux qui s’imposent. »
Dans la foulée du départ de Christiane Taubira et de l’arrivée de l’arrivée de son successeur Jean-Jacques Urvoas, M. Hollande a dévoilé sa petite cuisine, pompeusement nommée «remaniement», pour tenter de fédérer dés le premier tour de la présidentielle les voix du peuple de gauche.
Au nombre des débarqués, figurent la très discrète Marylise Lebranchu qui quitte son ministère de la décentralisation et de la fonction publique – Annick Girardin (PRG) lui succède-, et le mauvais ministre de la culture Fleur Pellerin, remplacée par Audrey Azoulay, énarque de la même promotion que Mme Pellerin, fille du conseiller de l’actuel (mais aussi de l’ancien) roi du Maroc André Azoulay. L’ex Premier ministre Jean-Marc Ayrault, décrié lorsqu’il était à Matignon pour son immobilisme, succède à Laurent Fabius aux Affaires étrangères. Sera-t-il comme ce dernier le symbole du recul de l’influence française et de sa soumission à l’atlantisme ? Tout laisse le craindre.
Les écolo-mondialistes de stricte obédience bruxelloise font une entrée en force dans ce nouveau gouvernement. Certes Ségolène Royal reste à l’Environnement, récupérant au passage les relations internationales sur le climat, la COP 21 au sens large, mais Barbara Pompili (ex-EELV) est nommée secrétaire d’Etat chargée des relations internationales sur le climat. La girouette opportuniste Jean-Vincent Placé (ex-EELV) occupera lui le poste de secrétaire d’Etat auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l’Etat et de la simplification. Ennemie intime des deux premiers, la patronne d’EELV, Emmanuelle Cosse, plus connue pour ses tweets assassins contre François Hollande que réputée pour ses compétences, prend la place de Sylvia Pinel au ministère du Logement. François Hollande aura au moins réussi à faire imploser EELV, du moins ce qu’il en reste désormais autour de la «copine» (sic) de Mme Cosse, Cécile Duflot, sachant qu’en général les écolos sont passés maîtres dans l’art de se saborder sans l’aide de personne.
Outre Mme Girardin, la fraternelle (toute) petite boutique PRG, est toujours bien représentée au sein de l’équipe de Manuel Valls. Thierry Braillard reste secrétaire d’Etat aux Sports et leur inénarrable patron, Jean-Michel Baylet, devient ministre de l’aménagement du territoire. Une manière de le récompenser de son échec cuisant un échec aux élections sénatoriales et de n’avoir pas su conserver le conseil départemental de Tarn-et-Garonne ?
Bref, ce mauvais casting en témoigne, Marine dit l’évidence lorsqu’elle constate que «François Hollande n’est pas apparu disposé à la moindre réorientation de sa politique. Economie, sécurité, agriculture, immigration, il s’entête à suivre l’orthodoxie fixée par l’Union européenne.»
Le Front National incarne plus que jamais la première force d’opposition à la fuite en avant euromondialiste de la classe politicienne. Il n’échappe pas cependant aux critiques, non seulement sur son programme mais aussi sur sa stratégie, laquelle lui assurerait des scores remarquables aux premiers tours des élections mais l’empêcherait de gagner les seconds. Une idée développée par Paul-Marie Coûteaux dans sa dernière tribune sur le site boulevard voltaire. Il reproche ainsi ce qu’il considère comme un refus d’une «stratégie d’alliance», d’«un rassemblement plus large que le (Front National)».
« Où trouver des personnalités locales ou nationales propres à élargir le périmètre, constituer des relais et des équipes gouvernementales ? Certes pas à gauche, qui n’a plus que l’anti-lepénisme pour faire bloc ; mais à droite, autour de Nicolas Dupont-Aignan, de Philippe de Villiers, de la MPT, de nombre de cadres et de caciques de l’ex-RPR et ex-UMP que le couple Le Pen-Philippot a rejeté dans les ténèbres extérieures sous l’opprobre UMPS, slogan facile mais faux – un électeur de droite ressemble moins que jamais à un électeur de gauche.»
Affirmer cela, c’est aussi oublier notre main tendue, constante depuis l’émergence du FN, à toutes les formations, les personnalités de la mouvance patriotique se reconnaissant dans le souverainisme. Le slogan UMPS peut être en effet sujet à caution quand il amalgame des électorats aux préoccupations, aux idées souvent antagonistes. Pour autant, et les dirigeants frontistes ont toujours opéré la distinction entre les électeurs et les Etats-majors des partis, il est plus que jamais totalement fondé à considérer les politiques menées par la droite et la gauche de gouvernement depuis des décennies. Les Juppé, Fabius, Sarkozy, Valls, Hollande, les dirigeants des principaux partis du Système s’abreuvent aux mêmes sources, baignent dans les mêmes eaux supra ou anti nationales et sont le plus souvent parfaitement interchangeables. Difficile de croire que nous l’apprenons à M. Coûteaux…
Sur le site de Causeur, le blogueur David Desgouilles, membre du parti de Nicolas Dupont-Aignan, notait hier dans un article (« Finalement, le Front National n’est pas rentré dans le rang : la sortie de l’euro reste inscrite dans son programme») que «les arguments selon lesquels le FN n’aurait pris aucune région à cause de ses positions économiques résistent difficilement à l’examen, de même que l’idée que des marges n’existeraient aujourd’hui qu’à droite. En effet, à qui étaient opposées au second tour Marion et Marine Le Pen dans leurs régions respectives ? A des candidats LR. Ce n’était donc pas de voix de droite dont elles avaient besoin mais d’empêcher la mobilisation de la gauche contre elle. Croit-on sérieusement que c’est le sort de l’euro qui a permis cette mobilisation ? Rien n’est moins sûr. »
Il soulignait aussi la grande, la vraie ligne de fracture est celle qui oppose les tenants de l’identité et de la souveraineté nationales d’un côté et, pour faire court, les euromondialistes de l’autre. David Desgouilles rappelait ainsi cette déclaration, faite il y a quelques mois par Alain Minc , «le théoricien du cercle de la raison: Marine Le Pen entrerait dans l’arc républicain à une condition et une seule (…) . Ce qui (…) pourrait rendre fréquentable la candidate FN à l’élection présidentielle de 2017, c’était d’accepter la monnaie unique européenne. Minc n’était évidemment pas seul. Il y eut ceux qui, comme lui, voient dans la monnaie unique le tabou ultime, et son rejet le signe de l’incompétence économique. Mais il y eut aussi ceux qui, après les élections régionales, décrétèrent que le Front National avait atteint son plafond de verre en raison de ses positions économiques (…)».
«Or, l’ objectif (désigné comme tel par Marine et Florian Philippot, NDLR) est de rassembler la France du non, majoritaire il y a onze ans, faire de la présidente du FN la candidate anti-mondialisation en combattant les trois fameuses libertés de circulation: celle des hommes, celle des marchandises et celle des capitaux. Nicolas Sarkozy combat seulement la première (en parole surtout, NDLR). Le Front de gauche accepte seulement la première(…)».
Et d’avancer une hypothèse : «Comme l’agonie de Schengen a permis au FN de gagner des électeurs supplémentaires, la fin de l’euro subie et décidée par ses adversaires le désignerait comme celui qui l’avait prévu, annoncé, demandé. Et lui ouvrirait à coup sûr les portes du pouvoir. A l’inverse, imaginez la tête de Marine Le Pen assistant au retour du franc après y avoir elle-même renoncé sous la dictée d’Alain Minc et Jean-Michel Aphatie ? Avouez que c’eût été ballot.»
La cohérence nous invite en tout cas à ne rien lâcher sur les fondamentaux de notre programme, d’autant plus à l’heure ou même les européistes les plus acharnés font part de leur doute sur la pérennité de l’échafaudage bruxellois. Ce qui implique d’envisager toutes les hypothèses. Bruno Gollnisch l’a dit : «Je ne suis pas d’avis que l’on provoque notre sortie de la zone euro, mais qu’on la prépare.» Autant de raisons pour redoubler de pédagogie auprès de nos compatriotes pour expliquer que la défense de nos libertés et de notre prospérité passe par ce recouvrement de notre indépendance nationale, bradée à Washington, Bruxelles et Francfort, laquelle n’est pas seulement un plan b mais aussi la condition même de notre renaissance.