Le 21 mai 2013, il y a désormais plus de trois ans, Dominique Venner s’avançait en homme libre dans la cathédrale Notre-Dame de Paris. Son but : se sacrifier pour éveiller nos consciences.
L’évocation de Dominique Venner sonne bien à l’heure où l’on commémore le centenaire de Verdun. Ce dernier se serait certainement réjoui face à la vaste réaction populaire suscitée par la profanation imaginée par nos « élites » sur la tombe de ceux, Français et Allemands, qui ont offert leurs vies... Venner, l’écrivain du Siècle de 1914, avait su percevoir, grâce à ses méditations et ses recherches, le rôle fondamental qu’avait joué le premier conflit mondial dans la destruction de l’Europe. Verdun est le symbole grandiose et grave de cette grande rupture historique.
Trois ans après le geste tragique et fondateur de Venner une interpellation se pose à nous, lourde de sens. Sommes-nous à la hauteur de son sacrifice ? Sacrifice qui a été consenti librement pour nous, Européens, qu’importent nos partis pris philosophiques, politiques ou religieux.
L’éveil des consciences s’est-il opéré ? Nos perceptions radicales et enracinées ont-elles progressé dans la société ? Avons-nous conquis de nouvelles positions ?
Ces interrogations apportent d’elles-mêmes leurs réponses… Rien n’a fondamentalement changé. Certes, des progressions se laissent entrevoir. Des grognes montent. Le peuple sort peu à peu de sa léthargie et semble enfin comprendre que les joies du centre commercial et du poste de télévision ne sont qu’éphémères. Que le monde est violent et tragique. Que les frontières et les ethnies existent. Que l’Histoire existe.
Mais ce mouvement de fond s’opère lentement. Trop lentement au vu du compte à rebours qui tourne en arrière plan. Malgré les évolutions dramatiques des derniers mois (attentats, agressions capitalistes, islamisation rapide, soumission des « élites », etc.) et surtout malgré la submersion démographique de notre continent, inédite à échelle historique, il n’y a pas eu de grands mouvements populaires en Europe de l’ouest pour mettre à mal l’oligarchie régnante et réclamer des comptes. Pas de conférence de Visegrad entre Londres, Paris et Berlin ou de marches populaires monstres comme à Dresde ou Varsovie.
Si nous ne parvenons pas à susciter cet élan populaire et salutaire le point de non retour sera franchi d’un moment à l’autre. Nous ne pouvons le savoir en l’état, mais ce point est peut-être déjà franchi. Ou non… Dans tous les cas des imprévus peuvent survenir, surtout dans l’état de tension de nos sociétés.
Un autre drame est en train de se jouer, alors que des destructions irrémédiables s’opèrent : les radicaux ne sont pas au rendez-vous, en tout cas en France.
Or ce sont ces mêmes radicaux qui possèdent toutes les clés de lecture et les réponses permettant d’apporter des solutions pragmatiques aux enjeux de l’époque.
Que nous le voulions ou non nous sommes en situation d’échec, et cet échec semble incompréhensible.
Cette situation a pourtant des explications rationnelles : enfermement dans un milieu confortable, où l’on se côtoie entre gens du « milieu ». Consommation excessive d’alcool (non, ce n’est pas un mythe). Reconversion d’une partie des anciens dans le monde du business avec l’embourgeoisement inhérent. Ou bien l’inverse, le déclassement et la misère pour beaucoup. L’absence d’imagination. Les modes militantes qui changent tous les cinq ans, avec des mouvements qui montent et d’autres qui vivotent et éclatent, au gré des querelles de chefs ou de doctrines (comme si la restauration de telle ou telle dynastie ou le fait de lire tel ou tel journal avait une quelconque importance dans les circonstances présentes). L’attente du sauveur Poutine ou Trump. Et beaucoup, beaucoup d’autres choses…
A l’inverse nous voyons certaines formules fonctionner et monter en puissance. Des médias alternatifs de qualité professionnelle se montent et connaissent de beaux succès. Des personnalités, seules et non affiliées à des mouvements stricto-sensu, parviennent à véhiculer des messages forts et massivement relayés dans la société. Des entités visant à promouvoir la culture, la mémoire, ou l’enracinement local suscitent l’intérêt.
Au final le plus rassurant, en soi, c’est le peuple. Et surtout pas le « milieu ». Bien que la prise de conscience de ce peuple et sa mise en marche s’opèrent trop lentement (c’est exaspérant parfois, il est vrai), des signes forts tendent à démontrer que des forces salutaires le traversent. Les résultats électoraux ne sont qu’un des témoignages de ce phénomène de réveil.
Il ne s’agit plus de jauger le peuple du haut de notre tour d’ivoire glorieuse, mais de l’accompagner. Nous sommes le peuple.
Que nous le voulions ou non, le militantisme « classique » est en train de mourir. Ce n’est pas forcément une mauvaise chose, quand on voit ce qu’il est devenu. Il ne s’agit pas de cracher sur ce qui a été fait, mais d’émettre une critique froide.
L’avenir appartient, cela peut paraître paradoxal, à des structures non structurées, sans doctrines clairement et définitivement établies. L’avenir appartient à des individus et des groupes qui agissent de manière concrète, au quotidien, au sein de leur travail, de leurs familles, de leurs villes et villages. Il s’agit de se mettre au service de la communauté et cette communauté ce n’est pas le « milieu », c’est notre peuple.
Le militant d’aujourd’hui ne devrait plus se lancer dans un quelconque mouvement, mais agir, tout de suite, dans ce qu’il sait faire de mieux. Tu aimes écrire ? Écris. Tu aimes marquer ton territoire ? Fais des pochoirs. Tu aimes le jardinage ? Trouve-toi un lopin et gratte. Tu veux aider les pauvres ? Prends ton sac et ton thermos. Tu veux sauver des vies ? Deviens pompier. Tu es geek ? Fais du piratage. Tu veux diffuser tes idées ? Fais des vidéos. Bref, fais ce que tu sais et aimes faire, mais fais-le !
Le faisceau de licteur des anciens romains doit nous servir de guide. Une convergence de savoirs faire et de volontés, a priori difficiles à concilier, qui s’unissent pour atteindre un but commun.
Certains verront là la promotion d’une forme d’individualisme forcené, le renoncement aux activités militantes classiques, à nos chères manifestations avec nos étendards couverts de symboles martiaux accompagnés de nos chants de parade. Le renoncement à la camaraderie.
Gardons ces choses pour nous, dans nos tiroirs, pour nos fêtes. Il ne s’agit aucunement d’avoir honte de ces choses, nous sommes ce que nous sommes. Mais nos efforts doivent aujourd’hui se tourner ailleurs, sinon les radicaux n’auront servi à rien, si ce n’est à boire des apéros.
Ce serait dommage, nous avons un rôle énorme à jouer.
Jacques Thomas / C.N.C.
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