Nous savons bien que, selon le constat lucide de Jacques Bainville, si souvent cité, « tout a toujours très mal marché ». Ce réalisme pessimiste devrait d’ailleurs épargner aux maurrassiens le reproche rebattu d'avoir idéalisé notre passé monarchique, fût-il, au regard de l'Histoire, plus réussi et de très loin que ce qui a suivi jusqu'à nous.
Plus profondément, les lecteurs de Gustave Thibon savent aussi que le Politique est ce « gros animal » dont a parlé Simone Weil, où le bon et le mauvais se mêlent inéluctablement, où une forme même approchée de perfection est inatteignable, où subsistera toujours un lot non éliminable de turpitudes, de violences, de médiocrités et d'injustices. On ne conforme pas une société à l'idéal comme ont pu être ciselés jusqu'à la quasi perfection une fable de La Fontaine, une tragédie de Racine, une sculpture de Puget, un poème de Verlaine, ou même une commode de Boulle. Telle est, en ce sens, la supériorité des arts - de l'esthétique - sur le politique. Seul, peut-être, par leur conjonction heureuse, le siècle de Louis XIV a pu s'approcher d'une forme de perfection d'ensemble, encore que le Grand Roi se soit reproché sur son lit de mort d'avoir trop aimé la guerre et, pour la faire, d'avoir demandé des efforts excessifs à ses sujets ... Ils en auront eu, pourtant, les bénéfices sous les règnes suivants d'où la guerre fut presque absente et où ils s'enrichirent. Encore ce XVIIIe heureux se termina-t-il par la Révolution et son cortège d'horreurs. Pas encore achevées, d'ailleurs.
Ces réserves ayant été faites, il y a tout de même des degrés dans l'imperfection.
Vu sous cet angle, à l'orée du quinquennat d'Emmanuel Macron, l'état présent de notre pays nous semble avoir atteint un degré d’échec, sinon maximum, du moins très élevé, avec ses 2 200 milliards de dette, ses 9 à 10 millions de pauvres, ses 6 millions de sans travail, ses 10 millions d’habitants issus d'une immigration en majorité musulmane, difficilement intégrable et pour partie agressive ; à quoi s’ajoutent la menace terroriste pesant sur toutes les têtes, des engagements extérieurs où s'enlisent nos militaires, une économie en déclin, une industrie dont des pans entiers ont été sacrifiés au dogme libre-échangiste et qu’il ne sera pas aisé de reconstruire, une agriculture réduite à presque rien et, en tout cas, à la misère, une société plus que jamais fractionnée entre riches et pauvres, entre France périphériques et métropoles où s'accumulent les richesses pour quelques-uns, et ce, parfois, avec des disparités honteuses ; sans compter notre déchéance culturelle et morale, la pire, sans doute, de ces plaies.
C'est sans nul doute à raison d'un tel inventaire, même s'il devrait être approfondi et nuancé, que, curieusement, après cent cinquante ans à peu près ininterrompus de pratique républicaine, de la IIIe à la Ve république, la question du régime se pose toujours en France et qu'un recours à la solution monarchique y est périodiquement remis sur la table.
Aujourd'hui, c’est un paradoxe que d'avoir pour président de la République un homme qui, lorsqu'il était ministre de l'Économie sous la présidence de François Hollande, expliqua à des journalistes l'incomplétude de la démocratie et qui leur précisa que le problème de la France est qu'il lui manque un roi.
Nous voulons bien le croire, nous qui nous sommes parfois demandé s'il était encore légitime, soutenable, près de deux siècles et demi après la Révolution, de continuer à vouloir que notre royalisme aboutisse.
Notre conclusion toujours renouvelée est que, dans la situation où elle se trouve et face aux crises qu’elle ne peut manquer de rencontrer, cette possibilité, ce recours, doivent être préservés pour la France. C’est ce que pensèrent en leur temps, en faisant omission de notre actuel président de la République, deux de ses prédécesseurs : Charles De Gaule et François Mitterrand.
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