Sur les pulls de Béatrice et Jérôme était inscrit « Oui au RIC, je dis oui au référendum d’initiative populaire ». 135 € d’amende.
Ces deux dangereux terroristes regagnaient le métro place de l’Étoile lorsque des policiers ont réussi à les intercepter et ainsi sanctionner cette revendication ambulante. « On a même proposé d’enlever notre pull, mais ils ont refusé », précise Béatrice. En avril, ne te découvre pas d’un fil. Fin mars, non plus. Les températures sont encore assez basses, la place de l’Étoile pleine de courants d’air. Les forces de l’ordre ne pouvaient prendre le risque de voir des gilets jaunes venus de l’Orne attraper un mauvais rhume.
Condamnés à persister dans leur promotion du RIC, le couple s’est vu expliquer qu’il se trouvait dans une zone interdite à toute manifestation. À l’image des dizaines de personnes verbalisées lors de la Manif pour tous pour avoir porté un sweat-shirt avec le symbole de la famille, le vêtement se voit donc assimilé à une pancarte ou banderole revendicative. Dans ce cadre, que porter ? Un tee-shirt « Che Guevara » est-il un signe ostentatoire de rébellion sur la voie publique ? Un début d’émeute ? Un pantalon rouge ? Un bleu ? Un slip kangourou n’est-il pas la preuve d’un soutien sans réserve à la politique australienne ?
Lors du passage en caisse dans une supérette, la préposée chargée de comptabiliser mes achats portait un sweat-shirt sur lequel figurait le portrait de Karl Marx. Tétanisé par cet embryon de manifestation, je m’en fus signaler le cas au commissariat le plus proche. Le risque d’attentat à coup de pots de NutellaⓇ était trop grand.
Au micro de France Info, l’un des deux contrevenants de la place de l’Étoile s’insurge : On n’a plus le droit de s’exprimer, en France. » Si, on a le droit. Il suffit de porter le pull sur l’envers. De garder pour soi son message. Sur la doublure ou dans les poches.
Après inventaire de tous les accessoires vestimentaires, il apparaît que seul le voile islamique ne présente aucun risque de s’attirer les foudres policières. Bien au contraire. La djellaba aux couleurs du RIC placera, également, le manifestant hors d’atteinte des emballements répressifs. La crainte de se voir qualifié de raciste verra le CRS reculer, ouvrir peut-être les portes des boutiques de luxe. L’absence quasi totale de citoyens musulmans parmi les gilets jaunes laisse la place à une nouvelle forme de contestation. Les Black Blocs en burqua noire rivaliseraient, alors, avec les gilets jaunes déguisés en femmes voilées jusqu’aux oreilles. Un Grand Remplacement pour une fois très mal perçu par le pouvoir en place.