Face à plusieurs milliers d’élus, réunis porte de Versailles, à Paris, pour le congrès de l’Association des maires de France, Emmanuel Macron a essayé d’apprivoiser les édiles au cours d’un long discours tel qu’il a l’habitude d’en faire. Mais avant cela, l’accueil qui lui fut réservé résonna d’un long silence interrompu par un applaudissement discret et déclenché à l’initiative de François Baroin, le président de l’AMF. Ce dernier semble, à cette occasion, vouloir marquer son repositionnement dans le débat global en vue de 2022. Ce n’est pas faute, pourtant, de la part de l’illustre visiteur d’avoir envoyé des messages d’amour et de bienveillance à l’approche de ce rendez-vous, semble-t-il presque crucial.
« J’ai besoin de vous », a-t-il même osé, dans un élan de fausse supplique. Mais toutes ses flatteries ont peiné à convaincre une assistance, certes moins hostile que les années précédentes, mais toujours dans l’attente de vraies réponses à leurs préoccupations budgétaires. S’ils ont longuement écouté la logorrhée, assez convenue, du président de la République, ont-ils eu le sentiment d’être entendus ?
À prendre en compte les propos de certains d’entre eux, toutes tendances confondues, rien n’est moins sûr.
À ceux qui lui faisaient part de leur inquiétude relativement à la baisse des dotations de l’État aux communes, il a répondu, avec son effronterie habituelle : « Concernant la taxe d’habitation, j’ai fait ce que je devais faire… Vous me ferez savoir si certains de vos administrés vous ont fait part de leur mécontentement… » Faites donc avec cela, Monsieur le Maire ! Pour le reste, faites preuve d’imagination.
Cette harangue adressée à ses interlocuteurs du jour est aussi un message très clair adressé à l’opinion, ou plus précisément aux électeurs qui seront appelés à se prononcer dans quatre mois à l’occasion des municipales. Moi, je fais ce que je dis et je donne ce que je promets.
À certains édiles municipaux qui s’inquiètent de l’immixtion de listes communautaires dans le prochain débat électoral, il répond qu’il est hostile à une éventuelle interdiction les concernant. Mais il a promis que de nouvelles mesures contre le communautarisme arriveraient « dans les prochaines semaines ». Mais d’ici là, continuez à parler de laïcité, d’écologie, de décentralisation, cela vous occupera et « ça ne mange pas pain ».
Au fond, si le discours s’est sensiblement modifié, le plan de route demeure inchangé. Et c’est bien cela, le problème, car si la crise des gilets jaunes est toujours d’actualité et pourrait reprendre de la vigueur, l’échéance de revendication sociale du 5 décembre prochain devrait être à la hauteur de la crispation constatée parmi les élus et dans tout le pays au travers des corps professionnels, qu’il s’agisse de ceux de la santé, des agents de sécurité, de la SNCF, des pompiers, mais aussi de la police. Les policiers et les gendarmes commencent, eux aussi, à se lasser du peu de cas dont fait preuve l’Àtat à l’égard d’une situation qu’ils considèrent explosive.
En résumé, un discours pour rien ?
Jean-Jacques Fifre