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Robes noires et drapeaux rouges

6a00d8341c715453ef0240a4b35365200c-320wi.jpgDans la bataille des retraites qui empoisonne, du fait des grèves, la vie des Français, particulièrement en région parisienne, on ne doit pas perdre de vue la nocivité du projet gouvernemental. On prétend faire passer tous les citoyens sous la même toise. Il s'agit aussi de limiter les pertes globales d'un système de vieillesse. Comme celui-ci paye ses pensions à crédit, Bercy a imaginé de s'en tirer par l'effet d'une énorme étatisation, analogue à celle du plan Juppé de 1996-1997 pour l'assurance maladie.

Les effets catastrophiques de cette expérience, peuvent se mesurer au taux de disparition de la médecine de ville et d'apparition des déserts médicaux, de surcharge des urgences hospitalières, etc. Cela n'a pas servi de leçon à nos technocrates. Ils s'apprêtent ainsi à siphonner seulement, comme l'avaient fait leurs prédécesseurs de 1941[1] les réserves des quelques caisses excédentaires, comme celle du Barreau, à liquider les dernières spécificités des assurances complémentaires, et, au bout du compte, à faire reporter toutes les pertes des régimes spéciaux sur la caisse monopolistique unique.

De cette question de fond, hélas, personne, ou presque, ne semble se préoccuper.

On se polarise uniquement sur quelques conséquences.

Élu en 2017 par l'effet repoussoir d'une adversaire de second tour clairement incompétente, vainqueur en 2018 de syndicats moribonds, le pouvoir jupitérien joue depuis 2019 de la vieille recette d'André Malraux : entre les communistes et nous, il n'y a rien. En ce début 2020 tout ce qui met la CGT en vedette paraît ainsi profitable à la communication gouvernementale.

En théorie donc le projet global d'étatisation et de centralisation des caisses prétend s'appuyer sur la nature réformiste des centrales CFDT, UNSA et CFTC, dont les doctrines d'ailleurs divergent.

En pratique le meilleur allié, ou le meilleur ennemi, du pouvoir jupitérien s'appelle Martinez, secrétaire national de la CGT.

Foin des indépendants, qui seront désormais intégrés dans le régime général dès le 17 janvier, dans l'indifférence générale qui avait déjà accompagné la création du RSI par la misérable réforme Fillon de 2003.

À juste titre Franck Deletraz éditorialiste de Présent peut donc parler d'une "cacophonie sociale"qui, bruyamment, se dégage.[2]

Le site gauchiste Mediapart se trompe quand il croit pouvoir affirmer[3]que "la rue ne faiblit pas". En réalité les chiffrages le plus plausibles comptabilisaient 56 000 manifestants à Paris ce 9 janvier, et 452 000 dans l'ensemble de l'Hexagone, contre 76 000 et 615 000 le 17 décembre dernier. Ceci traduit une petite érosion constante de 25 % en 25 jours. Pas besoin d'une Médaille Fields pour comprendre que cela représente lentement mais sûrement un recul de 1 % par jour.

La CGT, qui ne recule devant aucun bobard se réclame de 370 000 manifestants à Paris, et décompte 216 manifestations dans toute la France, contre 197. Qui croit-elle duper ?

Laurent Joffrin, couine comme d'habitude dans son coin. "En plein défilé, écrit-il dans sa Lettre politique datée du 9, alors même que la voie d’un compromis semblait ouverte, Gérald Darmanin prononce un éloge appuyé de cette mesure d’âge, que les syndicats réformistes tiennent depuis le début pour une ligne rouge. Une manière polie mais claire de dire : Allez vous faire voir !"

Le directeur de Libération proteste en effet contre les propos qu'il juge triomphalistes du ministre des Comptes publics.[4]

L'âge pivot est "juste et efficace", ose affirmer le Darmanin, qui ajoute "Ce qui est sûr, c'est qu'on doit travailler un peu plus longtemps", ajoutant toutefois que "le Premier ministre a toujours dit qu'il était ouvert à un cocktail de propositions".

Spécialiste des questions syndicales Dominique Andolfatto constate donc, à propos de la mobilisation du 9 : "c’est un demi-succès mais le mouvement a du mal à s’affirmer (…) Ça reste parmi les plus grosses mobilisations de la décennie, même si on est loin des chiffres de 2010, mais on voit bien que les syndicats sont à la peine, juge-t-il. Ils ont perdu du terrain dans leur implantation dans le privé et ça n’impacte pas. Du coup, ça s’effiloche face à un gouvernement qui poursuit sa route de façon résolue. Tout cela traduit un échec de la démocratie sociale à la française."[5]

Pourquoi ne pas parler, plus largement, de l'échec d'un pays hélas dans son ensemble, résolument enfermé dans son étatisme et sa gréviculture ?

JG Malliarakis  

Apostilles

[1] Quand la Charte du Travail créa la retraite des vieux travailleurs, ancêtre de ce que nous appelons aujourd'hui retraite par répartition. Pour réaliser cette promesse non tenue du front populaire le gouvernement Darlan s'empara des réserves des compagnies d'assurances.

[2] cf. Présent n° 9529 daté du 10 janvier.
[3] cf. article "Retraites: revivez la mobilisation du 9 janvier"
[4] cf. entretien "Gérald Darmanin sur la réforme des retraites: Chacun doit faire un pas: gouvernement et syndicats"
[5] cf. article "Retraites : les syndicats restent déterminés, l’exécutif aussi"

https://www.insolent.fr/2020/01/robes-noires-et-drapeaux-rouges.html

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