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La Maison de la Terreur, repaire des totalitarismes (texte de 2013)

À Budapest, la Maison de la Terreur rappelle aux visiteurs comment et pourquoi s'instaure un totalitarisme. À méditer…

Le visiteur français qui parcourt aujourd'hui les rues de Budapest, admire les mosaïques de la basilique Saint-Etienne ou se détend aux bains Széchenyi, oublierait presque - n'était quelques monuments frappés des symboles marxistes - que voici 25 ans à peine, le pays appartenait au bloc soviétique.

La Maison de la Terreur (Terror Háza) le lui rappelle opportunément. Ce musée est installé au 60 avenue Andrássy, dans un bâtiment de sinistre renommée qui abrita sous l'occupation allemande le parti des Croix fléchées, collaborationniste, avant de devenir le quartier général de la police politique communiste (AVO, puis AVH). Les murs du grand hall central du musée sont tapissés de milliers de portraits de victimes du régime. De salle en salle sont décrites, films d'archives à l'appui, les souffrances subies par les Hongrois sous les totalitarismes nazi et marxiste. À la fin du parcours, le visiteur descend par un ascenseur dans les caves, où des centaines de personnes furent torturées : les cellules et salles d'interrogatoire, détruites par les communistes afin d'effacer les traces de leurs forfaits, y ont été reconstituées à partir des témoignages.

Jusqu'à l'occupation du pays par les troupes allemandes le 19 mars 1944, la Hongrie, sous le régent Miklos Horthy, avait pu conserver un gouvernement et un parlement légitimes. Après cette date, le pays perd sa souveraineté pour près de 40 ans. Les nazis mettent alors en place un gouvernement fantoche et Horthy - hostile à la déportation des juifs - est contraint à l'abdication en octobre 1944.

Plus de 700 000 Hongrois au goulag

En mars 1945, les Soviétiques chassent les troupes allemandes du pays. Aux élections parlementaires organisées la même année, 17 % des voix seulement vont cependant aux communistes, contre 57 % au parti des Petits propriétaires, qui s'oppose à eux. Mais le ministère de l'Intérieur et la toute-puissante police secrète du régime, appuyés par les Soviétiques, se chargent d'éliminer tous ceux qui pourraient s'opposer à la prise de pouvoir des staliniens. Anciens ministres, députés, professeurs, militaires, clercs sont déportés. Un putsch contraint le premier ministre à démissionner, le parlement est dissous et de nouvelles élections - truquées - permettent aux rouges de former un gouvernement. « La torture et la terreur devinrent des événements de la vie quotidienne… », rapporte une notice publiée par le musée. « L’empire du goulag soviétique d'une immense extension, qui couvrait toute l’Union Soviétique, avala plus de 700 000 Hongrois. »

S'ensuivent l'abrogation de la propriété privée, la nationalisation de l'Industrie, des propriétés agricoles, de l'Education… Les résistances sont écrasées entre 1945 et 1956, date de l'insurrection de Budapest, 1500 personnes sont accusées de conspiration contre l'Etat, et 400 000 paysans de crime contre l’approvisionnement public.

La résistance du cardinal Mindszenty

Très vite, les églises - à commencer par l’Église catholique, à laquelle appartiennent 70 % des Hongrois -, considérées comme réactionnaires, sont elles aussi persécutées, et contraintes de signer des « accords » avec l’État marxiste.

Dès 1945, les mesures coercitives se succèdent : confiscation des terres de l’Église, interdictions des associations religieuses, puis du catéchisme, nationalisation de 6 500 écoles religieuses en 1948. Les parents dont les enfants reçoivent un enseignement religieux sont harcelés, les étudiants inscrits dans les établissements religieux, discriminés. Prêtres, moines, religieuses, pasteurs, rabbins sont jetés en prison ou doivent quitter la Hongrie, tandis que l'Office d’État aux Affaires Religieuses, instauré en 1951, contrôle les nominations des nouveaux responsables. Les fidèles sont poursuivis : à Gyöngyös, trente lycéens âgés de 16 à 17 ans sont arrêtés, ainsi que leur professeur, le Père Kis. Ce dernier et trois adolescents sont exécutés, leurs camarades condamnés à la prison et aux travaux forcés. En juillet 1951, la répression porte ses fruits : l’Église hongroise est forcée de confier des postes importants à des « prêtres de paix » choisis par le Parti, et l'épiscopat fait serment d'allégeance à la République Populaire.

Le Parti se heurte toutefois à la résistance déterminée du cardinal József Mindszenty, nommé par le pape à la tête de l’Église de Hongrie en 1945. Arrêté en décembre 1948 et torturé pendant 33 jours et nuits jusqu'à ce qu'il signe une confession de ses « crimes », il est condamné à la prison à vie. Libéré au lendemain de l'insurrection hongroise de 1956, il se réfugie, lors de l'intervention soviétique qui écrase la révolte et rétablit le régime communiste, à l'ambassade des États-Unis où il passe les 15 années suivantes avant d'émigrer en 1971, sous la pression du Vatican et du gouvernement hongrois. Sa cause de béatification est actuellement à l'étude.

« Les Nazis et les Communistes (…) annonçaient qu'un nouveau type d'homme devait être créé pour bâtir un nouveau monde et un paradis sur Terre, c'est pourquoi ils avaient le droit de détruire tout et tout ceux qui se mettaient en travers de leur chemin vers ce but suprême, écrivent encore les auteurs de la brochure. Ces dictatures persécutaient la religion, les fidèles et les églises parce que leur enseignement était en opposition totale avec les idéologies nazies et communistes qu'elles voulaient élever au rang de nouvelle religion. »

Au fait, quelle est la nouvelle religion de notre ministre de l’Éducation, Vincent Peillon ?

Hervé Bizien monde&vie 11 juin 2013  n°877

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