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[CHRONIQUE] Mission sur les avantages indus des politiques : poudre aux yeux et alibi

Capture d'écran YT Site du Gouvernement
Capture d'écran YT Site du Gouvernement
Le Premier ministre a annoncé qu’il confiait une mission à l’ancien député socialiste René Dosière, président de l’Observatoire de l’éthique publique, pour débusquer les éventuels avantages indus dont bénéficieraient les responsables politiques. « Les Français, pour beaucoup d’entre eux, en sont venus à penser que les politiques s’en mettent plein les poches, que c’était une gabegie d’argent public. Il faut éclaircir tout ça. Est-ce qu’il y a, pour les parlementaires ou responsables politiques français, des situations d’avantages indus, excessifs, inacceptables ? », s’est interrogé François Bayrou. Assez savoureux, de la part d’un ancien haut-commissaire au Plan (2020/2025), alors que la planification dont la conception revenait au commissariat général au plan a été supprimée en 2006. Preuve que la Ve République finissante est incapable de couper les branches mortes d’une administration tentaculaire qui trouve sa justification en elle-même.

Cette initiative illustre trop bien le proverbe d’origine chinoise : « Quand le sage désigne la lune, l’idiot regarde le doigt ». Car si, à juste titre, il est possible d’être agacé par le coût du secrétariat alloué aux ex-présidents de la République, ou celui de leurs agents de sécurité, ou par le train de vie de la présidence de la République, infiniment supérieur à celui de la Couronne d’Espagne (125,7 millions d'euros, contre 8,4 millions d'euros), ou encore la rémunération des membres du Conseil constitutionnel (environ 15.000 euros bruts cumulable avec une pension de retraite), ou le « recasage » des copains, le nœud du problème se situe ailleurs.

En effet, la pléthore de niveaux d’administration avec leurs élus et leurs bureaucrates à rémunérer, les 1.200 agences de l’État recensées par l’Inspection générale des finances et la fondation iFRAP, le nombre d’élus nationaux (577 députés et 348 sénateurs, par comparaison 435 représentants et 100 sénateurs aux USA pour 340 millions d’habitants quand la France en compte 68,5 millions), la multiplication des allocations sociales hors de contrôle, l’ouverture de celles-ci aux personnes ne possédant pas la nationalité française, l’intempérance budgétaire expliquent bien mieux que les petites gabegies la situation de la France.

La vérité est que la France est mal gouvernée depuis des décennies et la gauche française, depuis 1981, en est très largement responsable : multiplication des postes de fonctionnaires, 35 heures, retraite à soixante ans généralisée quand la démographie s’effondre et l’espérance de vie s’allonge, ouverture des vannes de l’immigration. Mais la droite conformiste n’a jamais eu le courage de revenir sur les erreurs de la gauche.

En fait, la France n’est pas gouvernée mais administrée au jour le jour. Quand il n’y a plus de gouvernement politique, au sens noble du terme, c’est le comptable avec son crayon sur l’oreille qui décide. Gouverner, c’est prévoir, dessiner des perspectives, avoir un principe d’action et des objectifs clairs. De Gaulle, quels que furent ses défauts et la tache que représente l’abandon des harkis et des pieds-noirs, savait définir les objectifs de sa politique : l’indépendance et la grandeur de la France, le bien-être des Français. Simple mais exigeant. Peu en apparence, mais beaucoup dans les faits.

Depuis, l’élection est devenue la fin ultime de l’action politique alors qu’elle ne devrait en être que le moyen. Le découpage, catégorie par catégorie, de l’électorat pour proposer les mesures qui satisfassent chacune d’elles, impossible gageure, a remplacé la recherche du bien commun. L’électoralisme est devenu la coûteuse règle de l’action politicienne. Pire encore, la démocratie représentative s’est muée en oligarchie élective tempérée par la cooptation ! Quant à la monarchie républicaine, elle cumule les inconvénients de la monarchie et de la république mais pas les avantages, dès lors que le « monarque » en a oublié les devoirs et les obligations et se maintient en dépit du désaveu du peuple ou passe outre à sa volonté clairement exprimée, comme pour le traité constitutionnel européen.

Le gadget inventé par François Bayrou élude le vrai problème qui est le mauvais gouvernement de la France depuis des décennies et l’incapacité du monde politique à changer de logiciel. Non, l’État ne doit pas régler toute la vie des Français en toute chose. Non, le patrimoine des Français n’appartient pas à l’État. Non, l’action politique ne se réduit pas à dépenser l’argent des Français pour se créer une clientèle électorale. Non, l’abandon de la souveraineté entre les mains de l’UE n’est pas la fin ultime de la politique. La mission confiée à René Dosière n’est qu’un alibi pour accabler encore les Français d’impôts en prétendant que tout le monde consent à des efforts. Le système est sclérosé, à bout de souffle. Il a déjà la rigidité cadavérique. Il faut en changer.

Stéphane Buffetaut

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