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À l’heure où paraîtra cet éditorial, nul doute que l’affaire des sous-marins aura été passée par pertes et profits d’une politique extérieure erratique… ou, malheureusement trop conséquente. Elle ne fera plus, en tout cas, la une des journaux ou des chaînes d’information.
Il est vrai que les rodomontades du chef de l’Etat n’auront servi qu’à démontrer une fois de plus notre alignement sur les Etats-Unis, un alignement que ceux des Etats européens, qui ont ouvertement appuyé Joe Biden, ont au moins le mérite de reconnaître, tandis que Macron renverra à Washington l’ambassadeur français en ayant simplement obtenu un échange, de la part des Etats-Unis, une reconnaissance plus grande du fait… européen !
Ou, comment un préjudice directement causé à la France est utilisé pour promouvoir l’Europe par le chef de l’État français lui-même, qui continue ainsi de dissoudre notre souveraineté, dont il a fait le deuil, au profit d’une chimérique « souveraineté européenne ». Et Florence Parly d’en rajouter dans le déni dans Le Monde du 24 septembre : « L’Europe a une opportunité unique de s’affirmer en tant que puissance sur le plan stratégique. » Macron et Parly ont beau sauter comme des cabris, en criant « Europe ! Europe ! » : c’est aux dépens de la France, alors même que l’Europe a fait le service minimum, quand elle ne s’est pas désolidarisée de nous. Une « opportunité » éphémère, surtout.
QUEL AVENIR POUR LA NOUVELLE-CALÉDONIE ?
Demeure évidemment le souci de l’avenir de la Nouvelle-Calédonie, qui fera, le 12 décembre prochain, l’objet d’un troisième et théoriquement dernier référendum, mais rien n’indique que le résultat sera accepté par la partie perdante, d’autant que les enjeux géopolitiques de l’Indo-pacifique, ignorés de la plupart des Français précisément jusqu’à l’affaire des sous-marins, et certainement déjà oubliés par eux, peuvent être explosifs. Malheureusement, la présence de plus en plus agressive de la Chine dans la région n’‘est pas suffisante à faire réfléchir les indépendantistes, surtout animés par la haine de la France, une haine longtemps entretenue, parfois ouvertement, par l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Quel sera leur jeu et celui des Etats-Unis à la veille de ce troisième scrutin, surtout à la suite de l’affaire des sous-marins ? Les dollars, ou leur promesse, vont-ils couler à flot pour encourager le vote indépendantiste, et réaliser le vieux rêve anglo-saxon d’évincer la France de cette partie du monde, au risque, peut-être recherché, d’un tête à tête avec la Chine ? [1]
Quoi qu’il en soit, la situation héritée de l’ère Mitterrand, avec, il faut le préciser, la complicité de la droite parlementaire, serait ubuesque – un troisième référendum en cas de victoire du non aux deux premiers ! — si elle n’était grosse des plus graves incertitudes, d’autant que le vote loyaliste s’est érodé lors du deuxième référendum. Les trente années qui, depuis les accords de Matignon de 1988, auraient dû préparer l’avenir de l’archipel, avec des mesures exorbitantes du droit commun et même de nos sacro-saintes valeurs républicaines, la Constitution ayant été modifiée en ce sens, n’ont en rien permis de résoudre des tensions que seul un État énergique et soucieux de faire sa part à chacun aurait pu apaiser. Mais l’État, désirant tout d’abord se débarrasser autant par lâcheté que par idéologie « décoloniale » de cette part du territoire national, se réfugie aujourd’hui derrière une neutralité d’autant plus scandaleuse que, quel que soit le résultat – indépendance ou maintien dans le giron français —, une guerre civile n’est pas exclue. La République, là encore, aura montré sa malfaisance, en n’abordant pas de front une situation qu’elle a laissé pourrir, en pensant peut-être que le temps ferait son œuvre. Il l’a fait, mais il est à craindre que ce ne soit en faveur ni de la réconciliation, ni de la présence de la France dans cette partie du monde
LE PAYS LÉGAL EN CAMPAGNE ÉLECTORALE
Mais il est vrai qu’il y a plus important : la préparation de l’élection présidentielle, qui agite tous les égos, même ou peut-être surtout de ceux qui se croient un destin national, parce que, tout simplement, ils n’ont rien d’autre à faire. On ne compte pas le nombre d’hommes politiques, de conseillers, de communicants, de sondeurs qui seraient au chômage, ou trouveraient peut-être enfin à se rendre utiles à leurs concitoyens, si l’élection présidentielle au suffrage universel était supprimée — un avantage supplémentaire et nullement méprisable du retour de la royauté. Jusqu’à Michel Barnier qui, après des décennies de bons et loyaux services à Bruxelles, il est vrai oubliés par sa gestion calamiteuse du Brexit, se rappelle subitement qu’il a un passeport français et se voit en sauveur de la droite, voire de la France, tenant subitement des propos sur nos engagements européens que même Marine Le Pen n’oserait plus tenir ! Ce même Barnier qui, en 2002, publiait pourtant une tribune dans Libération visant à persuader les Français que, compte tenu de ces mêmes engagements européens, il en était fini de la « monarchie républicaine ». Et de nous livrer alors « le grand secret de la présidentielle » — titre de sa tribune — : « La plupart des décisions que les candidats vont s’engager à prendre avec la confiance du peuple ne relèvent plus d’eux seuls. » Et d’ajouter, avec un contentement non feint : « Voilà qui réduit singulièrement, j’en suis conscient, la capacité des candidats à multiplier effets d’annonce et coups de mentons. » [2] L’impudeur de nos hommes politiques est telle que nous pourrions en avoir le souffle coupé, chaque fois que nous en avons un nouveau témoignage ! Que retiendront les livres d’histoire de ces gigantomachies qui auront opposé, cet automne 2021, à droite, Pécresse, Bertrand et Barnier, à gauche, Hidalgo, Le Foll et Montebourg, et chez les Khmers Verts, Yannick Jadot et Sandrine Rousseau ?
UN CAMP NATIONAL ?
Mais le camp national, si tant est que cette expression ait jamais signifié quelque chose, peut-il donner des leçons en la matière ? Les luttes d’égos y sont d’autant plus féroces que son expérience du pouvoir s’évanouit dans les limbes de l’histoire et qu’il ne semble plus avoir d’autre fonction que de faire gagner le candidat du camp mondialiste, le seul qui soit l’ennemi commun, qui est aussi celui de la France. Car l’impression qui se dégage du paysage actuel est que certains se croient manifestement candidats à vie, comme s’ils étaient les propriétaires pitoyables d’un droit à haranguer, une fois tous les cinq ans, les Français en leur assénant quelques vérités que, malheureusement, nos compatriotes oublient en se rendant au bureau de vote, lorsqu’ils s’y rendent. Jean-Frédéric Poisson a décidé de rompre avec cette posture, en y mettant des conditions raisonnables. Voilà qui devrait en inspirer d’autres, du moins si leur engagement pour le bien commun de la nation est sincère. Certes, tous ne semblent pas encore s’être déclarés et des sondages à venir, encore eux, inspireront certainement de bonnes, ou de mauvaises, réactions aux candidats professionnels du camp national. Pensons, dans un premier temps, à tous ceux pour lesquels tutoyer les 5 % ressemble déjà à une performance. Ne dit-on pas que les petites ruisseaux font les grandes rivières ? Ensuite, un gros affluent ne sera pas de trop. Mais une fois tous les candidats déclarés, ce sera la campagne elle-même qui en décidera. Pour une large part, seulement : le patriotisme véritable se mesurera alors à l’aune du désintéressement, voire du sacrifice.
François Marcihac
[1] Nous étions — légèrement — plus confiant, il y a presque un an, mais l’analyse de fond reste la même. Cf notre article du 20 octobre 2020 sur RT France. https://francais.rt.com/opinions/79525-nouvelle-caledonie-sursis-francois-marcilhac
[2] https://www.liberation.fr/tribune/2002/02/12/le-grand-secret-de-la-presidentielle_393537/
Source : https://www.actionfrancaise.net/