Vu sur Boulevard Voltaire par Marie d'Armagnac
Le 7 octobre dernier, les ministres de douze pays frontaliers de l’Union européenne et membres de celle-ci demandaient à Bruxelles de participer au financement d’un mur de protection à leurs frontières pour contenir la vague migratoire qui s’annonce, qui est déjà en actes à la frontière polonaise et lituanienne et orchestrée, là-bas, par la Biélorussie. « Une barrière physique apparaît comme une mesure de protection des frontières efficace, qui sert les intérêts de l’ensemble de l’UE, pas seulement les États membres en première ligne », expliquaient-ils.
Las ! Fidèle à elle-même, l’Union européenne, par la voix d’Ursula von der Leyen citée par Le Figaro, avait estimé urgent de ne rien faire : « J’ai été très claire sur le fait qu’il y a une position commune de longue date de la Commission et du Parlement européens qu’il n’y aura pas de financement de barbelés et de murs », avait-elle déclaré, le 22 octobre dernier.
La commissaire aux Affaires intérieures Ylva Johansson avait même poussé l’arrogance, le mépris et la désinvolture envers ces pays non alignés à la doxa de l’accueil inconsidéré des clandestins jusqu’à dire qu’ils avaient « la possibilité et le droit de construire des clôtures… » (sic) « Mais quant à savoir si on devrait utiliser les fonds européens, qui sont limités, pour financer la construction de clôtures à la place d’autres choses tout aussi importantes, c’est une autre question. »
« L’autre question » s’est très rapidement posée : les convois des clandestins originaires d’Afrique et du Moyen-Orient transitant par la Biélorussie qui leur a accordé généreusement un visa touristique pour qu’ils puissent pénétrer sur le sol européen et y demander l’asile se succèdent depuis l’été. Ils se sont considérablement renforcés. Entre deux et quatre mille « migrants » se sont massés, côté Biélorussie, face aux barbelés érigés par le gouvernement polonais le long de leur frontière commune. Ils tentent de franchir la frontière, poussés par derrière par l’armée biélorusse, et sont refoulés par les 15.000 soldats polonais dépêchés sur place. On a vu, sur les réseaux sociaux, circuler des images où les migrants africains et orientaux, à coups de bâton et de pierre, attaquent les soldats polonais et tentent de percer la clôture provisoire de barbelés, aux cris de Allah Akbar. On ne saurait trouver meilleur symbole de la crise de civilisation qui se joue sous nos yeux.
Face à cela, l’Union européenne est prise au piège de son impuissance. Le député biélorusse Oleg Gaidukevich a, dès lors, beau jeu d’affirmer que « la Pologne viole le droit international, elle doit accepter les migrants, les réinstaller et les traiter conformément aux documents que Varsovie a elle-même ratifiés », comme le rapporte Alain Barluet, dans Le Figaro.
De cet attentisme coupable, mais ô combien prévisible de l’Union européenne, le gouvernement polonais ne fut sans doute pas surpris et décida de voter malgré tout, fin octobre, la construction d’un mur de cinq mètres de haut qui s’étendra sur 180 kilomètres de long et coûtera 353 millions d’euros. La construction de ce mur, qui défendra donc une des frontières extérieures de l’Union européenne, débutera vers le 15 décembre. Un peu gêné aux entournures, le président du Conseil européen Charles Michel semble prendre conscience du problème : « Est-ce qu’il est possible, pour l’Union européenne, de montrer notre solidarité en les aidant à protéger leurs frontières nationales qui sont aussi les frontières européennes ? » explique Le Figaro avec l’AFP.
Clément Beaune, quant à lui, a dit sur France 2 : « Je ne suis pas pour une Europe qui se hérisse de barbelés ou se couvre de murs. » C’est beau comme l’antique… ou comme un aphorisme de Sandrine Rousseau. En attendant, on apprend que la Cour de justice de l’Union européenne a rendu un arrêt condamnant la Hongrie pour avoir adopté une loi qui « prévoit une peine pouvant aller jusqu’à un an de prison pour quiconque apporte son aide à une personne entrée en Hongrie de façon illégale depuis un pays qui n’est pas intégré à l’espace Schengen ». Schizophrénie bruxelloise…
Dans la crise migratoire qui s’annonce, l’Union européenne est en passe, une fois de plus, de perdre toute crédibilité.
À nos dépens.