Écrivant ces lignes à 3 jours de l'échéance du premier tour de l'élection phare de la cinquième république, le chroniqueur n'ignore pas le lot des surprises qui peuvent encore advenir. À vrai dire, si l'on évalue, et si l'on compare la pertinence des programmes et les pronostics sondagiers, on pourrait douter de la santé, et peut-être même de la survie de notre démocratie.
Pas plus que le communisme abstrait, dont rêvait le premier Platon, l'utopie démocratique égalitaire ne devrait échapper à l'examen de ce qu'elle produit concrètement, à balles réelles. Et, comme toutes les constitutions des 193 pays représentés à l'ONU, fonctionnant chacune de manières différentes, celle que nous appliquons tant bien que mal depuis 1958 ne saurait s'imaginer intangible. Aristote, en son temps, pouvait déjà comparer les régimes de quelque 158 cités différentes, et la grande question que l'on se posait était celle de la mutation d'une constitution déclinante vers le régime appelé à lui succéder.
Dans notre pays, tout au plus doit-on dès maintenant souligner l'absence de débat de ces dernières semaines : pour la première fois depuis très longtemps on a écarté systématiquement toute interrogation sur les grands problèmes. Les candidats qui se sont risqués à les aborder ont été rétrogradés dans les sondages. Caracolent en tête, au contraire, ceux qui ne tiendront aucune de leurs promesses. Le président sortant peut bien faire semblant d'esquisser un programme, vague et creux comme à son habitude, il ne fait que rééditer son discours de 2017, démenti par les faits.
Sur les vrais métiers d'un chef d'État, sur l'ordre public, sur la défense des frontières, sur les moyens accordés aux fonctions régaliennes la dégradation de la situation de la France, en 5 ans, aura battu tous les records.
Les trois questions qu'on aurait pu imaginer centrales, celle de l'immigration, de l'insécurité et de l'islamisme ont été évacuées du débat du premier tour. Elles risquent fort de se reporter sur le second, et malheur dès lors au candidat qui ne voudra pas, ou qui ne saura pas les aborder.
Le petit Macron juge par ailleurs scandaleuse la double question du premier ministre polonais. Mateusz Morawiecki, en effet, interroge celui qui se prévaut, ridiculement hélas, de sa qualité de président rotatif et provisoire du conseil européen des États, sur ses entretiens téléphoniques avec Vladimir Poutine. Il lui a donc demandé ce 4 avril : « Monsieur le président Macron, à combien de reprises avez-vous négocié avec Poutine »première question et « qu’avez-vous obtenu ? ». Et, dans sa conférence de presse, il précisait plus loin le sens dramatique de cette question : « Avez-vous arrêté quoi que ce soit ? » La réponse n'est que trop connue : non seulement le chef de l'État français n'a rien empêché, mais il ne semble pas avoir préparé quoi que ce soit et, par sa niaiserie apparente, feinte ou bien réelle, il a probablement encouragé les noirs desseins de son interlocuteur
On peut certes se demander si le chef du gouvernement de Varsovie connaît bien l'Histoire de France, quand il croit pouvoir affirmer que « personne n’a négocié avec Hitler ». Je ne puis que lui conseiller la lecture de mon livre sur L'Alliance Staline Hitler, où sont rassemblés au contraire un certain nombre de faits relatifs aux tractations avec le dictateur précité, non seulement les accords que conclut avec lui en 1939 le maître du Kremlin – que Poutine s'acharne à réhabiliter, – mais aussi de beaucoup d'autres et plus particulièrement de Daladier. Le politicien radical-socialiste, surnommé à l'époque « le taureau du Vaucluse »lui apparaîtra sur bien des points pour le précurseur de l'homme du « en même temps », dans la grande lignée des taureaux à cornes d'escargot.[1]
La seule réponse du petit Macron consiste à dire : « Ces propos sont à la fois infondés et scandaleux, mais ils ne m’étonnent pas » car, dit-il, M. Morawiecki, est soutenu par « un parti d’extrême droite ». Ah le bel argument. Il faudra, je le crains, qu'il en trouve un autre entre les deux tours.
JG Malliarakis
Apostilles
- cf. L'Alliance Staline Hitler que l'on peut commander directement sur la page catalogue du site de l'éditeur.⇑