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Combats pour la liberté scolaire

250813

Alors que se préparait l’échéance, législative et présidentielle, de 2022 votre chroniqueur s’était figuré possible, et considérait comme souhaitable, d’alerter la droite militante sur la question scolaire.[1] Le peu d’écho de cette démarche ne s’explique pas seulement par la médiocrité des moyens de l’auteur de ces lignes, et de ceux qui partageaient ce point de vue : la droite gouvernementale, en effet, s’oppose à cette liberté et partage très largement, dans les faits, une coresponsabilité de l’effondrement éducatif français.

L’évidence de la catastrophe de l’école publique n’échappe à personne et on en épargnera aujourd’hui la démoralisante description au lecteur.

L’état des lieux étant connu, l’historique du naufrage se doit, en revanche d’être rappelé.

Jusqu’aux années 1960, en effet, la France pouvait s’enorgueillir de ses filières d’excellence, et se prévaloir d’une émulation apparente entre secteur public laïc et privé à dominante catholique.

Un cadre, aujourd’hui encore toujours théoriquement en vigueur avait été tracé par la loi Debré de 1959 d’aide à l’enseignement privé. Ce texte entendait mettre fin à la querelle scolaire des années précédentes. Celle-ci avait empoisonné la vie politique de la quatrième république, plombée à partir du vote, en septembre 1951 de la loi dite « des 3 B », Barrachin, Baudry d’Asson, Barrangé. Ce texte, plus symbolique que déterminant, fut mis en œuvre par la politique accommodante d’André Marie, ministre de l’Éducation nationale des glorieux Gouvernements d’alors. Ceux-ci se succédèrent d’août 1951 à juin 1954, sous les présidences bien oubliées de René Pleven, Edgar Faure, Antoine Pinay, René Mayer et Joseph Laniel. Durée moyenne 6 mois. Les socialistes de la SFIO et les démocrates-chrétiens du MRP ne pouvant cohabiter dans les cabinets de troisième force, aucune de ces combinaisons n’eût duré plus de 15 jours sans l’équilibrisme interne symbolisé sans doute par ce représentant du parti radical, au patronyme symétriquement rassurant, attaché à appliquer l’aide à l’école privée catholique.

Il fallait donc en finir avec ce débat qui était parvenu même à provoquer le premier éclatement du parti gaulliste, triomphant aux élections de 1951, mais dont le fondateur lui-même dira en 1953 « le rassemblement était devenu une débandade ».

Rappelé de Colombey, le général fondateur de la cinquième république voulait pour l’école une loi de réconciliation. Il la fit voter dès son retour, mais n’alla pas plus loin.

Il faut lire ainsi le grand débat qui se déroula, quelques années plus tard, au printemps 1967, un an presque jour pour jour avant les événements que l’Histoire a retenus. Pendant deux jours en effet, Alain Peyrefitte soutint, devant l’Assemblée, au nom du gouvernement, une brillante Déclaration sur l'éducation nationale.

Et certes il évoquait un nombre impressionnant de problèmes à résoudre alors d’urgence. [2]

Or, de toutes ces questions, aucune n’a reçu depuis de réponses satisfaisantes : ni pendant son parcours ministériel, interrompu en 1968, ni par la suite, inaugurée cette année-là par Edgar Faure. La seule préoccupation du régime, jusqu’à nos jours, y compris au gré des alternances entre droite et gauche fut en effet toujours de tendre à injecter plus de dépenses publiques en faveur de l’école étatiste, et surtout, philosophiquement, de la « démocratiser ».[3]

Sur ce dernier terrain, la Loi Jospin de 1989, dite Loi d'orientation sur l'éducation, ira encore plus loin. Quoiqu’elle prétendît répondre à des difficultés de recrutement d'enseignants des années 1986-1992, confrontées à l'accroissement des effectifs dans les lycées et les universités, elle se préoccupait d’abord de « l’apprentissage de la vie sociale » et d’une « extension des activités du professeur vers des fonctions d’animation socioculturelle. » L’école devient dès lors un lieu de vie, l’élève a le pouvoir d’en contester l’enseignement, les parents d’en harceler les maîtres, eux-mêmes courageusement lâchés par leur administration en cas de conflit.

Faut-il s’étonner dès lors d’une dégradation que les alternances au pouvoir de la droite chiraquienne n’ont pu ni enrayer, ni encore moins corriger ? En même temps, l’école privée corsetée par les contrats imposés par la loi, s’est retrouvée dans une situation de sous-traitante de l’école publique, tout en voyant s’affadir de plus en plus son identité fondatrice. Seule l’école hors contrat persiste à résister vraiment.

On n’en finirait plus de rappeler les contre-sens commis par la droite. Ainsi ce fut la réforme Haby de juillet 1975 concoctée sous la présidence Giscard, qui institua le collège unique, vieux cheval de bataille du parti communiste. Et en 2005 la loi dite « d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école », du gouvernement Raffarin, dite aussi « loi Fillon » du nom du ministre, prétendant timidement réformer le système éducatif français échoua piteusement.

La droite avait capitalisé l’immense mobilisation des parents d’élèves contre le projet Savary de 1984. Mais dès que le gouvernement Balladur et son ministre Bayrou imaginèrent en 1993 de s’appuyer sur la vieille loi Falloux de 1850 pour développer la liberté de l’enseignement, ce furent cette fois les organisations laïcistes de gauche qui défilèrent dans les rues. Intimidant symétriquement et durablement le pouvoir elles contraignirent dès lors l’apprenti réformateur à se contenter du rôle d’interlocuteur courtois mais pratiquement inactif, qui restera encore le sien dans le gouvernement Juppé, jusqu’en 1997, rôle qu’il semble avoir retrouvé, cette fois comme Premier ministre, en l’an de grâce 2025.

Car depuis sont venus les macroniens « et de droite, et de gauche ». Pendant 5 ans Blanquer aura vainement promis « l’école de la confiance »… avec pas mal d’illusoires complaisances à droite. Il est vrai qu’il venait après Peillon, Benoît Hamon, Najat Vallaud-Belkacem… Mais depuis 2022 le score s’est aggravé : successivement Pap Ndiaye !, Amélie Oudéa-Castéra !!, Gabriel Attal !!!, Nicole Belloubet !!!!, Anne Genetet et enfin Élisabeth Borne !!!!!

Soyons honnêtes et reconnaissons que les ministres ne sont pas seuls responsables.

Certes aujourd’hui une Valérie Pécresse prétend encore « réparer et libérer l'École », en faisant de ce slogan le thème d’un colloque récent. Quand elle s’est présentée avec cette estimable plateforme, elle a réalisé moins de 5 % des voix, tout simplement parce que personne n’y croit, sans un changement de paradigme.

Seul ou presque dans la classe politique française, un Alain Madelin aura constamment osé préconiser ouvertement le chèque scolaire, tel qu’il existe dans plusieurs pays effectivement libres.[4]

Cette voie conduit à préférer, à la subvention aux établissements, encadrés eux-mêmes par des contrats, l’aide contributive aux familles françaises dans le but de concrétiser la méritocratie et de permettre à toutes le libre choix éducatif.

On doit, en effet, partir dans ce domaine du principe énoncé dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, adoptée en 1948 à Paris au Palais de Chaillot par les 58 États Membres. L’article 26 alinéa 3 affirme que « les parents ont, par priorité, le droit de choisir le genre d'éducation à donner à leurs enfants. » Pour que cette énonciation de principe prenne corps, il convient donc de soutenir toutes initiatives libres et il en existe beaucoup plus que ne veulent le reconnaître les politiciens.

On citera ici bien évidemment le développement, depuis 2008 de la Fondation pour l’École, qui se donne pour mission de soutenir, promouvoir et inspirer la création d'écoles privées hors contrat. Créée et reconnue d'utilité publique en 2008, elle est habilitée à abriter des « fondations sous égide » depuis 2011. Elle accorde en 2025 des aides financières à 36 écoles libres.[5]

Et on ne peut que se féliciter de voir ainsi se multiplier les initiatives qui ne manquent pas d’être la cible de controverses dont la provenance est cousue de fil rouge. On ne peut également que souhaiter, dans l’enseignement supérieur, le développement d’établissements tels que l’ISSEP créée à Lyon en 2018 et dont on doit espérer qu’elle rivalisera demain à armes égales avec les Instituts d’Études politiques livrés désormais au wokisme et à l’extrême gauche.

JG Malliarakis

[1] Seule la courageuse revue catholique Lectures françaises accepta alors d’abriter ma prose

[2].cf. Le Monde du 1er juin 1967 « Un large débat sur les problèmes de l'éducation nationale »

[3] Lire à cet égard le petit article « M. Alain Peyrefitte : la démocratisation de l'enseignement est en marche » in Le Monde du 3 juin 1967

[4] cf son livre Pour libérer l'école - L'enseignement à la carte, édité par.Robert Laffont en 1984 cf encore article du Monde du 25 septembre 1999

[5] Lire en ligne son rapport d’activité pour l’année 2024

https://www.insolent.fr/2025/08/combats-pour-la-liberte-scolaire.html

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