Nicolas Gauthier sur BVoltaire
Après avoir euthanasié droite et gauche, les centristes des deux rives ayant rejoint le panache élyséen, Emmanuel Macron laisse néanmoins quelques miettes à Jean-Luc Mélenchon, celles consistant à achever ce qui demeurait encore de forces « progressistes » constituées : rabiots de PS, restes de EELV et spectres du PC. Cet échange de bons procédés est on ne peut plus logique, Mélenchon ayant, à mots à peine couverts, appelé à voter pour Macron, lors de l’entre-deux-tours de l’élection présidentielle. Toute peine mérite salaire, dit-on.
Ainsi, celui qui se verrait bien Premier ministre de l’actuel Président vient-il de lancer, ce lundi 30 mai, le Parlement de la NUPES. Pour commencer, ce discours fédérateur : « Il est impossible de changer la société aussi fondamentalement que nous en avons l’ambition sans une implication populaire de masse. » Mieux, Aurélie Trouvé, ancienne d’ATTAC et présidente du comité Théodule en question, de rappeler que ce même Parlement a vocation à « construire une culture politique commune pour gagner la bataille culturelle […] partout où on peut faire reculer le règne de l’argent et faire primer l’humain ». Voilà qui ne mange pas de pain et pourrait aussi valoir pour… Marine Le Pen ou les anciens de la Manif pour tous.
Bref, Jean-Luc Mélenchon est la dernière roue de secours d’un « système » auquel il prétend s’opposer ; au même titre qu’Aurélie Trouvé, d’ailleurs. En effet, ATTAC fut un mouvement se revendiquant naguère de l'« anti-mondialisme », avant de se recycler dans l'« alter-mondialisme » ; ce qui n’est pas tout à fait la même chose, puisque concept consistant à ne plus lutter contre la mondialisation mais à prôner une « autre » mondialisation, précédant ainsi les contorsions idéologiques d’une France insoumise, à l’origine populiste, mais devenue de plus en plus soumise aux modes sociétales du moment.
Ces déclarations de principe évacuées, demeure un autre facteur, tout aussi essentiel : la main de fer mélenchonienne sur la NUPES, nouvel épigone d’une LFI qu’il voulut, dès l’origine, mouvement « gazeux », sans véritable hiérarchie, sans organigramme précis ; bref, sans la moindre structure susceptible de venir contester ses oukazes à répétitions. La preuve en est l’exclusion brutale de tous ses proches ne partageant pas sa nouvelle ligne « indigéniste »… Mais ainsi vont les trotskistes, dont la marque de fabrique consiste à empiler les assemblées générales, laissant tout loisir à leurs participants de croire qu’ils ont la parole et que cette dernière sera prise en compte, alors que le résultat des délibérations est déjà écrit d’avance. Un peu comme dans la Corse d'image d'Épinal où l’on commençait par proclamer les résultats, faire voter ensuite avant de jeter les urnes à la mer… Ce qui fait dire à Jean-Luc Mélenchon, ancien sénateur socialiste (paradoxe, pour un trotskiste) : « Je souhaite de toutes mes forces que ce Parlement continue, soit constructif et insolent envers le pouvoir en place, même si c’est nous qui l’exerçons. »
À l’occasion de ce tribunal dînatoire, Olivier Faure, capitaine d’un bateau ivre autrefois connu sous le nom de Parti socialiste, et Fabien Roussel, son homologue du radeau de la Méduse sur lequel naviguent à vue les derniers apparatchiks du Parti communiste, ont dû apprécier la blagounette à sa juste valeur, tout en célébrant leur propre suicide. Plumer la volaille socialo-communiste ? Après Mitterrand, Le Pen et Macron, voilà qui est chose faite. Ne restaient plus que les dernières finitions. Voilà chose elle aussi faite. Pour le plus grand bénéfice d’Emmanuel Macron, soit dit en passant, qui, bientôt fort du programme proposé par les Insoumis, pourra agiter ce chiffon rouge, lors des prochaines législatives. Alors, Mélenchon révolutionnaire ? Soyons sérieux. Juste le valet de cette oligarchie qu’il prétend combattre.