Anne Bernet, historienne et critique littéraire, est l’auteur de nombreux ouvrages de grande qualité.
Il y a beaucoup d’ouvrages généraux sur la guerre de Vendée, parce que celle-ci présente une certaine unité et connaît une durée relativement courte et précise : elle commence en mars 1793 et s’achève en mars 1796 avec l’exécution de Charrette. En revanche, la chouannerie est une mosaïque d’insurrections peu coordonnées, discontinues dans le temps et dans l’espace. Ce livre comble une lacune : rassembler en un seul volume l’histoire des chouanneries mainiotte, bretonne et normande, du début à la fin.
Les chouanneries, faute de se rebeller ensemble et en même temps, faute donc de pouvoir constituer, comme la Vendée militaire, une armée catholique et royale, se livrèrent à une guerre de coups de main, de buissons, une guerre de chemins creux et d’embuscades nocturnes, avec la complicité d’une population qui, si elle n’avait pas massivement pris les armes, n’en sympathisait pas moins avec les rebelles. Les chouans ne pouvaient pas être vaincus par les méthodes habituelles, dans de grands affrontements décisifs.
L’insurrection qui, après avoir couvé près de deux ans, éclata à l’été 1792, embrasant le Maine, la Bretagne et la Basse-Normandie, ne prit fin qu’en 1804, avec l’exécution de Cadoudal pour se réveiller pendant les Cent-Jours. Ainsi pendant douze ans, dix départements de l’Ouest menèrent contre la République, puis contre le Consulat, une guérilla obstinée.
Il existait une masse de documents républicains hostiles et souvent mensongers, sans compter les idées reçues bicentenaires, fruits d’une propagande magistralement menée par la police de Fouché, et qui ont fait du mot chouan un synonyme de terroriste, de brigand.
Ce livre réhabilite les chouanneries et raconte avec beaucoup de talent cette épopée faite de héros paysans. Ils se sont battus pour l’honneur et la grandeur de Dieu. Sans eux, sans leur sainte colère et leurs fusils, il n’y aurait peut-être plus jamais eu place en France pour la foi catholique. Sans les chouans dressés devant lui, Bonaparte n’aurait sans doute pas négocié le concordat.
Histoire générale de la chouannerie, Anne Bernet, éditions Perrin, 688 pages, 27 euros
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