Michel Vergé-Franceschi, professeur émérite des universités, a publié de nombreux ouvrages sur l’histoire de la marine. André Zysberg, également professeur émérite des universités, est l’auteur de plusieurs ouvrages sur la société française d’Ancien Régime. Marie-Christine Varachaud, ingénieur émérite du CNRS, est l’auteur de plusieurs publications sur l’histoire du clergé sous l’Ancien Régime. Ils signent ensemble une passionnante étude consacrée aux Marins du Roi-Soleil.
Avec l’arrivée de Louis XIV au pouvoir en 1661, les Provinces-Unies prennent conscience que la France va tenter d’entrer dans le concert des puissances maritimes, de s’octroyer une place entre “les gueux de la mer” et la Royal Navy fondée par Henri VII. Face à la maîtrise conjointe des mers et océans par les marines hollandaise et anglaise, Louis XIV épouse la position d’un François Ier refusant le partage des espaces d’outre-mer entre Espagnols et Portugais.
C’est à tort qu’on présente souvent Colbert comme le père de la Marine royale. De 1661 à 1683, Colbert restaura la flotte d’Etat créée par Richelieu de 1626 à 1642 et en grande partie détruite par les malheurs de la Fronde. Le contrôle de la mer et du littoral a été au cœur de l’âpre lutte entre Colbert et Fouquet. La montée au pouvoir de Colbert suit l’arrestation de Fouquet. En novembre 1669, Louis XIV décide le rétablissement de l’amirauté de France. Cette charge d’amiral de France est confiée au fils du roi, âgé de 2 ans ! Colbert devient secrétaire d’Etat au département de la Marine. Et un nouveau règlement bouleverse la direction de la Marine royale en accordant tout le pouvoir au roi, qui nomme désormais les officiers d’épée et de plume, décide des opérations, ordonne la gestion de la flotte et des bases navales, mettant ainsi au pas les chefs de la flotte qui avaient partie liée avec Fouquet.
Pas de marine sans équipage : il faut des matelots et des officiers mariniers pour faire naviguer les vaisseaux. Les marins de la Marine royale étaient recrutés au moyen d’engagements plus ou moins volontaires. Lorsque ceux-ci faisaient défaut, ce qui survenait presque toujours en temps de guerre, le pouvoir royal recourait à la fermeture des ports, afin de réquisitionner les marins du commerce et de la pêche, qui étaient embarqués sur les vaisseaux du roi. Colbert va instaurer le régime des classes et recruter les équipages au moyen d’un service militaire imposé aux gens de mer.
De Richelieu à Colbert
Le XVIIe siècle fut un tournant décisif sous la férule successive de Richelieu puis Colbert. Pas seulement en ce qui concerne la Marine royale et les bases navales, qui firent l’objet d’un vaste programme de développement, mais aussi de tout ce qui est en lien avec les ports et les activités de navigation. Tant Richelieu que Colbert ont attiré des terriens vers les côtes, recruté en France des techniciens étrangers spécialistes de la construction navale et de métallurgie, valorisé des activités comme la pêche et le commerce maritime, que les gouvernants précédents considéraient avec un certain mépris. Les préjugés sociaux furent également bousculés. Richelieu voulait choisir comme officiers des professionnels de la mer et de la navigation. Colbert fit du corsaire Jean Bart, issu d’une famille de pêcheurs et de pilotes dunkerquois, un anobli et un chef d’escadre de la flotte royale.
Colbert a repris les projets de Richelieu, son modèle. Louis XIV fut son astre. Jamais le culte de la personnalité royale ne fut poussé aussi loin que sous le règne de celui qui avait choisi le soleil rayonnant pour emblème.
Les Marins du Roi-Soleil, Michel Vergé-Franceschi, André Zysberg, Marie-Christine Varachaud, éditions Perrin, 368 pages, 24 euros
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