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Pourquoi Macron ne peut plus différer le référendum migratoire

Les institutions sont-elles au service de la démocratie ou servent-elles à empêcher son expression ? On pourrait résumer ainsi le débat sur le référendum migratoire, un débat qui reprend à l’occasion de l’entrevue entre le président de la République et les chefs de partis.

Car la droite, d'Éric Ciotti à Jordan Bardella, met à cette occasion sur la table le sujet majeur de l’immigration. Et réclame ce référendum qui pourrait, enfin, donner une légitimité démocratique claire et nette à l'action du gouvernant quel qu'il soit qui aurait assez de courage pour s’attaquer à ce dossier interdit depuis quarante ans.

Cette interdiction apparaît de plus en plus insupportable. Selon un sondage de l’institut CSA pour CNews, publié ce 30 août, près de deux Français sur trois (65 %, précisément) souhaitent l’organisation d’un référendum sur l’immigration en France. Le taux de partisans du référendum monte jusqu’à 69 % chez les femmes et même jusqu’à 74 % chez les jeunes de 18 à 24 ans. Si La France insoumise refuse cette expression démocratique (68 % de non chez les proches de LFI), la droite est quasi unanime : 77 % des proches des Républicains approuvent, comme 95 % des proches de Reconquête et 96 % des électeurs RN. Sur le référendum, l’opinion publique en France ne fluctue pas : en mai dernier, un sondage CNews, déjà sur ce serpent de mer, avait montré que sept Français sur dix appelaient de leurs vœux ce référendum migratoire.

À cet appel, les experts dont ce pays regorge répondent invariablement : c’est impossible, notre Constitution ne le permet pas et il faudrait passer au-dessus du droit européen. On plonge alors et on disserte du fameux article 11 de la Constitution française. On évalue la solidité de la camisole de force européenne. Et on conclut que non, décidément, le peuple de France ne peut pas être consulté pour savoir s’il doit accepter ou non une immigration de masse jamais vue dans son Histoire, qui modifie profondément son identité.

À cette question, Frédéric Rouvillois, professeur de droit public à l'université de Paris-Cité et délégué général de la fondation du Pont-Neuf, co-auteur avec Christophe Boutin du livre Le Référendum. Ou comment redonner le pouvoir au peuple aux Éditions La Nouvelle Librairie, répondait récemment en détail sur BV.

Il rappelait que le référendum était une caractéristique forte de la Ve République, en rupture sur ce point avec la IIIe et la IVe qui avaient muselé l’expression du peuple. Ce peuple alors qualifié de « souverain captif ». Il racontait comment les successeurs de De Gaulle avaient étouffé cette voie référendaire. Et constatait, enfin, que l’article 11 consacré au référendum, de fait, peut servir de support pour interdire une consultation des Français sur l’immigration. Mais deux solutions existent, selon lui : une modification de la Constitution, qui nécessite le vote favorable de la majorité du Sénat et de l’Assemblée nationale. Ou une pression sur le Conseil constitutionnel pour qu’il modifie sa jurisprudence. Simple ? Non, mais pas impossible juridiquement. Au-delà, ce référendum apparaît politiquement inévitable.

Du reste, un pays européen est actuellement lancé dans cette démarche. Le 15 juin, les conservateurs au pouvoir en Pologne, très opposés à la réforme du système d’asile en Europe, ont annoncé, par la voix du président Jarosław Kaczyński, leur volonté d’organiser prochainement un référendum sur le sujet. Tout est possible, seuls manquent chez ceux qui donnent volontiers à l'opposition des leçons de démocratie le respect de la volonté populaire et le courage politique. Peut-on encore longtemps bâillonner un peuple français qui gronde sur un enjeu aussi grave ? Le pouvoir doit rendre au peuple la liberté de choisir son avenir.

Marc Baudriller

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