Voici comment l’éditeur présente l’histoire :
La colonie du Docteur Schaefer est un îlot de la vieille Europe, version aryenne, au pied de la Cordillère des Andes. Nous sommes en pleine campagne chilienne où cet ancien brancardier SS a constitué un « paradis » inexpugnable : barbelés, miradors, surveillance électronique, le lieu ressemble à un camp de concentration, en plus bucolique.
L’« expérience » dure depuis plus de quarante ans, depuis que Paul Schaefer et ses fidèles ont quitté une Allemagne ruinée par la guerre. Là, rarement le contrôle des êtres humains aura été poussé aussi loin sur terre : intimité réduite au minimum, contacts limités avec l’extérieur, travail obligatoire.
Aujourd’hui, le « gourou » est en fuite, plusieurs mandats d’arrêt sur le dos, dont un lancé par la France. Mais les siens résistent encore, et leurs soutiens sont puissants. La « Colonie Dignité » a en effet rendu des services : elle a servi de planque aux nazis ; elle a été une base arrière de la dictature où les militaires chiliens ont appris à torturer ; elle a fait du commerce, et même beaucoup d’argent ; c’est aussi parmi ses prairies rappelant la Bavière que le couple Pinochet aimait venir se détendre.
À la manière d’un grand reportage, ce livre fait reconstitue le déroulé des événements et fait rejaillir la vérité d’une affaire proprement démoniaque au moment où les héritiers de l’« abominable Docteur Schaefer » tentent de se refaire une virginité.
Frédéric Ploquin est journaliste à Marianne, spécialisé dans la police, le banditisme et le renseignement. Maria Poblete, journaliste chilienne, est arrivée en France à l’âge de dix ans, peu après le coup d’Etat de Pinochet.
On ne ressort pas indemne à la lecture de ce récit à propos de la « colonie dignidad » de Schaefer, mort en prison le 24 avril 2010, à Santiago du Chili. Car les atrocités commises sur des enfants – sous la menace et la corruption – par ces individus les soignant par ailleurs, sont racontées de manière brute. C’est d’ailleurs devenu une spécialité des éditions Ring, qui aime à faire dans le trash, et parfois le sordide – comme pour Les Démoniaques que nous avions chroniqué il y a quelques semaines.
On aime ou on aime pas, mais c’est un style dans lequel semblent se retrouver pas mal d’auteurs qui publient chez cette maison d’édition. Et un style qui connait un large succès populaire, comme le montrent le positionnement d’un large panel d’ouvrages dans les meilleures ventes d’Amazon.
L’histoire de Paul Shaeffer est en réalité , plus que celle d’un nazi fanatique, celle d’un immonde pédophile, pervers narcissique, et suffisamment charismatique et manipulateur pour avoir rallié à lui de nombreux adeptes, en se servant notamment pour cela de la pratique de la religion et de la charité pour contrôler tout son monde.
Si de nombreux dignitaires nazis ont tenté, après la guerre, de fonder en Amérique du Sud des « colonies », avec pour les unes et les autres des objectifs très divers, la « Colonia » de Schaeffer – bien que rassemblant des opposants au communisme ce qui était tout de même très courant à l’époque – ressemble surtout à une « île du Docteur Moreau » tenue par des individus proprement fous furieux .
Le “docteur” Paul Shaeffer avait été suspecté dès 1947 d’abus sexuels sur des enfants en difficulté. Les plaintes – sans suite – se sont accumulées contre lui pendant de nombreuses années. En 1961, un mandat d’arrêt est enfin diffusé dans toute l’Allemagne. Profitant de certaines de ses amitiés avec d’anciens soldats nazis, il avait alors pu s’enfuir vers l’Amérique du Sud.
Le livre, parfaitement documenté, raconte l’exploitation sexuelle d’enfants de paysans chiliens pauvres par le gourou et son entourage de fanatiques religieux. Mais aussi les soutiens dont il a bénéficié, de la part de l’Etat Chilien – la Colonia s’est transformée sous Pinochet en véritable centre de torture – de la CIA ou de riches entrepreneurs.
Il s’agit d’une enquête, durant laquelle les journalistes sont partis à la rencontre des familles de victimes avant de remonter toute la procédure judiciaire. Et de permettre au lecteur de se rendre compte de l’influence et du réseau autour de cette toute petite secte, perdue au pied de la Cordillère des Andes.
Un film, sorti en 2016 et intitulé « Colonia » traite par ailleurs de cette histoire. A noter que l’Allemagne devrait prochainement déclassifier les archives concernant la « Colonia Dignidad », ce qui donnera de nouvelles informations à ce sujet.
[cc] Breizh-info.com, 2016 Dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine