Des centaines de milliers d’hommes à la conquête de l’Europe
Mehmed IV confie la conduite de ses armées et de ses conquêtes à son grand vizir, Kara Mustafa. Celui-ci rassemble à Andrinople (aujourd'hui Edirne) près de 160.000 hommes venus de chaque recoin de l’immense Empire ottoman. Le 31 mars 1683, le grand vizir lance ses troupes vers l'Europe, déterminées à s'emparer de Vienne, puis, si Allah le veut, de Prague, de la Rhénanie et, enfin, de Rome. Alerté, l'empereur Léopold Ier d'Autriche forme une alliance avec la Pologne pour constituer en urgence une armée. Mais seuls 10.000 hommes peuvent être réunis pour la défense de Vienne. Le 14 juillet, les troupes ottomanes arrivent aux portes de la ville. À cet instant, l'Europe retient son souffle : Vienne tombera-t-elle et, avec elle, l’Occident ?
Vienne, seule et assiégée
Kara Mustafa fait encercler la ville autrichienne par ses troupes, coupant ainsi toute possibilité de fuite. Il ordonne également de creuser de profondes tranchées, défendues par ses farouches janissaires, tandis que la redoutable artillerie ottomane pilonne sans relâche les remparts autrichiens. Du côté des assiégés, l’espoir s’amenuise. Quelques sorties héroïques sont tentées pour repousser les assaillants, qui cherchent à poser des mines sous les murs de la ville, mais chaque contre-attaque coûte un lourd tribut en vies humaines. Ainsi, malgré leur bravoure, les Autrichiens savent que leur seule chance de victoire repose sur la venue d'une armée de secours provenant de l'extérieur. Celle-ci progresse, mais son arrivée se fait attendre. En effet, rassembler suffisamment de troupes prend du temps et l'armée de secours doit d'abord affronter les armées ottomanes détachées du siège de Vienne et qui patrouillent en Europe. Entre-temps, Kara Mustafa continue de resserrer son étau sur la ville autrichienne. Ainsi, le 9 septembre 1683, il parvient enfin à ouvrir quelques brèches dans les murailles. La victoire semble alors à portée de main.
Une victoire miraculeuse
Comme par miracle, le 12 septembre 1683, Charles de Lorraine et le roi de Pologne, Jean III Sobieski, arrivent enfin près de Vienne avec une armée de quelque 50.000 hommes, composée d'Autrichiens, d'Allemands, de Polonais, de Suédois et d'Italiens. Les Français, eux, manqueront à l'appel. L'attaque est lancée contre les troupes ottomanes, qui se retrouvent rapidement prises au piège entre leurs nouveaux assaillants et l'artillerie viennoise. Les rares survivants de l'armée de Mehmed IV fuient le champ de bataille, abandonnant armes et provisions. Kara Mustafa rentre honteux à Belgrade et est exécuté sur l'ordre du sultan à la suite de sa cuisante défaite.
Ainsi, ce 12 septembre 1683, une Europe unie a su mettre de côté ses divergences politiques pour vaincre un ennemi commun et mortel. Comme le souligne Paolo Cau, spécialiste de l'Histoire militaire, dans son ouvrage Les 100 plus grandes batailles de l'Histoire, « les troupes du sultan ne se présenteront jamais plus sous les murs de la capitale des Habsbourg ». Car depuis cette défaite, l'Empire ottoman n'a plus entrepris de conquêtes de cette envergure contre la chrétienté et son déclin s'est prolongé jusqu'à sa chute finale en 1922.
Eric de Mascureau
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