Pourtant, dans le même week-end, non loin de Rennes, paradis des punks à chiens et des éternels étudiants en sciences molles, une petite étincelle de patriotisme, de grandeur et d’abnégation a brillé. Une de ces petites lumières qui s’allument à date fixe, comme une bougie dans le brouillard, pour rappeler que tout n’est pas perdu tant que l’idée de la France bat encore dans les cœurs généreux.
Ce week-end, en effet, c’était la cérémonie du Triomphe aux Écoles de Coëtquidan. Ce vaste camp militaire, situé en pleine forêt de Brocéliande, entre Rennes et Vannes, abrite les trois écoles de formation des officiers de l’armée de Terre. L’école militaire des aspirants de Coëtquidan (EMAC) recrute des officiers sous contrat à l’issue de leur cursus universitaire civil. L’école militaire interarmes (EMIA) sélectionne, sur concours, les meilleurs officiers de l’armée de Terre pour en faire des lieutenants. Quant à l’école spéciale militaire de Saint-Cyr (ESM), qui doit son nom à la ville de Saint-Cyr-L’Ecole (78) où elle demeura longtemps, elle accueille des élèves de classe préparatoire qui passent un concours du niveau des grandes écoles scientifiques, économiques ou littéraires. C’est peut-être la plus connue des trois. Il faut ajouter à ces trois écoles de formation initiale les officiers des domaines de spécialité (ODS), sous-officiers anciens et méritants qui passent un autre concours, et dont l’expérience les dispense d’une instruction longue, réduisant leur temps de formation à une petite semaine, durant laquelle ces adjudants ou adjudants-chefs à la riche carrière opérationnelle apprennent essentiellement à défiler avec un sabre…
Ce week-end, donc, trois nouvelles promotions de ces trois écoles d’officiers ont été baptisées, selon un cérémonial presque immuable, dans la nuit bretonne et sous les projecteurs. Un genou en terre, les élèves officiers ont reçu leur nom de promotion, celui d’un parrain illustre, entré avant eux dans la carrière des armes, et dont le parcours les guidera dans leurs choix. Pour les ODS, ce sera le général André Lautier, un officier général issu du rang, héros de l’Indochine. Pour l’EMIA, c’est le général Girot de Langlade, aviateur, cavalier, héros des deux guerres mondiales et, entre autres, figure de la légendaire 2ème DB de Leclerc. Enfin, l’ESM a choisi le général Desaix, qui, né dans une famille noble, s’illustra cependant au service de la république, puis de l’Empire –notamment durant la campagne d’Egypte- avant de mourir à la bataille de Marengo, à 31 ans.
Tant qu’il y aura des jeunes gens de vingt à trente ans, et d’anciens sous-officiers prêts à remettre en jeu leurs prérogatives chèrement conquises, pour recevoir le baptême qui les fait accéder à l’épaulette, et servir leur pays, leur cher pays à qui des « gouvernants de rencontre », comme disait de Gaulle, font subir les derniers outrages, non, tout ne sera pas perdu. Cela méritait peut-être un entrefilet. La grande presse n’y a pas pensé. Que cet oubli soit ici, modestement, réparé.