Sur le papier, les juges ne sont que « la bouche de la loi ». Ce qui signifie que l’ordre normal des choses est qu’en premier lieu c’est le peuple qui décide parce qu’il est souverain. Celui-ci désigne ses représentants qui ont la charge de faire la loi. Enfin, il y a les juges qui sont chargés de rendre la justice, au nom du peuple, en veillant à l’application et au respect des lois votées par les représentants du peuple.
Depuis le début des années 70, en France, mais aussi en Europe, un glissement s’est opéré d’abord de manière imperceptible puis, les années passant, de manière de plus en plus importante et visible. Aujourd’hui ce bel agencement initial des choses a été mis cul par-dessus tête et nous sommes en droit d’affirmer que l’ordre naturel des choses a été totalement inversé. Les juges décident et imposent leurs conceptions et positions à la classe politique ; quant au peuple, il n’a même plus le droit à la parole. Ce nouvel ordre des choses, c’est ce qui se nomme « l’État de droit ». Et cet État de droit est un véritable danger pour la démocratie, c’est-à-dire que la République, dont le principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple, est véritablement menacé par cet État de droit.
Plusieurs structures judiciaires ont pris la main en Europe et se sont imposées au pouvoir politique : au plan européen ce sont la CEDH (convention européenne des droits de l’homme) et la Cour européenne de justice. En France, le Conseil d’État et le Conseil constitutionnel veillent au respect des textes européens et imposent également leurs vues au pouvoir politique à l’occasion du vote des lois. À tel point qu’on voit maintenant de manière courante les politiques écrire leurs projets de textes de lois en fonction de ce qu’ils pensent que va être l’opinion du Conseil constitutionnel et du Conseil d’État. D’ailleurs, si le texte voté ne convient pas à l’une de ces cours, elle vide le texte de sa substance, comme ce fut le cas début 2024 avec la loi sur l’immigration parce que le Conseil constitutionnel, élu par personne, avait à sa tête Laurent Fabius pro-migrants qui a donc supprimé tout ce qui le dérangeait dans la loi. On peut donc affirmer que depuis le début des années 70, cette triste évolution s’est soldée au final par l’instauration de ce qu’il faut bien appeler le « gouvernement des juges ».
Sauf que cette mutation du pouvoir du politique vers les juges est très grave et a des conséquences qui vont devenir de plus en plus problématiques si nous ne sommes pas capables d’en revenir à un système dans lequel les juges ne seront plus que « la bouche de la loi » et pas ceux qui décident. Un exemple va nous permettre de démontrer le caractère gravissime de la situation et l’extrême urgence d’en revenir au système normal. Cet exemple nous est fourni par l’Italie.
À moultes reprises, dans de nombreux articles, j’ai dénoncé le rôle et les actions des ONG pro-migrants qui sont les complices des mafias de passeurs et font en sorte d’amener sur nos côtes des dizaines de milliers de migrants chaque année, en arrivant notamment à Lampedusa (petite île italienne… donc en Europe). En 2019, Matteo Salvini était le ministre de l’Intérieur en Italie. Lassé par ces actions inacceptables des ONG, il a décidé d’empêcher l’ONG espagnole Open Arms d’accoster dans un port italien. À bord il restait 83 migrants sur les 164 qui étaient sur l’embarcation (les mineurs, femmes enceintes et malades ont été débarqués). L’ONG a refusé toutes les aides proposées par son gouvernement, l’Espagne, pour y débarquer. Ils voulaient aller en Italie. Le procureur sicilien Calogero Ferrara a déclaré « il y a un principe clé qui ne peut être contesté : entre les droits de l’homme et la protection de la souveraineté de l’État, ce sont les droits de l’homme qui doivent prévaloir dans notre système juridique, heureusement démocratique. »
Il accuse donc le ministre d’abus de pouvoir par sa politique des « ports fermés ». Et le ministre de l’Intérieur se retrouve traîné en justice. Le parquet de Palerme a requis à l’époque six ans de réclusion contre le ministre Matteo Salvini accusé de « séquestration de personnes », pour avoir empêché le débarquement de tous les 147 migrants du navire ONG espagnol. Le procès a débuté en 2021. Le tribunal a finalement décidé de relaxer le ministre, estimant que les faits reprochés n’étaient pas établis. Matteo Salvini déclarera à l’issue du procès qui le relaxera : « J’ai fait plus de trente audiences, la cour m’a acquitté parce que le fait ne subsiste pas en reconnaissant que défendre les frontières n’est pas un crime. Évidemment certains ne se résignent pas, mais allons de l’avant : je ne m’inquiète pas. ». Incroyable mais vrai… il a donc été traîné en justice en sa qualité de ministre pour avoir défendu les frontières de son pays, contre une ONG qui prétendait pouvoir faire débarquer des migrants, y compris contre la décision des autorités du pays. Et il s’est trouvé des juges et procureurs pour poursuivre le ministre, ce qui était déjà fort de café. Mais il y a plus fort encore.
Matteo Salvini, vice-président du Gouvernement italien et ministre de l’Intérieur, avait été relaxé le 20 décembre 2024 par le tribunal de Palerme.
Sauf qu’en Italie existe une procédure appelée « recours per saltum », extrêmement peu commune et qui n’a été utilisée que très rarement. Par cette procédure d’action directe, fondée sur la conviction que le jugement est erroné non pas dans les faits, mais dans les principes de droit, un magistrat peut sauter l’appel et se pourvoir directement en cassation. C’est ce que vient de faire le procureur de Palerme, Maurizio de Lucia, qui ne se résout pas à la sentence de ses collègues, et invoque une lecture erronée des normes internationales, soutenant qu’« on ne peut considérer que l’État responsable est toujours l’État du pavillon (espagnol dans ce cas), lors d’un événement de danger, les dispositions de la Convention SAR, fondées sur le principe de la plus grande rapidité et efficacité, prévalent ». Pourtant le jugement d’acquittement indiquait : « il n’y avait aucun risque de naufrage du navire » et ce dernier se trouvait plus proche des côtes tunisiennes et maltaises au début de sa course. ». C’est donc à l’évidence un acharnement judiciaire mené par un juge « rouge » pro-migrants, comme nous en avons en France avec les juges du syndicat de la magistrature. Le cœur du recours est une prétendue violation de l’article 13 de la Constitution italienne, concernant l’inviolabilité de la liberté personnelle. Selon les magistrats de Palerme, « la limitation de la liberté personnelle d’autrui ne peut licitement se réaliser que par un acte motivé de l’autorité judiciaire (…) Les migrants ont sans doute subi une privation arbitraire de leur liberté personnelle. ».
En agissant ainsi, ce juge affiche ouvertement son refus de prise en compte de la notion de frontière et déclare la primauté du droit individuel sur celui d’un pays. C’est donc une atteinte pure et simple à la démocratie. Voilà un excellent exemple permettant de mesurer le danger que représente le fameux « État de droit » qui est un véritable cheval de Troie dont l’objet est sans équivoque de torpiller nos démocraties, de s’asseoir sur les frontières et les volontés de chaque peuple en imposant le primat de l’individuel sur le collectif. De manière indiscutable, nous voyons là comment les juges entendent imposer leurs opinions aux hommes politiques, aux pays et à leurs populations.
Reste que le lecteur aurait tort de croire que cette affaire italienne est un cas isolé. Tout en Europe est fait pour que ces conceptions triomphent et s’imposent partout. La meilleure preuve en a été fournie en juin 2022 en Angleterre. Le Premier ministre Boris Johnson avait décidé d’expulser des migrants vers le Rwanda avec lequel il avait passé un accord. Des associations pro-migrants ont engagé des procédures devant la CEDH. Et le jour même du départ, le 15 juin 2022, la CEDH a rendu un avis interdisant à ce vol de décoller au motif de l’intérêt personnel de chaque migrant supérieur à celui de l’Angleterre. Et pourtant l’Angleterre a quitté l’Union européenne. Mais surprise… cela ne suffit pas. Il faut aussi quitter la CEDH qui est une structure indépendante de l’Europe. Donc, me direz-vous, chaque pays n’a qu’à quitter la CEDH et il retrouvera sa liberté. Il se trouve que non… l’UE est bien plus tordue que cela. Dans le traité de Lisbonne, une clause a été rajoutée. Tout pays membre de l’UE ne peut pas quitter la CEDH. C’est ceinture et bretelles !
Tout est fait pour empêcher les pays et leurs peuples de décider ce qu’ils veulent. L’UE veille et a tout prévu pour imposer ses règles qui sont en fait des contraintes. C’est cela l’État de droit… une véritable dictature. Une camisole de force qui enserre les démocraties. La seule solution pour sortir de ce bourbier c’est d’organiser un référendum qui affirmera que c’est la position du peuple qui est prédominante, ce qui obligera les juges à la respecter. L’autre solution c’est d’activer l’article 50 du traité de Lisbonne pour sortir de l’UE et demander également à sortir de la CEDH. L’affaire n’est pas gagnée…
Pour conclure, je vais citer Mitterrand (une fois n’est pas coutume). Lors de son dernier conseil des ministre il déclara : « Méfiez-vous des juges, ils ont tué la monarchie, ils tueront la République ». Pour une fois, on ne peut que lui donner raison.
Bernard GERMAIN
https://ripostelaique.com/les-juges-de-gauche-vont-ils-reussir-a-tuer-la-democratie.html