Un article de Léon Camus.
Vendredi 11 janvier la Présidence de la République, sans en avoir informé préalablement le Parlement, prenait la responsabilité d’engager la France — seule — dans une intervention militaire au Mali. Opération aussitôt qualifiée de « guerre contre le terrorisme » par les caisses de résonance médiatiques. Dès les premières heures, les bombardements aériens et les combats terrestres autour de l’agglomération de Konna dans le centre du pays faisaient quelque 148 morts chez les rebelles et parmi les forces gouvernementales maliennes. Du côté des Français, un pilote d’hélicoptère de combat Gazelle, le lieutenant Damien Boiteux du 4e régiment d’hélicoptères de combat de Pau, était mortellement atteint « par un tir d’arme légère », dixit le commandement, lors d’un raid aéroporté contre une colonne de véhicules 4X4… Simultanément dans la nuit du vendredi au samedi, en Somalie cette fois, une unité du service Action de la Direction générale de la sécurité extérieure tentait de délivrer l’agent français Denis Allex, otage depuis cinq années après sa capture à Mogadiscio en juillet 2009. Opération désastreuse qui se soldera par la perte de deux hommes dont les corps seront abandonnés sur le terrain aux mains des miliciens d’Al-Shabaad. Cinq jours plus tard, alors que le Premier ministre va enfin consentir à se présenter devant l’Assemblée nationale, les islamistes ont déjà repris l’initiative et lancé une contre-offensive sur la localité de Djabli à 400 km au nord ouest de Bamako. Pendant ce temps, le président Hollande ayant pris brutalement conscience de l’isolement militaire et matériel de la France, se rendait le 15 janvier à Abou Dhabi pour y solliciter des aides et des fonds de la part des Émirats arabes unis, cela tandis que le quotidien 20 Minutes s’interrogeait — déjà — le matin suivant, sur la « stratégie que la France devrait adopter pour éviter le bourbier ».
UNE GUERRE LOW COST A LA HAUTEUR DES GLOIRES PRESIDENTIELLES
Certes le Commandement des Opérations Spéciales basé à Ouagadougou, au Burkina Faso, avait anticipé cette nouvelle « guerre asymétrique » en prépositionnant des forces spéciales au Mali. Combien au départ ? 200 ou 300 biffins du 1er Régiment parachutiste d’infanterie de marine et du 13e Régiment de dragons parachutistes ? Avec pour logistique aérienne les hélicoptères du COS (Gazelle, Cougar, Puma, Tigre), trois Mirage 2000D sur les six du dispositif Épervier basé à N’Djamena et en sus, deux Mirage F-1, trois C135, un C130 Hercule et un C160 Transall !? Outre le recours à un drone Harfang stationné au Niger à Niamey, des missions sont aussi apparemment effectuées à partir de la France par des Rafale ! [meretmarine.com]. En réserve le 2e Régiment étranger parachutistes — 1 200 hommes — basé à Calvi, mais que l’on annonce devoir sauter de façon imminente sur Tombouctou ! De maigres forces qui donnent la dimension d’une opération fabriquée à la petite semaine, et à la mesure d’une France en pleine déconfiture morale, financière et politique… Utile au demeurant à la cuisine sondagière d’une présidence en mal de notoriété : un sondage Harris Interactive ne vient-il pas d’établir qu’une majorité de Français — 63 % — seraient favorables à l’intervention de l’armée au nord du Mali. Des Hexagonaux à la vue courte, ou magistralement désinformés… Les deux mon capitaine !
À titre de comparaison, Sarkozy qui n’avait pas atteint aussi rapidement l’enfer du désaveu collectif que Hollande — c’est-à-dire en six mois — n’est cependant jamais parvenu à redresser la barre des sondages en revêtant les habits de chef de guerre, encore moins à remonter dans l’estime de ses concitoyens en dépit d’une naissance particulièrement opportune et de sa « sale guerre » libyenne, laquelle, il est vrai, aura été en effet assez sordide pour avoir entre autres péniblement traîné en longueur.
Au demeurant l’opération malienne, mal conçue, mal calculée devait en principe et au départ relever de la « guerre éclair ». Or il est maintenant évident, en dépit des communiqués triomphalistes du ministère de la Défense, qu’un vent de panique commence à se propager dans les états majors politiques — notons l’unanimité de la classe politique, Marine Le Pen incluse, pour emboîter le pas à la présidence sur des chemins aussi tortueux qu’hasardeux —lesquels se préparent psychologiquement à un engagement de longue durée.
À ce titre, les effectifs français viennent d’être portés à 800 hommes et Paris bat vainement le rappel de ses alliés européens, ceux-ci ne se bousculant pas pour apporter leur contribution à l’aventure. En fait ce sont maintenant environ 1 700 personnels qui participent à l’opération, étiage qui devrait atteindre rapidement le chiffre de 2 500… comme vient de l’annoncer sans ambages Hollande ce mardi 15 janvier. Des blindés d’ailleurs sont d’ailleurs arrivés en renfort de Côte d’Ivoire dans la nuit de lundi à mardi. Une situation par conséquent très loin d’être aussi limpide — et le chemin aussi dégagé — qu’il ne semblait de prime abord. Parce que la contre-offensive islamiste sur Djabali montre que, faute d’avoir subi des pertes sévères, les ennemis désignés de l’État français se sont simplement dispersés. De mauvaises langues vont jusqu’à dire que les pertes hexagonales seraient en fait largement minorées et que ce ne serait pas un hélicoptère mais deux qui auraient été abattus dès le premier jour, non par des armes légères, mais grâce à des missiles portables provenant des arsenaux de feu Kadhafi. Ce qui change la donne et n’avait apparemment pas du tout été prévu.
LIBYE-MALI, LE RETOUR DE BATON
Parce qu’enfin quelle chanson nous chante-t-on ? Les armes aux mains des islamistes maliens ne sont pas tombées du ciel : si Paris n’avait pas, à l’instigation pressante de l’agitateur BH Lévy, livré contre la Jamahiriya libyenne une guerre du fort au faible en compagnie de ses acolytes euratlantistes, les armes aujourd’hui utilisées contre nos troupes seraient sagement restées enfermées dans leurs bunkers. […]
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