Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Le droit pour tous

Jour funeste pour les familles de France, le 23 avril 2013 a sonné le glas de la famille biologique, conçue, depuis l’aube des temps, comme l’union d’un homme et d’une femme, en vue de la procréation, exception faite des cas avérés de polygamie dans certaines sociétés traditionnelles.

Reste le recours au Conseil constitutionnel qui a été saisi, le même jour, par 60 députés et 60 sénateurs. Deux questions se posent, alors. S’il existe, au sein du bloc de constitutionnalité de la Ve République, des dispositions permettant d’invalider la loi Taubira, le Conseil constitutionnel aura-t-il la volonté et le courage de s’appuyer sur celles-ci afin d’invalider cette loi inique ? Si la loi devait être promulguée, une nouvelle majorité de « droite » pourra-t-elle revenir dessus en l’abrogeant ?

La loi pour quelques-uns

On ne sait si les membres, nommés ou salariés, de la rue Montpensier lisent L’Action Française 2000 (on peut raisonnablement penser que non), mais ils trouveraient dans ce modeste article, quelques pistes de réflexions pour les aider dans leur décision. D’évidence, les motifs d’inconstitutionnalité ne manquent pas. D’abord, la loi « ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe », ainsi qu’elle s’intitule, du fait même qu’elle est une loi, c’est-à-dire, un acte juridique unilatéral adopté par le pouvoir législatif selon une procédure particulière (définition organique et formelle), ne peut avoir pour effet (en raison, précisément, de son objet spécifique) de s’appliquer prétendument à tous, tandis qu’elle concerne une minorité. En d’autres termes, la loi est générale et impersonnelle. Une fois n’est pas coutume, on citera le genevois Rousseau pour qui « la loi est l’expression de la volonté générale » car « il n’y a point de volonté générale sur un objet particulier » (définition matérielle de la loi). Certes, la jurisprudence constitutionnelle, dans sa manie de toujours torturer les concepts, a quelque peu nuancé cette approche rigoureuse. Ainsi, a-t-elle pu reconnaître la validité des lois d’amnistie ou des lois de nationalisation de certaines entreprises. Mais c’est à la condition que la loi s’appuie sur des « critères objectifs » tirés de l’intérêt général. En quoi l’homosexualité, comportement sexuel d’ordre privé intéresse-t-il l’intérêt général ? Par ailleurs, les rarissimes références constitutionnelles mentionnant la « famille » (à l’instar de l’alinéa 10 du préambule de la Constitution de 1946 qui dispose que « la nation assure à (…) la famille les conditions nécessaires à [son] développement »), par leur antériorité à la loi Taubira, loi ordinaire, visaient implicitement mais nécessairement la famille composée d’un homme et d’une femme. Soutenir le contraire relève soit du sophisme, soit de l’anachronisme.

En conséquence, cette loi serait inconstitutionnelle en ce que sa conformité serait subordonnée, en toute logique, à une révision préalable de la Constitution. Enfin, la loi comporte un vice rédhibitoire d’inconstitutionnalité car son article 7 (lequel est en diamétrale contradiction avec son article 8, puisque, à la fois, un enfant peut être adopté de façon plénière par le conjoint [art. 7] et, s’il a fait l’objet d’une précédente adoption simple ou plénière, ne peut être adopté par le conjoint que de façon…simple [art.8] (! ?) introduit une rupture d’égalité entre les enfants adoptés plénièrement. En effet, ces enfants adoptés par des parents hétérosexuels se voient réellement offrir une famille dont ils ont été privée, alors que ceux adoptés par des invertis sont délibérément coupés d’une filiation symbolique en vue de satisfaire des caprices d’égo. Comme le souligne la juriste Aude Mirkovic, « l’enfant adopté par deux personnes de même sexe est, en réalité, deux fois privé de parents : une première fois par la vie, une seconde fois par la loi ».

L’annulation pour tous

Dans un article à Nouvelles de France (23 avril), nous avions indiqué que l’UMP se déchirait sur la question de savoir ce qu’il adviendrait de cette loi, une fois son retour au pouvoir. On notera, liminairement, qu’il ne fait visiblement aucun doute dans l’esprit de ses cadres, nonobstant le recours déposé, par certains d’entre eux, devant le juge constitutionnel, que cette loi sera validée. Il est à craindre, en effet qu’elle le sera, à moins qu’elle n’achoppe sur l’épineuse question de l’adoption (si ce devait être le cas, les « Sages » n’en aboliraient pas pour autant l’article 1er de la loi sur la reconnaissance du « mariage » homosexuel). Mais d’autres, ont ouvertement appelé, comme l’ex-frontiste, Guillaume Peltier, à son abrogation. Juridiquement, cette dernière emporte suppression de la loi mais exclusivement pour l’avenir, laissant, ainsi, persister ses effets passés. Il ne serait pourtant pas difficile, d’en prononcer carrément l’annulation (c’est-à-dire avec effet rétroactif), pour peu que l’on ait un peu de courage. Certes, on pourra toujours objecter qu’une telle rétroactivité serait illégale au regard des principes généraux du droit français. Ce à quoi l’on rétorquera que la loi Taubira étant affectée, dès sa conception, d’un vice incoercible d’irrégularité, son effacement ex ante et ex post de l’ordre juridique constituerait une équitable compensation. Mais, une telle hypothèse ne serait sérieusement envisageable que si elle était soumise à referendum.

En effet, il convient d’opposer à une loi parlementaire, la force supérieure de la légitimité du peuple. Ce qui vaudrait dans une monarchie serait, a fortiori, valable en démocratie. La constitutionnaliste, Anne-Marie Le Pourhiet estime, à bon droit, que « les éléments essentiels du contrat social d’une nation ne [peuvent] être changés par une simple majorité passagère dans une ou deux chambres de représentants élus, mais une telle responsabilité [doit revenir] directement aux citoyens eux-mêmes ». Ainsi, même si la loi Taubira est déclarée conforme à la Constitution de 1958, il appartiendra, ainsi que l’écrivait le Doyen Vedel, « au souverain, à la condition de paraître en majesté comme Constituant (…) dans une sorte de lit de justice, [de] briser [l’arrêt du juge constitutionnel] ».

aleucate@yahoo.fr - L’Action Française n° 2862

* Aristide Leucate, rédacteurs à L’Action Française, est spécialiste des questions politiques et de droit constitutionnel

Les commentaires sont fermés.