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Erdogan, la Turquie et le néo-ottomanisme face à une Europe déboussolée (arch 2011)

Nous avions déjà maintes fois abordé le problème turc, dans de multiples allocutions antérieures : pour souligner le conflit millénaire qui oppose l’Europe, héritière des « Romaniae » romaine et byzantine, à la Turquie, héritière et de tous les mouvements vers l’ouest amorcés dans l’histoire par les peuples ouralo-altaïques de la steppe centre-asiatique et du califat islamique ; ensuite ppour analyser les ingrédients de la mosaïque turque actuelle et les conflictualités qui en découlent (47 groupes ethniques et religieux, dans toutes les combinatoires possibles !).  Aujourd’hui, nous analyserons plus en détail l’émergence d’un nouvel islamisme « démocratique » ou « modéré » selon le langage des médias favorables à l’entrée de la Turquie dans l’Union Européenne. D’Erbakan à Erdogan, cet islamisme particulier a des racines, que nous évoquerons parce qu’elles nous expliquent bien des positions prises récemment par le gouvernement turc, et qu’elles se combinent habilement avec le néo-ottomanisme du nouveau ministre des affaires étrangères, Ahmet Davutoglu. Cette diplomatie néo-ottomane se déploie tous azimuts : vers le Croissant fertile, vers les Balkans, l’Egypte et la Libye, le Caucase, etc., suscitant en bout de course plus d’inimitiés que d’alliances durables. Le glissement vers l’islamisme erdoganien et le néo-ottomanisme davutoglien implique une liquidation de l’héritage kémaliste et laïque et du nationalisme turco-centré ou panturquiste. Cette liquidation s’est manifestée lors de la fameuse affaire de l’Ergenekon, ce groupe de militaires fidèles au double héritage kémaliste et panturquiste (ou pantouranien). Autre avatar inquiétant de cette mutation importante dans les idéologies dominantes qui structurent la machine étatique turque :la politique d’immixtion dans les affaires intérieures des Etats-hôtes, qui accueillent une forte immigration turque, suite aux deux discours d’Erdogan tenus en Allemagne, à Cologne et à Düsseldorf, en 2008 et en 2011. La nouvelle idéologie dominante à Ankara rompt avec la retenue traditionnelle des cercles diplomatiques, exactement comme les néoconservateurs américains avaient fustigé la diplomatie des Etats européens et de la Russie lors de l’intervention de 2003 en Irak. Le « mobbing » contre la Suisse s’inscrit également dans cet abandon, par les Etats marqués par l’un ou l’autre fondamentalisme idéologique ou religieux, des critères de comportement habituels de la diplomatie. La politique d’immixtion , inacceptable pour ceux qui entendent préserver la souveraineté pleine et entière des Etats, conduit à des phénomènes inquiétants de désagrégation sociale dans les Etats qui ont jadis accepté des migrants d’origine turque. Nous analyserons ces phénomènes de désagrégation. Nous bénéficierons, pour étayer nos arguments, d’un dossier exceptionnel, composé par  Jürgen P. Fuss, ancien éditeur du seul hebdomadaire turc en langue allemande (Aktuelle Türkische Rundschau), revenu dans son pays natal, après que le système Erdogan se soit bétonné en Turquie, ne permettant plus une réelle liberté d’expression et de ton. Ce livre sera présenté à un public non germanophone pour la première fois depuis sa parution, au printemps 2011.
Robert Steuckers

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