De Guillaume Bernard, interrogé par JOL Press :
"Ce sont des raisons liées aux intérêts électifs et financiers des partis qui bloquent la recomposition du système partisan. Les cadres et élus des partis ont naturellement peur que la réorganisation de l’échiquier politique ne conduise à une redistribution des postes, et ce à leur détriment. Comme nombre d’élus (et de leurs assistants) sont des professionnels de la politique, ils auraient des difficultés à se réintégrer dans la vie active réelle…
A part pour quelques personnalités (nationales et/ou locales), c’est l’investiture (l’étiquette) qui fait l’élu ; les candidats ont donc le plus souvent besoin d’appartenir à un parti. En outre, le financement des partis repose essentiellement sur le nombre de voix obtenues lors du premier tour des élections législatives. Différents courants politiques (incapables d’être à eux seuls majoritaires) et personnalités ont donc intérêt à s’associer (même s’ils ne s’apprécient guère) pour avoir une envergure nationale.
Par conséquent, la force d’inertie d’un système partisan est assez grande. Celui-ci ne se transforme généralement en profondeur qu’à l’occasion d’un changement de régime (institutionnel) ou de bouleversements (sociaux) d’envergure. La IVe République a été facilement balayée en 1958 car, aux législatives de 1956, seul un électeur sur deux s’était prononcé pour un des partis incarnant le régime.
D’un point de vue idéologique, il semble que nous vivions la fin cycle (celui du mouvement sinistrogyre) et la naissance d’un nouveau, ce que j’ai proposé d’appeler le « mouvement dextrogyre » né de la conjonction de plusieurs événements (effondrement du régime soviétique, attentats islamistes, mondialisation incontrôlée).
Désormais, c’est par la droite que viennent les nouvelles expressions politiques (notamment le mouvement dit « populiste »). La progression des idées de droite (qui jusqu’à présent avaient été comprimées par le sinistrisme) repousse vers la gauche les organisations et idées qui occupaient l’espace politique de la droite.
Cela se traduit par une progression du FN et une droitisation des idées exprimées par la droite modérée qui se dit « décomplexée ». De même, le libéralisme est repoussé vers le centre (pensez au social-libéralisme d’un Tony Blair ou d’un Manuel Valls). Quant à l’extrême gauche, elle s’étiole, en particulier dans sa composante communiste.
Viendra peut-être le jour (mais il s’agit, là, de politique fiction et les étiquettes auront de toute façon changé) où l’UMP incarnera le centre-gauche modérée et le PS l’extrême gauche…"