Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Crise de pouvoir en vue

Dans un régime qui se veut démocratique, on ne saurait vaincre sans convaincre. Au lendemain du débat du 16 mars, parfaitement conventionnel et, pour tout dire, soporifique, Manuel Valls demeure Premier ministre. Demi-victoire. Or, si l'on peut toujours s'ingénier à souligner que cette bouteille reste à moitié pleine, on doit bel et bien considérer et convenir qu'elle s'est vidée de la moitié de sa contenance et qu'elle est bien partie pour continuer inexorablement.

Car il ne l'a emporté qu'au bénéfice d'une majorité relative. Les seuls Français auxquels il s'adressait ce 16 septembre composent la fameuse "gauche de la gauche". Que cela plaise ou non cette mouvance comprend le camarade Chassaigne, porte-parole du dernier carré stalinien. (1)⇓ Ces gens, qui refusent leur confiance au gouvernement actuel se réclament de la majorité présidentielle de 2012. Et ils considèrent que sans eux le mot hollande continuerait de désigner principalement dans l'esprit des Français une variété de fromage.

Le chef du gouvernement n'a certainement pas convaincu ceux qu'il s'efforçait de ramener au bercail. Avec 269 voix contre 244, il ne lui reste plus que 25 sièges d'avance. Il a perdu 37 voix en quelques mois, les "frondeurs" au sein du seul parti socialiste ont vu leur nombre multiplié par 3, passant de 11 à 32. Et il lui manque une vingtaine de voix pour détenir une majorité absolue.

Le voici donc désormais confronté à trois oppositions : celle des frondeurs se manifeste, en tout, par 53 abstentionnistes alliés de fait des écologistes et du parti communiste. Cela ne rejoint évidemment pas celles du centre droit et du front national. Mais leur conjonction ou leur addition pèsera de plus en plus lourd et les ralliements semblent exclus dans la phase actuelle d'impopularité du binôme Hollande-Valls.

Qu'induisent en effet les concessions rhétoriques et pratiques faites le 16 septembre par le gouvernement en direction de la seule opposition de gauche ? mesurettes sociales au bénéfice de quelques catégories de Français défavorisés, ou d'Étrangers puisque la loi interdit actuellement d'opérer la moindre discrimination: prime exceptionnelle pour les petites retraites, projet de baisses d'impôts pour les ménages modestes, auxquelles personne ne comprend rien, revalorisations de 8 euros en vue de préserver le pouvoir d'achat, passage de 792 euros sa valeur en avril à 800 pour quelque 570 000 bénéficiaires, etc. Tous ces signaux, d'ailleurs pas considérables étaient destinés à inverser le "message" de la communication gouvernemental par rapport à la déclaration d'amour au MEDEF.

Outre que cela n’a manifestement pas suffi à convaincre à gauche, ce grand écart apparent et ce revirement n'ont pu que renforcer l'impression négative des bailleurs de fonds et des agences de notation, peu enclines aux considérations humanitaires. Ainsi apprenait-on ce 18 septembre par une information de "L'Opinion" que Moody's, après Standards and Rich s'apprête à dégrader la note de l'État français qui passerait de Aa1 à Aa2 sous perspective négative. Le ton péremptoire de l'annonce par Michel Sapin le 10 septembre d'une croissance de 0,4 % occasionnant déficit public de 4,4 % et d'un report à fin 2017 de l'échéance d'un retour aux 3 % (2)⇓ aurait mérité que le Premier ministre, le 16, rectifiât l'impression d'un pour voir parisien extrêmement fataliste face aux conséquences de l'acharnement à maintenir le pseudo "modèle social" périmé. On a assisté à la démonstration inverse de ce que l'on aurait pu souhaiter.

Or tous ces renoncements interviennent au moment précis où la défection de gauche conduit, lentement mais sûrement, à la redécouverte de la nature parlementaire des dispositions théoriques de la constitution de 1958.

Trop de Français l'ignorent, en effet, mais la loi fondamentale dispose que "le Premier ministre dirige l'action du Gouvernement" (article 21) et que "le Gouvernement détermine et conduit la politique de la nation. Il dispose de l'administration et de la force armée. 

Il est responsable devant le Parlement dans les conditions et suivant les procédures prévues aux articles 49 et 50." (article 20) Même le prétendu "domaine réservé" du chef de l'État n'est qu'une interprétation propre au parti gaulliste : elle ne vaut que si les ministres et les députés le veulent bien.

Comment imaginer, dans de telles conditions qu'un parlement désormais divisé, face à un président discrédité et à un gouvernement en voie de démonétisation rapide ne renforce pas l'hypothèse d'une crise de pouvoir.

JG Malliarakis http://www.insolent.fr/2014/09/crise-de-pouvoir-en-vue.html

Apostilles

  1.  (Président du groupe communiste, celui-ci fait aussi fonction de secrétaire au sein du "Groupe d'études à vocation internationale sur les questions de la République démocratique de Corée - Corée du Nord." Le mot amitié ne figure plus, contrairement à la plupart des pays dans l’intitulé de ce groupe. 
  2.  cf. Les Échos du 10 septembre.

Les commentaires sont fermés.