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Les bobos ! Tribune de Vincent Revel

Pour clarifier ce que j’entends par bobo, je vais reprendre la définition qu’Alain Finkielkraut nous donne dans son ouvrage L’identité malheureuse. Le bobo, « nouveau type humain », est né avec Mai 68. « Comme son nom l’indique, celui-ci n’est pas né de rien, mais du croisement entre l’aspiration bourgeoise à une vie confortable et l’abandon bohème des exigences du devoir pour les élans du désir, de la durée pour l’intensité, des tenues et des postures rigides, enfin, pour une déconstruction ostentatoire. Le bobo veut jouer sur deux tableaux : être pleinement adulte et prolonger son adolescence à n’en plus finir. »
Ce qui veut dire que le bobo se croit être cool, attaché au camp des gentils puisque partisan sans condition du multiculturalisme et progressiste jusqu’au bout des ongles. De ce fait, il est plus que prévisible car il se veut non conformiste alors qu’en réalité son discours et son attitude correspondent à la pensée unique. Il est dans l’air du temps tout en se voulant rebelle. Il déteste plus que tout l’histoire de son peuple. Son péché mignon ultime est de se définir citoyen du monde. C’est un adepte du sans-frontiérisme, souvent proche du sans-papiérisme.

Comme le dit Régis Debray dans son Eloge des frontières, il adhère sans restriction à « une idée bête qui enchante l’Occident : l’humanité, qui va mal, ira mieux sans frontières. » Ces dernières sont devenues à sa vue un blocage insupportable au grand melting-pot et aux échanges de marchandises, de capitaux et de personnes soi-disant librement consentis. Paradoxalement, le bobo, malgré son militantisme pour le droit à la différence, vit pour une globalisation uniformisante. L’exotisme est pour lui un exutoire car c’est un grand sentimental dans une version télé-réalité pour les riches.

 

Le top du top pour le « bobo » est d’être capable d’afficher un air décontracté et faussement enthousiaste lorsqu’il explique à ses proches ses dernières vacances passées loin de France. Pour être un vrai bobo, il est primordial de proclamer haut et fort, avec un air béat, enjoué : « qu’est-ce que c’est mieux chez eux ! », « puis qu’est-ce qu’ils sont ouverts et accueillants ! » Sans prendre le risque de passer pour un touriste de base (« un beauf » dans leur jargon), il faut absolument que le bobo arrive à communiquer son émerveillement sur cet ailleurs idéalisé souvent à l’extrême.

En même temps, vous me direz avec justesse que c’est le but de toutes vacances, que de revenir émerveiller et reposer. Mais ce qui fait la vraie différence entre un bobo et un touriste lambda, c’est que le premier revendiquera, souvent avec conviction et virulence, le droit des peuples à demeurer eux-mêmes. Il n’hésitera pas à se faire l’ambassadeur de peuplades lointaines et sera prêt à défendre des coutumes parfois très éloignées de ses principes qui pourraient justement aussi choquer plus d’un « beauf ». Il se fera donc le champion de la lutte contre le capitalisme, qui impose une mondialisation sauvage, sans non-plus remettre en cause les effets dévastateurs que celui-ci peut avoir sur son propre pays tout en omettant, hypocritement, de préciser que ce même capitalisme lui permet d’être un membre privilégie d’une caste cosmopolite.

Pour être simple, quand les bobos partent en Turquie, en Tunisie, en Egypte, au Kenya, en Thaïlande, ils aiment y trouver l’esprit du pays et les traditions attachées à ces nations jusqu’à s’en extasier tellement il est bon pour l’esprit de voir des êtres enracinés dans une longue tradition. Jusque là, je ne leur fais aucun reproche car je pense presque comme eux sauf que je revendique le même droit pour tous les peuples et j’insiste que ce droit ne doit pas être réservé qu’aux seuls continents asiatique et africain. C’est ce que je nomme le vrai droit à la diversité.

Mais pour le bobo, l’essentiel est ailleurs. Sa mauvaise conscience, alimentée par 40 ans de culpabilisation, l’oblige à endosser la cape du défenseur des peuples opprimés, des minorités. Car comme le précise Régis Debray « le sans-frontiérisme excelle à blanchir ses crimes. Mieux : il a transformé un confusionnisme en messianisme. »

Dans son esprit narcissique et déraciné, digne enfant gâté d’une société qui a appris à se détester, le seul méchant ne peut être que l’Occident blanc, riche et opulent, responsable de tous les maux de la terre (croisades, esclavage, colonisations, pollution…).

De cette façon, il garde l’esprit tranquille, déconstruit égoïstement les sociétés qui lui ont permis de grandir et continue de profiter, sans gêne, d’un système profondément injuste qu’il fait mine de dénoncer pour pouvoir maintenir un niveau de vie répondant à son exigence de consommateur. Pour schématiser, comme le dit très bien Éric Zemmour dans son livre Le Suicide français, « les bobos sont des prédateurs aux paroles de miel. Ils exaltent la diversité à l’abri de leurs lofts cossus… Ils vantent l’école publique et le vivre-ensemble, mais profitent de leurs relations pour contourner la carte scolaire dès que l’école de leurs enfants est submergée d’enfants de l’immigration. » En politique, ils sont plus que reconnaissables tellement ils ressemblent à Madame Vesperini, personnage de fiction de l’excellent polarTerritoires d’Olivier Norek. Avec eux, le cynisme, le mépris, les mensonges, le clientélisme et l’hypocrisie n’ont plus de borne.

Mais aujourd’hui, face à la violence islamique, leur monde se fissure comme le démontre la virulente opposition ayant eu lieu lors de l’émission de Ruquier entre Aymeric Caron et Caroline Fourest. Ceci est une petite nouveauté, suffisante pour être soulignée !

Vincent Revel 

http://fr.novopress.info/187211/les-bobos-tribune-vincent-revel/#more-187211

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