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Quand Erdogan défie l'Allemagne et l'Europe

6a00d8341c715453ef022ad36f48ed200c-320wi.jpgLe 28 septembre, porte de Brandebourg, le président turc saluait ses partisans. Quatre doigts levés, le pouce recroquevillé vers la paume : sans ambiguïté le salut de la confrérie al-Ikhwan al-Mouslimoun chassée d'Égypte en 2012, les Frères musulmans.

Peu lui importaient les protestations d'opposants et les mises en garde de la presse et des bouderies de la classe politique allemande, chancelière y compris : sa feuille de route consistait à inaugurer, le 29 septembre, grande mosquée d'Allemagne, dans un pays qui en compte déjà 900. Cet édifice de 4 500 m2 abritera désormais aussi le siège du Ditib pseudopode outre-Rhin de la tentaculaire Diyanet[1].

À Cologne, les responsables locaux ont renoncé à participer à la cérémonie d'inauguration : ni Henriette Reker, au nom de la ville, ni le ministre président de Westphalie-Rhénanie-du-Nord n'ont souhaité y prendre part. Frau Reker ne s'est rendu qu'à l'aéroport, pour saluer son départ.

C'est cependant une image personnelle de dureté et d'intransigeance que le président turc a tenu à montrer à la presse allemande qui entreprenait le bilan de son voyage dans la capitale dès l'issue de la première journée, diplomatiquement décisive.

Aussi bien lors de la réception officielle au palais Bellevue, que lors de la conférence de presse commune avec la chancelière Merkel, on ne pouvait pas ne pas remarquer le climat glacial et les profondes divergences entre les deux dirigeants. Que recherchait exactement Erdogan, qu'attendait-il de cette visite ?

Il est venu à Berlin le 27, observent les journaux allemands, en raison de la crise économique qui frappe son pays. Il aura insisté à plusieurs reprises sur la nécessité de liens commerciaux plus étroits et de la relance des investissements des entreprises allemandes, sans être pour autant disposé à renoncer à son agressivité.

Die Welt considère que personne ne peut désormais retenir la Turquie sur le voie de son effondrement. "Ankara, écrit le commentateur, peut disposer de certains moyens de pression dans la question des réfugiés, mais elle a plus besoin de l'Allemagne que l'Allemagne de la Turquie". On trouve des considérations analogues dans la Stuttgarter Zeitung qui souligne les moyens de chantages, sur l'Otan et, sur la question des réfugiés. Der Spiegel déplore même que Berlin facilite la vie d'Erdogan et "lui accorde une aide symbolique sans contrepartie concrète".

Le sujet turc prend de plus en plus de place dans les médias. Pour y avoir consacré des dizaines d'articles, de conférences, d'émission, organisé une pétition contre la candidature faussée de ce pays à l'Union européenne, publié un petit livre[2], etc. votre serviteur ne saurait récuser le bien-fondé de cette mode.

Encore devons-nous souhaiter que le débat se situe sur son vrai terrain. Longtemps les Européens ont cru que l'Anatolie et la Thrace orientale, ayant appartenu à l'empire romain, ayant même abrité une partie du christianisme originel faisaient, donc partie sinon, géographiquement, de leur continent, du moins, historiquement, de leur civilisation.

De plus une illusion a été entretenue par les Jeunes Turcs d'abord, par le Kémalisme ensuite[3] sur la force et la laïcité du pays. Il est trompeur de situer en 1928 en Egypte, avec la naissance des Ikhwan, la fonction identitaire du fanatisme musulman contre l'Europe moderne. Elle a été exposée dès le vizirat de Saïd Halim Pacha premier ministre du sultan de 1913 à 1916.

L'Europe officielle actuelle, c'est-à-dire ces institutions de l'Union européenne, ficelée par le document appelé Charte des Droits fondamentaux, 54 articles, 22 pages, signé le 18 décembre 2000 dans le cadre de la conférence de Nice, s'interdit de constater que l'islam ne fait pas partie de notre famille de nations. Elle tient au contraire à l'y inclure, sans doute pour ne pas désespérer Garges-les-Gonesse.

L'occupation d'une partie de l'Espagne de 711 jusqu'en 1492, la bataille de Poitiers de 732, la prise de Constantinople en 1453, l'invasion d'une partie de l'Europe centrale et danubienne jusqqu'au siège de Vienne de 1683, l'oppression sur les Balkans jusqu'au XIXe siècle, etc, loin de créer un droit de l'envahisseur sur notre terre d'Europe, droit que n’hésite pas à proclamer la tradition mahométane, désigne au contraire cet agresseur pour un danger potentiel permanent.

Et c'est aujourd’hui le régime d’Ankara et son dirigeant mégalomane qui l’incarnent.

JG Malliarakis  

Apostilles

[1] Cette administration turque, Présidence des affaires religieuses, Diyanet isleri baskanligi, rappelons-le, gère la vie religieuse en l'alignant exclusivement sur l'islam sunnite. Les alévis, bektachis et autres chiites duodécimians ou djafaris n'y ont aucun droit. Elle compte plus de 100 000 fonctionnaires en Turquie. Son activité est couverte par l'article 136 de la constitution. Son budget est supérieur de 60 % environ à celui du ministère de l'Intérieur. Depuis 2016, Ankara l'utilise pour surveiller et poursuivre ses adversaires à l'étranger. Le procureur fédéral allemand enquête actuellement sur 19 imams soupçonnés d'avoir espionné le mouvement libéral de bienfaisance Hizmet dirigé par Fetullah Gülen et persécuté par le régime Erdogan.

[2] cf. "La Question Turque et l'Europe"

[3] On lui doit quelques fortes formules telle que "le glaive de la justice frappe parfois les innocents, le glaive de l'histoire frappe toujours les faibles" que n'aurait pas désavouées Adolf Hitler, grand admirateur de la Turquie et de l'islam.

http://www.insolent.fr/2018/10/quand-erdogan-d%C3%A9fie-lallemagne-et-leurope.html

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