Tiens donc ! Le gouvernement y songerait-il sérieusement ? Un pilier de la Macronie s’alarme que « la porte [soit] grande ouverte » à cette perspective, tandis qu’un autre assure que l’exécutif marche sur des œufs : « Ils sont extrêmement prudents. Ils savent qu’ils sont sur un terrain très mouvant. » À Matignon, on estime que « plein de technologies peuvent se révéler utiles », mais on prend des précautions de langage : « On fera très attention aux libertés publiques, il ne s’agit pas de créer un Big Brother. » Le fait même de mentionner le dictateur de l’État d’Océania montre que le rapprochement n’est pas si saugrenu que cela !
Toujours selon Le Parisien, Édouard Philippe exclut tout traçage « obligatoire », mais ne serait pas hostile à « un engagement volontaire ». C’est le choix, également, de Mounir Mahjoubi, l’ex-Monsieur Numérique du gouvernement, qui a rédigé une note parlementaire sur le traçage des données mobiles dans la lutte contre le coronavirus. Interrogé sur RTL, il explique que « la question des libertés individuelles se pose dans le cas où il n’y a pas de consentement de la personne ». Il ajoute : « Si c’est sur la base du volontariat, il y a respect de la liberté au sens le plus large du thème, mais ne risque-t-on pas de perdre l’efficacité ? » Tirez-en vous-même la conclusion : le challenge du gouvernement, c’est de persuader les Français que, pour sauver des vies, on peut mettre de côté les libertés individuelles.
Pas sûr que ces nouveaux joueurs de flûte parviennent à convaincre. Ils ont beau s’escrimer à tromper les Français, ils n’incitent guère à la confiance. Voyez-les, tous les soirs, égrener le bilan de l’épidémie, sans un mot sur leur manque de préparation, sur la pénurie de masques ou de tests de dépistage : ils arrivent, ils vont arriver ! nous répètent-ils. Pas question de reconnaître leurs fautes. Ils ne sont pas non plus gênés de dire, un jour, que les masques sont inutiles et, le lendemain, qu’ils sont indispensables. Un gouvernement qui nie ses erreurs, qui réécrit l’Histoire pour donner une bonne image de son action, voilà qui ressemble beaucoup au monde décrit par Orwell. À quand un ministère de la Vérité ?
Philippe Kerlouan
Tribune reprise de Boulevard Voltaire