« Les fascistes de demain se feront appeler antifascistes », phrase prêtée à tort, semble-t-il, à Winston Churchill, sans doute pour son habituel talent prophétique. Dernière nouvelle sur le continent de la liberté et du progrès : une université catholique du Canada vient de procéder à la destruction par le feu (« purification », disent-ils) de livres de Tintin et d’Astérix au prétexte qu’ils véhiculeraient une mauvaise image des Amérindiens. Le progrès, donc.
Il est amusant de constater que le meilleur moyen, d’après les défenseurs du camp du Bien, de lutter contre la haine et l’obscurantisme est précisément d’utiliser la haine et l’obscurantisme pour promouvoir la « vérité ». Une nouvelle forme d’homéopathie, en quelque sorte. Les nazis, et avant eux l’Inquisition, n’avaient pas de telles pudeurs. Sous le régime hitlérien, les œuvres « dégénérées » passaient au bûcher. Sous l’Inquisition, c’étaient les livres impies. On appelait cela un « autodafé », c’est-à-dire un acte de foi.
Tout concourt décidément à rapprocher la pensée woke (le mot pensée ne convient pas vraiment, mais je l’emploie faute de mieux) d’une religion. Les gauchistes d’outre-Atlantique ont leurs dogmes, leurs martyrs, leurs prêtres, leur paradis et leur enfer. Au sujet de l’enfer, une différence de taille les sépare des autres religions : ils en préparent les fournaises dès ici-bas, par la mort sociale, le harcèlement, l’humiliation publique ou même la simple annulation (la célèbre cancel culture, nouveau visage de la damnatio memoriae romaine ou de la Sippenhaft franque, remise au goût du jour… par les nazis, encore eux).
Une idée digne de ces imbéciles écumant d’une haine impuissante serait peut-être d’écrire de nouveaux albums de Tintin ou d’Astérix pour rendre la série acceptable : Tintin et le privilège blanc, Les Droits de la Castafiore, Féminicide en Syldavie, Le Congo chez Tintin ; ou encore Astérix en Patriarchie, L’Odyssée de Bonemine, Astérix et Obélix se marient, Falbala sur la colline du crack… on n’en finirait pas.
Rassurons-nous, cela n’arrivera pas, et la cause en est simple : cette démence saisit les « progressistes » précisément parce qu’ils veulent simplement détruire ce qu’ils seront toujours incapables de produire. Ils vont donc au plus simple. Or, il est plus simple de brûler des livres que d’en écrire, plus simple de « déconstruire » la culture classique que de démontrer l’intérêt des cultures « invisibilisées », plus simple de réclamer des quotas que de mériter sa place, plus simple de couper des têtes que d’utiliser la sienne, plus simple de pleurnicher sur les minorités que de les souder en une majorité qu’on nomme société, plus simple de féminiser l’armée que de masculiniser la Justice, plus simple de critiquer que d’agir, de hurler que de réfléchir, de réclamer des droits que de faire son devoir.
« Fuis l’ennemi s’il te murmure à l’oreille “Pourquoi te compliquer la vie ?” », écrivait, dans Chemins, saint Josemaría Escrivá de Balaguer. N’entendons-nous pas, dans tous ces gargouillis informes, ne voyons-nous pas, dans tous ces bûchers stupides, ne reconnaissons-nous pas, dans la volonté pervertie de cette masse veule et inculte, la marque de l’éternel Ennemi ?
Ils sont fous, ces gauchistes !
Arnaud Florac
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