Le texte présenté ici est un extrait de l’ouvrage Vittorio Hösle (1) “Philosophie de la crise écologique” (Wildproject, 2009, trad. Matthieu Dumont), publié pour la première fois à Munich en 1991. Le texte reprend une série de conférences prononcées en avril 1990 à l’Institut de philosophie de l’Académie des sciences de Russie/URSS. Déjà traduit en plusieurs langues, cet ouvrage a contribué à faire de son auteur une voix incontournable dans le domaine de l’éthique environnementale et de la philosophie de l’écologie.
Un point commun du capitalisme et du marxisme
Il me semble à présent que l’antagonisme des systèmes de l’Ouest et de l’Est n’a pas essentiellement pour origine une divergence quant aux objectifs à atteindre. Il est certain que la liberté a occupé une place bien plus importante dans l’idéal social occidental que dans celui des pays de l’Est. Pourtant les deux modèles sociaux partageaient, du moins pour ce qui est de la théorie, les mêmes idéaux universels hérités des Lumières : autodétermination et bien-être pour le plus grand nombre possible.
Les dissensions s’exprimaient davantage à propos de la meilleure voie à suivre pour parvenir à la réalisation de ces idéaux. Les démocraties occidentales pensaient pouvoir y arriver par l’entremise d’un développement sous contrôle de l’économie capitaliste ; et les pays communistes, par un rejet de l’économie de marché. (…)
L’impossible suppression de l’égoïsme économique
La suppression de l’égoïsme économique n’a pas eu pour conséquence l’apparition d’une identification plus large avec l’intérêt général. Elle a encouragé, d’une part, certaines formes d’imposture et, d’autre part, la mise en place d’une économie souterraine dont la corruption dépasse largement les manifestations les plus abjectes, d’un point de vue moral, du capitalisme occidental. (…)
En tant qu’éthicien, je souhaiterais cependant tirer une conclusion dont la portée me semble primordiale : il est absurde, et même immoral, de vouloir nier abstraitement l’égoïsme économique. (…) Celui qui veut étouffer l’égoïsme commettra des crimes bien plus épouvantables encore que ceux que l’on attribue à l’égoïsme. (…) Étouffer l’égoïsme est non seulement impossible, mais aussi – lorsqu’une violence extrême rend cela possible – immoral.
Mais il faut ajouter autre chose. Sous certaines conditions, même si elle pouvait advenir sans le concours de la coercition, une telle neutralisation des intérêts égoïstes serait elle-même un échec car seul l’égoïsme est capable de motiver l’individu à fournir certaines prestations qui profitent aussi à la collectivité.
Il s’agit en effet de l’argument classique utilisé par les chantres du capitalisme, depuis Mandeville et Adam Smith. Cet argument me semble contenir un noyau de vérité auquel le socialisme n’a jamais rendu justice : celui qui neutralise l’égoïsme sans parvenir à conserver à un plus haut niveau les énergies qui l’animent, condamne ainsi l’humanité à une apathie, à une indifférence qui seront pires encore que dans un monde gouverné par l’égoïsme.
Sans l’incroyable efficacité d’une activité économique rationalisée et fondée sur des motivations égoïstes, il sera très difficile de venir à bout des tâches importantes qui nous incombent – comme la sauvegarde de l’environnement par exemple.
3 critiques faites au capitalisme dans sa forme actuelle
J’espère bien sûr que mon propos n’est pas interprété comme donnant carte blanche au capitalisme dans sa forme actuelle. Je pense au contraire qu’aujourd’hui encore, au lendemain de l’effondrement de l’économie planifiée, nous avons grand besoin d’une critique rationnelle du capitalisme. Il est d’ailleurs frappant de voir à quel point la plupart des adversaires du capitalisme sont incapable de formuler une telle critique.
Je trouve donc grotesque de critiquer aujourd’hui le capitalisme, comme beaucoup le font, en évoquant la paupérisation de la classe ouvrière du monde industrialisé ; il s’agit là d’une avanie éhontée à l’endroit des dizaines de milliers d’individus qui meurent quotidiennement de faim dans le tiers-monde. On pourrait bien plutôt ébaucher une critique de l’économie du monde industrialisé à partir des points suivants.
Premièrement, nul n’ignore que le capitalisme – qui opère suivant une substitution de la valeur d’usage par la valeur marchande de tout produit – peut conduire à une déformation singulière de la personnalité : pour celui qui voit les choses à travers le prisme de l’argent, les nuances esthétiques et éthiques qui constituent l’inépuisable trésor du monde se réduisent à la différence quantitative de leurs prix.
Certes le fonctionnement capitaliste est tel que tout, même l’essentiel, est « achetable » pour celui qui succombe à cette chimère de la marchandise et qui, ce faisant, inflige à sa propre personnalité les pires mutilations. (…)
Deuxièmement, à l’intérieur de l’État capitaliste, le chômage est un problème indéniable qui n’est toujours pas résolu, même si les causes de ce phénomène ne sont pas celles qu’avançait une critique du capitalisme traditionnellement axée sur la lutte des classes. C’est le coût du travail, en partie excessif (surtout si l’on tient compte des charges annexes au salaire), qui impose des rationalisations. Il serait en outre naïf de croire que les politiques syndicales aient pour priorité d’améliorer le sort des chômeurs au détriment des avantages matériels de ceux qui ont un emploi.
J’en viens maintenant à mon point décisif, le troisième. Si on ne parvient pas à juguler l’exploitation conjointe de la nature et du tiers-monde [par le monde occidental], cette aggravation provoquera des catastrophes en comparaison desquelles les cataclysmes sociaux annoncés par Marx nous paraîtront bénins. (…)
Une économie du troisième type
Dans la mesure où ni l’économie capitaliste actuelle ni l’économie socialiste ne peuvent respecter l’impératif moral de préservation de l’environnement, quel type d’économie est-il requis pour que cet impératif soit respecté ? De mon point de vue, le seul chemin viable se trouve indiqué dans l’idée d’une économie de marché écologiste et sociale. (…)
Quelle dose d’autonomie l’État devrait-il accorder à l’économie ? L’État ne peut pas, nous l’avons vu, réprimer les instincts économiques égoïstes sans s’amputer lui-même d’une de ses principales sources d’énergie. Puisque l’économie forme désormais une sphère autonome, nous avons atteint un point de non retour : on ne peut plus étouffer l’égoïsme économique. D’un autre côté, il n’est pas garanti que la poursuite systématique d’intérêts égoïstes contribue à l’intérêt général.
Sous sa forme simplifiée, la théorie de la « main invisible (2) » est donc sans aucun doute une fable. On voit bien en effet que, si l’égoïsme rationnel n’est pas nécessairement au service de l’intérêt général, c’est parce que la technique moderne a permis un élargissement sans précédent du champ d’action de l’homme. De nos jours, un comportement égoïste et cupide mais rationnel est tout à fait susceptible de participer à la destruction de l’humanité, pour peu que le déluge survienne après la mort du sujet agissant. (…)
Quelles conditions-cadres sont donc requises pour freiner la destruction de l’environnement ?
Seule l’application conséquente du principe du pollueur-payeur est compatible avec l’idéal d’autonomie qui est au fondement du capitalisme : celui qui dégrade ou surexploite l’environnement doit en payer le prix. Nous butons d’ailleurs ici sur une limite théorique de l’économie politique dans son ensemble, limite qui concerne aussi en première ligne l’économie nationale marxiste.
Pour les auteurs classiques de l’économie, y compris Marx, la valeur est une quantité abstraite de temps de travail écoulé. Aussi la nature non exploitée recèle une valeur nulle. On reconnaît aisément dans cette position anthropocentrique le pendant économique de l’altération cartésienne de la nature en une res extensa.
De même que, chez Kant et Fichte, la nature n’est pas le réceptacle d’une valeur morale, elle n’a chez Smith, Ricardo et Marx aucune valeur économique en soi. Cette conviction, profondément enracinée, est l’une des causes principales de la crise écologique. (En Russie, par exemple, elle est responsable du prix beaucoup trop bas de l’énergie.)
On sait que Marx, dans certains passages, a interprété et critiqué la destruction de la nature comme une des conséquences du capitalisme. Je vous renvoie à la fin du chapitre XV de la première partie du Capital qui s’intitule « Machinisme et grande industrie » (…) qui se clôt sur ces mots qui anticipent de manière prophétique les problèmes de l’agriculture industrielle moderne :
« En outre, chaque progrès de l’agriculture capitaliste est un progrès non seulement dans l’art d’exploiter le travailleur, mais encore dans l’art de dépouiller le sol ; chaque progrès dans l’art d’accroître sa fertilité pour un temps, un progrès dans la ruine de ses sources durables de fertilité. […] La production capitaliste ne développe donc la technique et la combinaison du processus de production sociale qu’en épuisant en même temps les deux sources d’où jaillit toute richesse : la terre et le travailleur (3). »
3 erreurs de Marx
La lucidité de cet extrait ne doit cependant pas faire oublier que Marx a commis trois erreurs lourdes de conséquences. J’aimerais à présent corriger ces trois erreurs auxquelles j’ai déjà fait allusion.
Premièrement, la destruction de la nature n’est hélas en rien l’apanage du capitalisme ; elle est propre à l’industrialisme en tant que tel.
Ceci va de pair avec le deuxième point : ni Marx lui-même ni ses épigones n’ont su élaborer une théorie de la valeur capable de freiner la destruction de la nature. (On en trouve des prémices dans les théories de la valeur des subjectivistes. En effet, dès que l’on se penche sur la question de l’élaboration d’une éthique de l’économie, on comprend pourquoi certains économistes d’obédience « néoclassique » refusent de se passer du concept de valeur et de l’idée que l’économie politique doit être fondée de façon normative. L’une des tâches principales de l’actuelle philosophie de l’économie est donc de donner naissance à une théorie de la valeur postmarxiste.)
Troisièmement, enfin, l’histoire du capitalisme montre bien qu’il est parfaitement possible d’améliorer le sort de la classe laborieuse sans pour autant abolir la propriété privée des moyens de production. On peut donc espérer atteindre la même chose en ce qui concerne la préservation du fondement écologique de la vie humaine, si toutefois les conditions-cadres sont modifiées de manière à ce que la dégradation de l’environnement ne soit plus financièrement rentable. (…)
La réforme fiscale écologiste
Une réforme fiscale semble donc être le moyen le plus prometteur pour endiguer la destruction environnementale. En vue de cette réforme, deux principes sont à prendre en considération. D’abord, les nouveaux impôts doivent naturellement être compensés par des allègements fiscaux dans les autres domaines, afin de ne pas tout simplement caler le moteur de la production. Indépendamment de la question de la crise écologique, les impôts sur le revenu et sur les salaires me paraissent trop élevés en Allemagne fédérale et c’est une des raisons pour lesquelles l’embauche de nouveaux salariés n’est, le plus souvent, pas rentable.
C’est par conséquent une des causes du chômage. Il n’est pas infondé de soupçonner que le système fiscal actuel favorise le chômage massif ainsi que la destruction environnementale – les deux tares majeures de l’État providence moderne. Une restructuration du système fiscal, orientée par une exigence écologique et sociale, s’impose donc comme l’un des devoirs les plus urgents de notre temps. À vrai dire, cette refonte ne doit pas être trop précipitée, c’est là le second principe que j’annonçais, si l’on veut pouvoir éviter certaines difficultés d’adaptation, et même certaines catastrophes. Mais nous devrions néanmoins engager sans délai les premières démarches.
Les subventions étatiques maintiennent en vie certains secteurs économiques non-rentables, et qui le seraient encore moins si on leur facturait les dommages environnementaux dont ils sont responsables. Ce sont donc ces subventions que l’on devrait suspendre en premier lieu. Il y a bien quelque chose de grotesque dans le comportement des dirigeants de l’économie qui pérorent le dimanche en vantant les mérites de l’économie de marché mais empochent régulièrement au cours de la semaine des subventions.
Ces subventions ont atteint des proportions démesurées, même dans les cas où il est légitime d’encourager, pour des raisons politiques, des entreprises dignes d’être conservées. En effet, les mécanismes commerciaux ne réagissent pas systématiquement assez rapidement ni avec assez de flexibilité, surtout lorsque les conditions-cadres de l’économie sont mauvaises.
Il est donc toujours préférable que la politique économique nationale parvienne à fixer des conditions-cadres de telle façon que les subventions ne soient nécessaires que ponctuellement. C’est d’ailleurs habituellement le signe que les conditions-cadres sont mauvaises quand l’État intervient toujours plus fréquemment et précipitamment dans les moindres aléas de la vie économique.
Voilà exactement ce qui se passe aujourd’hui : l’économie de marché se fourvoie dans la mesure où la politique économique nationale actuelle renonce à une redéfinition des conditions-cadres qui tirerait les conséquences de la crise écologique. Au lieu de cela, cette politique intervient constamment de manière palliative, afin de maintenir le statu quo, ce par quoi elle stimule des besoins absurdes auxquels personne ne songerait si on ne nous les imposait pas. (L’exemple classique était la baisse du prix de l’électricité en Allemagne fédérale.) (…)
Deux objections ont été formulées à l’encontre de cette proposition de réforme fiscale des conditions-cadres de l’économie politique. (…)
La seconde objection que l’on a pu adresser à la réforme fiscale écologique (…) prend appui sur l’idée qu’une telle réforme ne peut être engagée par un seul pays. En effet, l’ingéniosité de cette réforme est précisément d’éviter les inconvénients de la concurrence que les entreprises écologiquement actives, ceteris paribus, doivent endurer dans le système actuel, en rendant au contraire l’activité écologique qui s’impose moralement rentable également sur le plan économique.
Mais, pendant que ces désavantages sont supprimés – grâce à une telle réforme – à l’intérieur d’un pays, ils sont simplement démultipliés dans le cadre de la concurrence internationale : toutes les entreprises de ce pays sont maintenant défavorisées sur le marché international.
Il faut admettre que c’est un argument de poids qui prouve à nouveau que l’existence actuelle d’une économie mondialisée est particulièrement dangereuse dans le présent contexte de la crise écologique puisqu’il n’existe pas, conjointement, d’institutions politiques universelles.
Étant donné la situation, on peut comprendre le souhait de court-circuiter les mécanismes économiques globaux par des mesures protectionnistes ; mais il est absurde de croire que l’on puisse résoudre le problème environnemental – qui est un problème global et non pas national – en cloisonnant les marchés nationaux. (Je concède néanmoins que certaines mesures d’intimidation occasionnelles, allant dans le sens d’une fermeture économique des frontières, sont légitimes, et que le concept de « douane écologique » est à prendre au sérieux.)
Nous devons plutôt insister sur l’élaboration d’accords interétatiques qui détermineraient, pour l’économie, des conditions-cadres écologiques communes aux partenaires commerciaux les plus importants. C’est précisément ce qui a été mis en place, avec le succès que l’on connaît, au sein de la communauté européenne depuis les années 1970. Mais il reste encore beaucoup à faire.
Quoi qu’il en soit, on ne peut plus accepter qu’un nombre croissant de pays prétendent qu’ils seraient disposés à instaurer une réforme fiscale écologique s’ils n’avaient pas à subir la concurrence des pays voisins. Ces voisins allèguent en retour le même argument de la concurrence pour justifier leurs réticences.
On peut attendre tout particulièrement des pays riches qu’ils donnent le bon exemple et qu’ils s’accommodent des désagréments financiers provisoires. Il me semble d’une importance primordiale que les pays qui commencent aujourd’hui à intégrer les mécanismes du marché dans leur économie politique confèrent d’emblée à cette économie une dimension écologique.
Essayons à présent de construire une économie de marché qui ne soit pas seulement sociale, mais qui ait aussi des préoccupations écologiques. L’idée de cette économie de marché serait par conséquent supérieure à celle de l’actuelle économie occidentale.
Vers le nouveau monde
Mon opinion est, on l’aura remarqué, que l’économie et l’écologie sont en principe compatibles. C’est pourquoi il me semble qu’opposer finance et environnement a été une erreur tragique des deux dernières décennies. Celui qui pense que seul un démantèlement du système économique actuel, seul un retour à une phase précapitaliste pourraient sauver l’environnement, ne pourra jamais mobiliser un nombre suffisant d’individus pour effectuer un tel retour en arrière.
Son « retour à la nature » sera toujours soupçonné d’être un « retour aux arbres » ; son romantisme sera trop facilement dénigré et interprété comme une régression infantile. De plus, un tel point de vue est objectivement faux car, sans l’incroyable potentiel d’efficacité qui caractérise le capitalisme moderne, on ne saurait être en mesure de résoudre les problèmes de notre temps, celui de l’alimentation comme celui de l’environnement. (…)
La possibilité théorique de réconciliation entre l’économie et l’écologie me semble apparaître dans toute sa clarté quand on prend conscience que l’activité économique consiste à atteindre le meilleur résultat possible à partir de dépenses les plus basses possibles.
Efficacité et parcimonie sont des vertus traditionnelles de l’économie. Ce sont aussi en même temps des vertus écologiques : l’exploitation parcimonieuse et le recyclage des ressources ou l’isolation thermique des habitats, par exemple, sont bénéfiques pour l’économie comme pour l’environnement. Il est donc primordial d’introduire partout dans le monde certaines normes de l’efficacité économique développées par le capitalisme.
Même en faisant preuve de bonne volonté, il est impossible de voir en quoi la complaisance routinière ou le gaspillage des ressources naturelles que l’on observe dans de nombreux pays disposant d’une économie planifiée pourraient avoir un impact positif sur l’environnement.
Grâce à une sensibilisation croissante de la population aux problèmes environnementaux, le consommateur choisira de préférence des produits dont il sait que leur fabrication est plus respectueuse de l’environnement (surtout lorsque ces produits deviendront moins chers avec la mise en place de taxes environnementales).
Cela deviendra parfaitement envisageable de faire de bonnes affaires avec des produits écologiques. L’écologiste ne doit pas craindre une telle mutation : si un entrepreneur dynamique réussit à améliorer son chiffre d’affaires grâce à des idées qui réduisent véritablement les atteintes à l’environnement, l’environnement y trouve son compte. S’investir sans mobile extérieur dans la poursuite d’un noble dessein est certes bien plus moral. Mais, si le recours à la motivation que représente l’intérêt économique permet la réalisation d’un plus grand nombre encore de résultats moralement souhaitables, il est alors profondément immoral d’en récuser l’efficacité.
Je crois en effet qu’après une phase de débats intenses entre les écologistes et le monde de l’économie, une évolution est maintenant en gestation à travers laquelle de nombreux entrepreneurs saisissent la nécessité d’une transformation de leur activité économique qui prenne en compte les enjeux environnementaux.
Notes :
(1) Né à Milan en 1960, Vittorio Hösle est un philosophe allemand surnommé “le Boris Becker de la philosophie”, pour la précocité et l’énergie de son talent. Polyglotte, il maîtrise une demi-douzaine de langues et est l’auteur d’une œuvre imposante qui porte sur des sujets aussi variés que le darwinisme, les tragédies de Sophocle, l’écologie, les sciences politiques, le cinéma de Woody Allen, le système de Hegel, la pragmatique transcendantale, l’éthique et la métaphysique. Professeur dans de nombreuses institutions, notamment à la New York School for Social Research, il a aussi enseigné à Naples, Ulm, Essen, Porto Alegre, Trondheim ou Séoul. Il est aujourd’hui Professeur à University of Notre Dame (USA).
(2) La « main invisible » [invisible hand] est un concept qui a été introduit par Adam Smith (bien qu’il ait des antécédents, notamment chez Leibniz) et qui est devenu un des piliers du dogme libéral. Smith résume ce qu’il entend par-là dans ses Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations (1776) : « [L’individu] est conduit par une main invisible à remplir une fin qui n’entre nullement dans ses intentions ; et ce n’est pas toujours ce qu’il y a de plus mal pour la société, que cette fin n’entre pour rien dans ses intentions. Tout en ne cherchant que son intérêt personnel, il travaille souvent d’une manière bien plus efficace pour l’intérêt de la société, que s’il avait réellement pour but d’y travailler. » [N.d.T.]
(3) Traduction de J. Roy modifiée. Capital, I, IV, chapitre XV « Machinisme et grande industrie », éd. Flammarion, 1969.
Wild Project
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