A l’instar de « fascisme », « inquisition » est devenu l’un de ces mots vidés de leur sens originel, arrachés à leur contexte pour n’être utilisés qu’à des fins dépréciatives, péjoratives et disqualifiantes par des gens qui en ignorent généralement la signification exacte et correcte. Ce sont désormais des sortes de synonymes de « mal », « mauvais » ou « méchant ».
C’est sans doute pour cela que l’emploi de cette référence historique par Emmanuel Macron semble avoir profondément vexé et « choqué » quatorze femmes s’étant déclarées victimes de violences sexuelles de la part de Nicolas Hulot et de Patrick Poivre d’Arvor et qui se sont fendues d’une tribune pour « répondre » au président de la République. Interrogé sur ces mises en cause de l’ancien journaliste vedette et de l’ancien ministre, le chef de l’Etat avait en effet déclaré souhaiter « ni complaisance, ni inquisition ».
« Quel est le rapport entre nos récits et l’Inquisition ? », s’interrogent tout d’abord les quatorze femmes, parmi lesquelles treize accusatrices de Patrick Poivre d’Arvor et une de Nicolas Hulot, dont l’écrivain Karin Bernfeld, la comédienne Maureen Dor, l’ancienne présentatrice de JT Hélène Devynck, Cécile Thimoreau, ancienne journaliste à TF1, ou encore Muriel Reus, ancien cadre de TF1.
« De nos intimités exposées naîtrait le risque de replonger la France dans une des périodes les plus sombres et les plus unanimement détestées de l’histoire occidentale ? Une période où l’on a emprisonné, torturé, supplicié, brûlé les hérétiques, ceux qui étaient soupçonnés de mettre en cause la toute-puissance divine et l’institution de l’Eglise », poursuivent-elles, relayant allègrement la vision caricaturale et simpliste d’une période dont l’évocation sert généralement à attaquer et salir le catholicisme. Ces dames sont donc profondément scandalisées d’être assimilées à cette sombre époque et accusent même le président d’inciter au silence des femmes face aux agressions dont elles seraient victimes et d’ainsi participer à la prorogation « d’une société où les victimes de la violence des dominants seraient tenues au silence et condamnées à l’opprobre, à l’infamie et à la caricature si elles transgressent cette règle ».
On pourra trouver cette réaction excessive et même passablement outrée quand le propos présidentiel paraissait au contraire plutôt mesuré et nuancé, appelant à laisser faire la justice et à ne pas laisser s’instaurer des « tribunaux médiatiques » aussi illégitimes que dangereux.
On pourra surtout s’amuser de l’extrême sensibilité de ces membres d’une intelligentsia médiatique qui se montre généralement beaucoup moins sourcilleuse sur ces références historiques lorsqu’il s’agit de dénigrer et de diffamer ses adversaires, à commencer par le camp national et ses représentants. Les grandes spécialistes de la nazification des patriotes, de l’évocation obsessionnelle du retour des années 30 et de l’ombre pétainiste jouent aujourd’hui les vierges effarouchées par une référence historique qui ne leur sied pas. Une nouvelle version de l’arroseur arrosé en quelque sorte.
Xavier Eman
Article paru dans Présent daté du 9 décembre 2021