Olivier Bault
Les réactions dans la presse de centre-droit étaient diverses et variées dans la presse des grands voisins de la France lundi matin, après la publication des résultats du premier tour de notre élection présidentielle. Tous étaient cependant d’accord sur un point : par rapport à 2017, Marine Le Pen a de plus fortes chances de remporter le deuxième tour face à Emmanuel Macron.
En Allemagne, les réactions sont comme souvent caricaturales, la dictature de la bien-pensance de l’autre côté du Rhin et le manque de pluralisme médiatique y étant encore plus pesants que dans l’Hexagone. Le journal de centre-droit Die Welt a par exemple osé titrer dans son éditorial consacré aux élections françaises : « Le fait que les nazis votent pour Le Pen est bien le moindre des problèmes ». Même contenu hystérique à l’intérieur de l’article : « Le résultat équivaut à un tremblement de terre. Et il n’est pas exclu qu’une réplique encore plus violente suive dans deux semaines, lors du second tour des élections, dont les conséquences pourraient être catastrophiques pour la France, mais aussi pour l’Allemagne et l’Europe. » L’auteur constate en effet la disparition du très mal nommé « Front républicain » et le fait que « la société française a glissé fortement vers la droite » et que « sept années d’attaques terroristes nombreuses avec des centaines de morts ont laissé leur marque ».
En Italie, dans un éditorial intitulé « Rien n’est acquis d’avance. Pourquoi Macron doit vraiment craindre Le Pen », le grand journal de droite Il Giornale met l’accent sur le fait que, par rapport à 2017, le parti de Marine Le Pen n’est plus perçu comme « un mouvement anti-système et extrémiste » mais est une vraie force souverainiste et populiste capable d’attirer les électeurs de Zemmour et de Mélanchon qui, avec ceux du RN, représentent plus de la moitié de l’électorat. Si l’on y ajoute les autres tendances hostiles à Macron, celui-ci peut être battu le 24 avril, insiste le journal.
Le journal espagnol El Mundo publiait lundi matin un éditorial intitulé « Le danger d’une autre Hongrie dans l’UE » et signalait qu’« une victoire de Marine Le Pen au second tour supposerait la rupture de l’axe franco-allemand ». En cas de victoire de Marine Le Pen, selon le journal « Les républicains comme Trump, qui espèrent reprendre le contrôle du Congrès en novembre, Poutine et Xi Jinping célébreraient leur triomphe, l’administration Biden perdrait l’un de ses principaux collaborateurs en Europe, et l’UE (...) subirait un revers bien plus important qu’avec le Brexit. »
L’éditorialiste du journal britannique The Telegraph conserve son sang-froid et livre à ses lecteurs une analyse plus factuelle, puisqu’il note à juste titre que, en ce qui concerne Poutine, Emmanuel Macron en est largement aussi proche que Marine Le Pen et que, finalement, si le programme de la candidate du RN a un goût de « national-socialisme », il est idiot de faire un parallèle avec les années 1930 : « Mme Le Pen est en compétition dans les urnes et dans le cadre de l’État de droit. (...) Ses ennemis idéologiques sont le capitalisme mondialiste anglo- saxon et le super-État européen. C’est une vision purement gauloise du monde. C’est pourquoi il est si difficile pour Macron de la contrer. » L’éditorialiste note lui aussi que la candidature d’Éric Zemmour aura contribué à donner à Marine Le Pen une image de respectabilité.
Source : Présent 12/04/2020