Oui, la bataille de Slaviansk et Kramatorsk a commencé. Non, les Russes ne se sont pas fixés pour objectif d'avoir fini le 9 mai. S'il est une leçon que les Russes ont tirée du terrible XXè siècle, c'est la nécessité de faire du temps leur allié. Plus on observe le conflit, qui en est à son 56è jour, plus on est frappé par le contraste entre l'excitation permanente des Occidentaux et le sang-froid des Russes.
À l'abri des missiles hypersoniques, ayant établi une maîtrise de l'espace aérien dès les premiers jours du conflit, la Russie s'est mise à faire la guerre au sol comme on la faisait au XVIIè ou au XVIIIè siècle en Europe : l'avancée est prudente, méthodique, soucieuse des pertes (à l'opposé des deux guerres mondiales) et elle inclut des cessez-le-feu réguliers et des mains tendues pour la négociation. Une partie de la rage occidentale vient non seulement de l'impuissance de plus en plus visible de cette armée ukrainienne dans laquelle on a investi des milliards mais aussi de l'apparente impassibilité de l'adversaire. Rien ne semble se passer comme prévu : les sanctions ne marchent pas dans la mesure où une grande partie du monde ne s'y associe pas ; et puis l'armée russe s'adapte rapidement: puisque la pression sur Kiev n'a pas suffi à convaincre l'Ukraine et ses soutiens occidentaux que le temps de la négociation était venu, eh bien les Russes se retirent de la région capitale et s'apprêtent à faire passer tout ce qui se trouve à l'est d'une ligne Kharkov-Odessa sous leur contrôle, direct ou indirect.