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Grandes et petites questions

220705

I. À petit pays, hélas, les petits problèmes paraissent immenses. Ainsi la journée du 3 juillet fut-elle dominée dans notre Hexagone par une grande affaire : "Coquerel superstar ?". A-t-il ou non commis, il y a 10 ans, des gestes déplacés en dansant avec une militante de gauche ? Ce débat éclipse celui des jours précédents autour de sa désignation, pourtant assez inquiétante, comme président de la commission des Finances de l'Assemblée nationale. À vrai dire d'ailleurs on a moins parlé de son fiscalisme… du programme de travail que le nouvel élu se propose de mettre en œuvre, dénonçant ce qu'il considère comme le résidu du thatchérisme… que de la polémique attisée au sein des droites sur les responsabilités respectives des deux groupes qui additionnés ne comptaient pourtant que 19 commissaires d'opposition sur 41… Voilà les points sur lesquels focalisent nos médias désinformateurs !

II. Le lendemain 4 juillet, ce sera au tour de la composition d'une gouvernement Borne à peine remanié de prendre la vedette… L'événement, singulièrement immobiliste, appelle sans doute quelques remarques. La liste communiquée au public et aux médias fait figurer protocolairement en tête les trois personnalités suivantes : 1° Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances "et de la souveraineté industrielle et numérique" (?), 2° Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur "et des Outre-mer" (?), Catherine Colonna, "ministre de l'Europe et des Affaires étrangères". Sans nous attarder inutilement sur les intitulés respectifs, observons simplement qu'On nous met en avant trois transfuges des rangs du RPR. Imposture totale, ralliement zéro.

III. Et puis ce 5 juillet, apparaît l'hypothèse de la motion de censure déposée par la NUPES, et que les oppositions de droite, a priori ne signeront pas : dès lors, le gouvernement Borne se dira dispensé de poser la question de confiance sur sa déclaration de politique générale. Ce genre de subtiles manœuvres parlementaires faisait les délices de la quatrième république. On en avait oublié le mécanisme. Nous allons bientôt le réapprendre avec l'ingrédient de la prétention à mettre hors jeu de toute convergence avec le RN.

IV. Pendant ce temps-là les questions internationales passent évidemment au second plan. On a tout de même évoqué, sans laisser le public en entrevoir probablement la portée, le sommet de l'OTAN à Madrid du 30 juin. Cette réunion avait pourtant mis à l'ordre du jour la transformation de l'institution vieille de 73 ans. Qu'en réponse au sentiment grandissant en Europe du Nord d'une menace bien réelle, on ait accepté l'adhésion de la Finlande et de la Suède, autrefois neutres, ni ce fait ni le chantage turc, n'est certes pas resté inaperçu. En conséquence, l'alliance atlantique regroupera désormais, sur 32 membres, 2 pays d'Amérique du Nord, 1 pays d'Asie mineure, lui-même allié à géométrie variable, et 28 nations européennes. Si cet ensemble persiste à être dominé par les États-Unis, qui l'ont fondé en 1949, ceci tient tout simplement au fait que les Américains affectent 5 % de leur PIB à la défense alors que les Européens jusqu'ici atteignent difficilement un modeste 2 %.

Or, l'OTAN élargit aussi, très officiellement depuis 2019, ses centres d'intérêt vers la zone dite indo-pacifique, où rappelons-le, les possessions maritimes françaises restent aussi considérables que les moyens dont dispose, pour les défendre, notre Marine nationale demeurent modestes.

V. L'occultation médiatique de la structuration du bloc chinois, devient ainsi légitimement un vrai sujet. On peut considérer le silence à cet égard comme objet de scandale.

En effet, depuis le 24 juin, nous attendons toujours que soit mentionné le développement du bloc chinois. Il est devenu patent à l'occasion du XIVe Sommet des BRICS organisé à Pékin, qui a également permis à Vladimir Poutine de réapparaître ce 22 juin sur la scène internationale. Au départ cette association, qui regroupe les plus importantes nations considées comme économiquement émergentes, se voulait une sorte de rééquilibrage en réponse à la domination du "G7". Celui-ci représente les principales puissances industrielles. À cet égard l'entrée en 2010 de l'Afrique du sud, dans le groupe BRIC devenant BRICS, était présentée comme un simple élargissement de ce partenariat destiné à influencer dans un sens "multipolaire" la gestion des affaires internationales. À noter aussi que depuis lors, l'Inde et le Brésil ont changé d'orientation idéologique sans quitter encore l'organisation. New Delhi s'est détourné du vieux parti du Congrès de tradition "neutraliste". Battu en 2014, il a laissé la place au parti nationaliste. À Brasilia, le règne du marxiste Lula et de sa disciple et directrice de cabinet Dilma Rousseff, elle-même fille d'un communiste bulgare, s'est achevé en 2016, le parti dit des travailleurs ayant été battu par Jaïre Bolsonaro. Le maintien technique de ces deux pays dans l'attelage des BRICS ne doit cependant pas nous tromper.

Certes cette année encore, se réunissaient les 5 nations fondatrices et statutaires, soit les représentants des pays membres actuels :Vladimir Poutine pour la Russie, Cyril Ramaphosa pour l'Afrique du sud, Hamilton Mourão vice président du Brésil, et Narendra Modi premier ministre de l'Inde, rival asiatique de l'Empire du Milieu.

Mais Pékin avait aussi invité 13 autres pays aux statuts divers. Ils sont supposés élargir le cercle à tous les continents, excepté bien sûr l'Amérique du Nord et l'Europe de l'Ouest. Soit les participants suivants qui annoncent l'élargissement en cours : Abdelmadjid Tebboune pour l'Algérie, Alberto Fernández pour l'Argentine, Abdel Fattah El-Sisi pour l'Egypte, Joko Widodo pour l'Indonésie, Seyyed Ebrahim Raeisi pour l'Iran, Kassym-Jomart Tokayev pour le Kazakhstan, Macky Sall pour le Sénégal, Shavkat Mirziyoyev pour l'Ouzbékistan, Hun Sen pour le Cambodge, Abiy Ahmed Ali pour l'Éthiopie, Josaia Voreqe Bainimarama pour les îles Fidji, Ismail Sabri Yaakob pour la Malaisie, et Prayut Chan-o-cha pour la Thaïlande. Signalons que les deux pays dont l'adhésion semble d'ores et déjà explicitement agréée par la Chine, avec l'aval de la Russie : l'Iran des mollahs et l'Argentine retournée au péronisme de gauche. Il s'agit, déclare Zhao Lijian porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, de "permettre aux partenaires partageant les mêmes idées de faire partie de la famille BRICS". Et l'on souligne ainsi que les membres du BRICS représentent 30 % de la production mondiale brute, 40 % de la population mondiale et 27 % de la superficie terrestre mondiale.

Si les recensions restent rares, les documents officiels sont parfaitement disponibles. Aussi bien l'adresse inaugurale de Xi Jinping du 22 juin, la conclusion commune en 75 points et une intervention particulièrement éclairante quant à la pensée de Xi Jinping, marxiste et stalinienne jusque dans l'illusion planificatrice.

L'auteur de ces lignes ne manquera pas dans les jours d'été qui viennent de consacrer son travail à rappeler notamment le danger qui en résulte pour la France, pour l'Europe et pour les libertés.

JG Malliarakis

https://www.insolent.fr/2022/07/grandes-et-petites-questions.html

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