Il faut rappeler en effet que :
+ L’Allemagne de Guillaume II est la première responsable de la soviétisation de la Russie, puisqu’elle y a renvoyé Lénine dans l’intention de détruire la puissance russe!
+ Hitler a tué autant de Soviétiques que la Première Guerre mondiale, Lénine et Staline réuni!
+ Le pacte germano-soviétique est la réponse de Staline aux accords de Munich.
+ Sans que l’un soit plus justifiable moralement que l’autre, les deux totalitarismes de l’entre-deux-guerres diffèrent. Totalitarisme de la guerre civile, le communisme respectait les accords internationaux qu’il signait; tandis qu’aucun compromis diplomatique n’était possible avec Hitler et son totalitarisme fils de l’impérialisme colonial appliqué à l’Europe.
+ Toute la Guerre froide a été fondée sur l’idée (européenne) que l’on pouvait trouver un compromis diplomatique avec l’URSS car la guerre nourrirait le communisme tandis que la paix aiderait à le faire tomber.
+ A vrai dire, Staline avait espéré à l’origine qu’entre l’Europe sous influence anglo-saxonne et la sphère de protection des intérêts soviétiques, il y aurait une vaste zone neutre et démilitarisée, qui irait de la Scandinavie aux Balkans, comprenant en particulier l’Allemagne.
+ La politique étrangère américaine est incapable d’accepter un partage des sphères d’influence et un équilibre des puissances. Entre 1945 et 1947, Washington n’a cessé de “chatouiller” les Soviétiques…jusqu’en Ukraine, avec l’infiltration d’agents américains pour aller soutenir les nationalistes ukrainiens anciens alliés des nazis luttant contre les troupes du NKVD. Un air de déjà vue? Toujours est-il que l’Europe s’est retrouvée, à la fin du bras de fer stérile entre messianisme américain et messianisme soviétique, coupée en deux!
+Depuis 1991, les Américains refusent que l’Ukraine puisse être neutre. Elle devait être occidentale, c’est-à-dire en fait américaine…même au prix d’une guerre avec la Russie.
+ Personne ne niera les atrocités soviétiques dans les Pays baltes et en Pologne à la faveur du pacte germano-soviétique. Mais n’oublions jamais que les nazis y ont fait bien pire après juin 1941.
+ On ne comprend ce qui s’est passé au XXè siècle en Europe centrale et orientale que si l’on accepte que (a) tous les peuples de l’URSS, y compris la Russie, ont atrocement souffert du joug communiste; (b) tous les peuples y compris l’Ukraine, les Lituaniens, les Lettons et les Estoniens, ont fourni leur lot de communistes persécuteurs.
L’instrumentalisation du pacte germano-soviétique par l’Union Européenne a créé un climat peu favorable à la paix en Europe
J’ai bien conscience, en écrivant tout cela, d’aller contre l’instrumentalisation de l’histoire que pratique l’Union Européenne depuis qu’en 2009 a été instaurée par le Parlement Européen une journée commémorative du 23 août.
A première vue, qui ne se réjouirait que soit célébrée une journée européenne du souvenir des victimes des totalitarismes? Sauf que cette initiative n’est pas si honnête qu’elle en a l’air. Elle a été poussée en particulier par les pays baltes dans une optique anti-russe.
C’est à l’abri de cette commémoration désincarnée, décontextualisée qu’ont pu avancer, depuis vingt ans, de véritables réhabilitations de la collaboration des pays baltes ou d’une partie des Ukrainiens avec la nazisme.. C’est une tendance lourde, qui remonte à l’entrée de la Pologne et des Pays baltes dans l’OTAN et à la “révolution orange en Ukraine. Comme le résume Jean-Marie Chauvier:
“Certaines institutions européennes, tels le Conseil de l’Europe et le Parlement européen, assimilent désormais nazisme, stalinisme et communisme. Les médias jugent Hitler et Staline coresponsables de la guerre en raison de leur pacte de non-agression signé en 1939 et de ses clauses secrètes. La Pologne insiste particulièrement sur le massacre de ses officiers opéré par les Soviétiques à Katyn en 1940. (…)
A grands coups d’instituts et de musées vitupérant les « occupations soviétiques » et les horreurs bolcheviques, les nouveaux Etats baltes et l’Ukraine sous la présidence de Viktor Iouchtchenko ont mis en chantier des « mémoires nationales » qui valorisent les « résistances patriotiques » des années 1941-1945. Ainsi honorent-ils l’Organisation des nationalistes ukrainiens (OUN), qui lutta contre l’Armée rouge et dont les principaux chefs s’engagèrent dans la collaboration avec l’Allemagne nazie.
Célébrations, défilés, hommages et constructions de monuments se succèdent. En Lettonie et en Estonie, ils sont voués aux anciens SS ; en Ukraine, aux vétérans de la division (Waffen SS) Galichina (Galizien) et de l’Armée des insurgés (OUN-UPA), pourtant accusée, entre autres crimes, du génocide des Polonais de Volhynie. En Roumanie, c’est la mémoire du dictateur fasciste Ion Antonescu qu’on « restaure » ; en Pologne, les anciens des Brigades internationales en Espagne se voient traités de « criminels ».
Ce « révisionnisme » s’imposerait aisément s’il n’y avait eu le génocide des Juifs. Or les nazis et leurs alliés combattaient le « judéobolchevisme » : l’antibolchevisme a bonne presse, mais pas le judéocide. Certains persistent néanmoins à dénoncer les « crimes juifs » du régime soviétique. En 2009, par exemple, les services de sécurité ukrainiens (SBU) publient une liste de « responsables de la famine de 1932-1933 » (Holodomor) dont les noms sont principalement juifs. Kiev comme Riga prennent toutefois garde que leurs politiques mémorielles ne versent pas dans le négationnisme. Mieux : en coopération avec Israël, les autorités commémorent l’ Holocauste. Mais comment dissimuler que, parmi les « patriotes » réhabilités, figurent des acteurs du génocide ?“
On lira aussi la très bonne analyse de Lionel Richard, parue en 2010, toujours dans le Monde diplomatique, qui se termine par ces mots: “l’origine de la Seconde Guerre est-elle imputable à ce pacte germano-soviétique ? Le prétendre revient à falsifier la nature du national-socialisme et à minimiser la culpabilité de l’Allemagne nazie, en la détournant partiellement sur l’URSS. L’invasion de la Pologne avait été planifiée par le haut commandement de la Wehrmacht, ainsi qu’en attestent les archives, dès la fin janvier 1939. Sept mois avant le pacte germano-soviétique…. ”
Laissons le dernier mot à, Jean-Marie Chauvier, qui écrivait, en 2010, de manière prémonitoire:
“La soif de savoir ne semble pas le moteur des « nouvelles identités » nationales et européennes. Des objectifs géopolitiques transparaissent : les « nouveaux grands récits » tendent à redéfinir les frontières, les appartenances « civilisationnelles ». Les actes « mémoriels » s’accompagnent de demandes de réparations à la Russie actuelle : la Lettonie exige 666 millions de dollars au titre de l’« occupation soviétique ».
Dans un tel climat de « guerre froide des mémoires », les politiques de « gestion du passé » paraissent moins destinées à connaître l’histoire qu’à l’instrumentaliser”.